TEMOIGNAGE. « Quel avenir pour ma fille Léa, 23 ans, autiste ? »

Christine Grolleau est la mère de Léa, 23 ans, diagnostiquée autiste depuis l’âge de 2 ans.

Le 12 juin 2021, elle sera dans la rue lors d’une manifestation régionale à Quimper (Finistère) aux côtés des professionnels de l’action sociale pour réclamer des moyens et des places pour les adultes porteurs de handicap.

Christine Grolleau et sa fille, Léa, âgée de 23 ans : « J’adore ma fille plus que tout au monde mais je sens bien que, seule, je ne peux pas tout prendre en charge. »

 

Christine Grolleau est la mère d’une jeune autiste de 23 ans. Elle témoigne à la veille d’une manifestation qui aura lieu à Quimper (Finistère) le 12 juin 2021. Professionnels et parents seront dans la rue pour réclamer une meilleure prise en charge pour les personnes handicapées.

« Léa a 23 ans. Elle est autiste et très peu autonome. Elle a été diagnostiquée à l’âge de deux ans et depuis, c’est le parcours du combattant. Elle est actuellement accueillie l’Institut médical éducatif (IME) du Vélery à Plourin-les-Morlaix qui dépend de l’association les Genêts d’Or. Elle est interne du lundi au vendredi. C’est un peu atypique.

Tous les centres du département ne proposent pas cet accueil mais cela convient très bien à Léa qui a besoin de se sociabiliser. Le problème, c’est qu’elle est toujours en IME alors qu’elle a plus de 20 ans. Normalement, elle devrait être orientée en foyer mais il n’y a pas de place. Alors elle reste au Vélery, en attendant… Dans le département, 184 enfants sont dans son cas : ils restent en IME faute de places adaptées pour les adultes porteurs de handicap.

« Je ne suis pas immortelle »

Aujourd’hui, en tant que parent d’un enfant handicapé adulte, je pousse un cri de colère. Que va devenir ma fille de 23 ans quand je ne serai plus là ? Cette question me taraude. Je vis avec cette angoisse au quotidien. Il n’y a pas de place pour elle dans la société et pourtant, je ne suis pas immortelle. Je ne veux pas que sa sœur ressente, un jour, cette inquiétude permanente et cette charge mentale. Mais aujourd’hui, l’avenir de ma fille est incertain. À chaque instant, j’ai peur qu’on ne l’accepte plus à l’IME. C’est épuisant.

La période du confinement a été très difficile pour nous. Beaucoup de parents se disent épuisés voire effondrés après ces longs mois d’isolement. À la maison, on a frisé plusieurs fois la catastrophe. Les troubles du comportement de ma fille se sont accentués. Elle ne dormait plus, multipliait les crises. Elle a recommencé à mordre et à s’automutiler. En tant que parent, on est tellement fatigué que l’on ressent un soulagement en déposant notre enfant à l’institut. Quand tout a rouvert, on a soufflé. Puis on culpabilise.

Le plus dur, c’est d’arriver à couper le cordon. On est pris en tenaille par des sentiments contradictoires : porter notre enfant, le protéger et l’aider à s’éloigner de nous, car il devient adulte.

« Un bébé de 23 ans »

Je suis enseignante. J’ai divorcé du père de ma fille. C’était presque inéluctable. Beaucoup de mères seules prennent en charge leur enfant handicapé. C’est un fait. Cela demande une telle énergie de s’occuper d’un enfant qui ne peut pas manger, s’habiller ni se laver tout seul. C’est un bébé de 23 ans dont il faut s’occuper tous les jours. Mais qui a besoin de quitter la maison, un jour, comme tout le monde.

J’adore ma fille plus que tout au monde mais je sens bien que, seule, je ne peux pas tout prendre en charge. Émotionnellement et physiquement, je suis fatiguée. Heureusement, grâce à l’internat qui accueille Léa trois nuits par semaine, j’ai pu reprendre mon travail à plein temps. Mais j’ai toujours peur que ça s’arrête.

Alors il faut bouger les choses. Je me suis engagée il y a quinze jours dans un collectif de parents d’enfants placés en IME pour alerter sur le manque criant de places pour nos enfants handicapés adultes. Et je serai dans la rue le 12 juin à Quimper pour qu’enfin, on nous tende la main. »

Samedi 12 juin, manifestation à 14 h, place de la Résistance à Quimper.

Source OUEST FRANCE.

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