Jean-Marie Choffat : 50 ans d’alpinisme, 30 ans de cancer, 19 ans de greffe : la vie tout en montagnes russes du Belfortain Jean-Marie Choffat…

Frappé par un cancer en 1990 à l’âge de 34 ans, puis greffé du foie en 2001, l’alpiniste belfortain a été fait cette année Chevalier dans l’ordre national des Arts et des Lettres.

Un joli pied de nez à cette institutrice qui, un jour de l’automne 1968, lui a dit qu’il ne ferait jamais rien de bon dans la vie.

50 ans d’alpinisme, 30 ans de cancer, 19 ans de greffe : la vie tout en montagnes russes du Belfortain Jean-Marie Choffat

 

L’âge avançant, on n’échappe pas, à un moment ou l’autre, à l’inventaire de sa propre vie, amalgame d’épisodes fastes et de revers de fortune, de rencontres lumineuses et de trahisons de personnes à qui on a donné et qui finissent, tôt ou tard, par vous le reprocher.

Jean-Marie Choffat résume la sienne sur un rythme ternaire : « L’année 2020 pour moi, c’est 50 ans de montagne, 30 ans de cancer , 19 ans de greffe. Mes 64 ans, je ne les ai pas dans la tête, mais largement dans le corps. »

Le crabe a rouvert un œil

Un corps abîmé, trituré, couturé. Un corps fatigué, constamment en limite de rupture alors que le crabe, sournois, agressif, a rouvert un œil avec l’apparition, en 2013, d’une métastase dans le médiastin, cette région de la cage thoracique située entre les poumons et contenant le cœur.

Sa vie, ce Belfortain, qui a grandi à Bourguignon et Mandeure dans le Doubs, l’a consacrée dès l’adolescence à l’alpinisme découvert dans un camp de vacances Peugeot où son père l’avait envoyé… pour le punir. Jusqu’à ce que la maladie – un carcinoïde de l’intestin grêle avec métastases hépatiques – vînt brutalement contrarier ses échappées verticales et lui rappeler l’extrême précarité de la condition humaine. C’était en 1990. Bien malgré lui, la mort, ou du moins son spectre, allait devenir une compagne d’une rare fidélité.

« Ma vie aujourd’hui, c’est la solitude »

Jean-Marie Choffat a traversé cahin-caha dix longues années de chimiothérapie qui se sont soldées par une greffe de foie complet en 2001.

Sa transplantation a généré de graves complications post-opératoires nécessitant la pose d’une prothèse diaphragmatique. Avec un seul poumon et 48 % de volume respiratoire, il a dû faire une croix sur la haute montagne.

« Ma vie aujourd’hui, c’est la solitude », confie-t-il. « Je n’ai plus de projet, mais je suis content d’avoir fait tout ce que j’ai fait. »

Sa consolation, ce sont ses souvenirs moissonnés au cours de ses 1 200 ascensions , en France et un peu partout dans le monde, dont 80 à 90 premières. Les plus beaux sont autant de fragrances dont la saveur apaise son esprit et lui réchauffe le cœur.

De l’école buissonnière à premier de la classe

Début 2020, il a appris que le Ministère de la Culture l’avait élevé au rang de Chevalier dans l’ordre des Arts et des Lettres (1). Lui l’adepte de l’école buissonnière qui n’a pas poussé bien loin ses études. Lui à qui une enseignante, en primaire, a affirmé un jour – devant ses petits camarades et en le tenant fermement par les cheveux – qu’il ne ferait jamais rien de bon dans la vie. Lui l’organisateur et l’animateur de conférences sur la montagne, en France, en Suisse, en Belgique et en Italie, durant les années soixante-dix et quatre-vingt. Lui l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages. Lui l’ex-chef d’orchestre du salon des auteurs de la Foire aux livres de Belfort.

Dérouler la trame de son histoire personnelle, ce n’est pas être pessimiste, ni même nostalgique. C’est être tragique, c’est-à-dire appréhender le réel tel qu’il est, dans sa vérité et sa nudité crues.

Source EST REPUBLICAIN.

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