Le combat d’une retraitée pour retirer son compagnon d’un Ehpad…

Monique Bachet, une octogénaire de Messein, tente depuis plusieurs mois de retrouver son compagnon, résident d’un Ehpad meusien.

Dans un contexte marqué par le Covid, la situation s’est enlisée avant qu’une décision de justice ne statue en sa faveur.

Le combat d’une retraitée pour retirer son compagnon d’un Ehpad...

 

« Je ne peux laisser Maurice mourir de chagrin ». Monique Bachet ne sait plus à quel saint se vouer. Cette retraitée de 80 ans, résidant à Messein, tente depuis plusieurs mois de faire sortir son compagnon d’un Ehpad de Gondrecourt-le-Château, en Meuse. L’histoire est assez rocambolesque : Monique et Maurice, 88 ans, se fréquentent depuis 12 ans. Ils vivent ensemble, dansent, partent en vacances. Même lorsque l’homme, souffrant de troubles cognitifs, est placé sous tutelle il y a un peu plus de deux ans, la vie sociale de ce couple qui a retrouvé une vie sentimentale sur le tard reste active.

Mais en septembre, l’aidante souhaite partir en cure à Contrexéville pour se reposer. Son compagnon ne peut pas l’accompagner. À contrecœur, l’octogénaire, fatiguée, accepte le placement de l’homme dans un Ehpad. De retour de cure thermale, elle regrette amèrement son choix : « En le rappelant, je voyais qu’il dépérissait. Je m’en suis voulu ! »

Une lettre au ministre Olivier Véran

Précédemment, une opération de l’octogénaire avait nécessité un séjour temporaire de Maurice dans un établissement toulois, d’où il s’était évadé. Pour la tutelle et certains proches, l’état de santé du couple ne leur permet plus de vivre ensemble. Mais Monique Bachet n’en démord pas. Depuis huit mois, elle relance inlassablement la maison de retraite et l’Udaf (Union départementale des associations familiales) de Meurthe-et-Moselle, chargée de la tutelle, afin de faire avancer plus rapidement les choses. Elle rédige même des missives au préfet et au ministre de la Santé Olivier Véran, lui enjoignant d’agir.

« Je lui parlais des mésanges qui venaient sur notre terrasse. Ça lui faisait du bien ». Monique Bachet

 

En octobre, la Messinoise a droit à une visite, à travers une vitre. Quelques semaines plus tard, elle retourne à Gondrecourt-le-Château en catimini. Elle, derrière une haie, lui à sa fenêtre. Telle une Roxane rendant la pareille à son Cyrano, elle lui glisse des mots doux, par téléphone : « Je lui parlais des mésanges qui venaient sur notre terrasse. Ça lui faisait du bien ».

Ce sera l’un des derniers contacts qu’elle aura avec son « chéri ». Il ne sera plus joignable, faute de recharge pour son téléphone. « Il n’a pas dû comprendre. Maurice a payé pour moi », s’emporte la retraitée, « personne ne me tient au courant, je ne sais pas dans quel état il est », souffle-t-elle dans un sanglot.

« Il n’y a eu aucun frein aux visites », s’est défendu la direction de l’Ehpad, tout en reconnaissant que l’une d’entre elles a été annulée, sans donner de précisions.

Menaces de défenestration

Fin mars, la justice a statué en faveur du couple ; le juge des contentieux de la protection a décidé que Maurice devait revenir chez sa compagne « pour sa santé psychique et cognitive ». Une expertise psychiatrique du résident, jointe au dossier, fait état d’une situation sociale préoccupante : dans son rapport, le médecin note « un détachement affectif » ainsi qu’un « isolement progressif ». Il requiert un retour au domicile de Mme Bachet, en raison « de demandes incessantes de rentrer chez lui » et de « menaces de défenestration ». Depuis le 22 mars, date de l’ordonnance du tribunal, Monique Bachet assure n’avoir aucune nouvelle de l’évolution de la situation, malgré ses démarches administratives.

« Le problème est en train de se régler. S’il n’y avait pas eu le Covid, cela aurait mis trois semaines », a plaidé Emmanuel Thibaut, directeur général de l’Udaf. « Il n’y a eu aucune volonté de séparer les personnes ou de perdre du temps », reprend-il, tout en reconnaissant les difficultés que Mme Bachet a eues à voir son compagnon. Il assure que toutes les conditions nécessaires, notamment les aides à domicile, sont enfin réunies pour le retour de Maurice chez sa compagne, prévu le 10 mai, sans cacher sa crainte de voir la situation se reproduire dans quelques mois.

La retraitée assure qu’elle peut encore s’occuper de son compagnon. Mais a peur qu’il ne soit déjà trop tard : « Je vais récupérer un homme qui a souffert ».

Source EST REPUBLICAIN.

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