TÉMOIGNAGE. « J’ai vécu pendant 21 ans avec une autiste, sans m’en rendre compte… »…

L’autisme est un trouble envahissant du développement qui touche de plus en plus d’enfants.

Mal compris par beaucoup, il existe aussi chez l’adulte.

Un retraité rennais témoigne sur l’autisme, un mal dont a souffert son ex-épouse.

Un habitant de Rennes livre un récit poignant, à partir de son expérience personnelle.

Un lecteur de Rennes nous a adressé une longue lettre de plusieurs pages dans laquelle il raconte, avec beaucoup d’émotion, le trouble autistique dont a souffert son épouse. « Avec le recul, le diagnostic est brutal, écrit-il, J’ai vécu pendant vingt-et-un ans avec une autiste. Cette maladie, on en parle beaucoup aujourd’hui, mais elle n’était pas détectée dans les années 1950. C’est un handicap de naissance, difficile à soigner. »

Des souffrances de part et d’autre

Le couple a longtemps vécu sans mettre un mot sur ce qui a rongé leur vie de famille et sans avoir de diagnostic, avec des souffrances de part et d’autre. Un témoignage fort, que ce Rennais âgé aujourd’hui de 68 ans – nous l’appellerons Claude – livre sous couvert d’anonymat.

« Nous nous sommes mariés en août 1971, à Dinard, raconte-t-il. Mon épouse me rejoint alors en région parisienne, où je travaillais. À l’époque, je remarque qu’elle prend de nombreux médicaments. Je suis étonné, je ne le savais pas. Je la trouve triste, renfermée. Je mets cela sur le compte du dépaysement. »

« Violente, elle m’a frappé »

Au fil des mois, la situation ne fait qu’empirer. « Certains signes auraient dû m’alerter. Elle montrait une hypersensibilité au bruit : dès qu’une porte claquait ou qu’une moto passait dans la rue, elle était inquiète. » Plus grave, son ex-épouse peut se montrer agressive, voire violente. « Elle s’énervait facilement, elle m’a frappé devant ma mère, ce sont des choses qu’on n’oublie pas », confie Claude, encore gêné.

La situation n’est pas facile à vivre au quotidien, mais personne ne se doute de rien à l’extérieur. Les proches, les voisins, les amis, tous sont loin d’imaginer la réalité. « Elle était comptable. La situation sociale permet de sauver les apparences. Les gens étaient plutôt admiratifs, ils disaient d’elle qu’elle comptait comme une machine. »

« Un grand sentiment de solitude »

« Il y avait un déséquilibre énorme entre nous, constate Claude, avec le recul. Elle ne me voyait pas. Elle montrait aucune empathie à mon égard, alors que j’étais malade. Je devais tout gérer après ma journée de travail : les courses, les repas, le ménage, les devoirs des enfants, etc. Rien n’était partagé. J’éprouvais un grand sentiment de solitude. »

Son ex-épouse se montre de plus en plus violente. Les insultes pleuvent, les coups parfois aussi. « J’avais peur pour moi, mais aussi pour nos deux filles. » Un beau matin de 1992, il décide de partir, de disparaître, en laissant tout derrière lui : maison, voiture, objets personnels. « J’ai attendu que mes enfants soient autonomes. Je n’en pouvais plus, il fallait que je m’échappe de ce piège qui se refermait sur moi. »

En 1992, il part de chez lui

Il se retrouve seul, dans une chambre de 7 m² qu’il loue près de la gare. « Je repartais de zéro mais j’étais heureux. J’ai pu me reposer, reprendre des forces, car j’étais épuisé. C’était comme une délivrance. » Plus tard, le couple a divorcé. Claude a emménagé, seul, dans un appartement plus grand.

Il n’a jamais revu son ex-femme mais il est resté très proche de ses deux filles, qu’il voit régulièrement, avec ses petits-enfants. Comment a-t-il pu découvrir ce dont souffrait son ex-épouse ? « En consultant un médecin, j’ai fini par comprendre la maladie qui était la sienne », confie le retraité. Il s’est tourné vers des associations qui soutiennent les personnes souffrant d’autisme et leurs proches. Il s’efforce d’aider les autres à son tour.

Source OUEST FRANCE.

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