À Villejuif, les autistes s’épanouissent en musique…

Il reste des places pour les cours d’éveil musical et de hip-hop organisés à la Maison de la Santé et du Handicap par une association de profs spécialisés, APTE.

 Villejuif. Erwan (à dr.), autiste, s’applique durant son cours de guitare avec Jean-Paul de l’association APTE à la Maison de la Santé et du Handicap de Villejuif.

 

Erwan tend à nouveau sa guitare à son professeur. « Faut accorder », murmure-t-il. C’est la 3e fois d’affilée qu’il fait accorder sa guitare par Jean-Paul. Car cet après-midi-là, pour ce grand gaillard atteint d’autisme, il est important d’accorder sa guitare. Peu importe le nombre de fois, peu importe que les cordes sonnent déjà juste, c’est important à ses yeux. Jean-Paul, son enseignant, le comprend et le respecte. Il a l’habitude. Il est même formé pour cela.

Un tarif de 15 euros par mois

Il fait partie des profs de l’association APTE (Autisme, Piano, Thérapie Éducative) qui assure des cours d’éveil musical, de hip-hop et de guitare au sein de la Maison de la Santé et du Handicap de Villejuif pour les adultes et enfants dès 4 ans souffrant de troubles autistiques.

Les ateliers musicaux destinés aux autistes ne courent pas les rues en région parisienne. Encore moins à un prix aussi accessible, 15 euros par mois. Mais le plus intéressant est qu’il reste des places disponibles pour l’éveil musical (jeudi matin) et le hip-hop (mardi après-midi). « Si la famille a des difficultés financières, la mairie est là pour l’aider », précise Mariama Bellin, élue en charge du Handicap à Villejuif. La Ville tient à favoriser l’inclusion de ce public si particulier : elle vient d’ouvrir une classe autisme en maternelle au groupe scolaire Simone-Veil, accueille plusieurs structures médico-sociales sur son territoire, verse une subvention à l’association APTE et met ses locaux à sa disposition…

Des ateliers rares en Ile-de-France

« Les autistes ne sont pas des handicapés, ce sont des personnes, des citoyens. Ils ont le droit comme tout le monde d’accéder à la pratique instrumentale, qui leur fait tellement de bien », confie Françoise Dorocq, directrice et fondatrice de l’association APTE, qui a formé 90 enseignants à cette pédagogie particulière.

« Mais le fonctionnement d’un enfant autiste n’a rien à voir avec un enfant ordinaire, poursuit-elle. Il ne se situe pas bien dans l’espace et dans le temps. Il ne sait pas qu’il a des mains et des pieds, par exemple. Donc si on lui dit Touche cet instrument, il faut d’abord aller chercher sa main. La guitare est intéressante car c’est un instrument de vibration, en corps à corps. Le piano, lui, retentit sur le plexus solaire. Avec une pratique musicale, du chant ou de la danse, ils sont dans le sensoriel, ce qui est accessible à 85 % des autistes. »

Ce jour-là, Frederico, 42 ans, du foyer d’accueil médicalisé Tamaris de Villejuif, vient pour sa leçon hebdomadaire de guitare. Jean-Paul, son prof, corrige la position de ses mains, l’encourage, l’accompagne : « mets le doigt sur la première corde. Allez, le sol, c’est difficile, mets le 2e doigt ici ». L’air de « Joyeux anniversaire » retentit dans la pièce. Frederico est fier. « J’arrive à lire les notes sur la tablature », sourit-il.

Ils s’expriment à travers les notes

Gratter sa guitare, entendre les notes et se concentrer sur la partition lui procurent du bien-être. « Cela me fait passer le temps, ça m’occupe », explique-t-il sobrement.

Vincent, l’éducateur d’Erwan au FAM Tamaris, va plus loin : « au niveau cognitif, cela travaille les gestes coordonnés, cela les aide à exprimer des choses qu’ils ne peuvent pas dire via la parole. Cela les aide à évacuer une forme de stress. Ils se calent sur un son, sur une rythmique. Pour certains, un son égale une couleur. Ils en font une interprétation différente de la nôtre. Une chose est sûre : la musique est un langage universel ».

La Maison de la Santé et du Handicap, ouverte en 2018, est particulièrement adaptée à ce public : le lieu est calme, les pièces sont à la fois vastes et à taille humaine, la lumière n’est pas agressive. Bref, de quoi mettre les autistes dans les meilleures conditions pour s’épanouir.

Source LE PARISIEN.

Pour marque-pages : Permaliens.