Maëlys, 14 ans : « Le handicap de ma sœur rend nos vacances peu ordinaires »…

Maëlys B., 14 ans, collégienne. Elle est collégienne au Châtelet-en-Brie (Seine-et-Marne).

Son récit a été élaboré avec les journalistes de la Zone d’expression prioritaire, lors d’ateliers avec des jeunes.

« Ma sœur Maya a 10 ans et est atteinte du syndrome de Rett, une maladie rare qui touche les filles. »

 

La Zone d’expression prioritaire (Zep) élabore ces récits avec des jeunes de 14 à 28 ans lors d’ateliers d’écriture encadrés par des journalistes. Ces témoignages sont ensuite publiés par des médias. Ouest-France a choisi d’être l’un d’eux. Tous les mois, le premier mardi, dans le journal et sur ouest-france.fr, on peut lire ces récits de vie, comme celui de Maëlys, collégienne au Châtelet-en-Brie (Seine-et-Marne).

« Avec le handicap de ma sœur, le moindre déplacement devient toute une aventure. Ma sœur Maya a 10 ans et est atteinte du syndrome de Rett, une maladie rare qui touche les filles, car les garçons atteints en meurent dès la naissance. Cette maladie touche le chromosome X et empêche son développement naturel.

Quand j’ai appris que ma sœur était handicapée, je ne comprenais pas vraiment ce qui se passait autour de moi. Tout le monde était triste et désolé. J’ai compris lorsqu’elle a commencé à se différencier des autres enfants de son âge. Elle ne marchait pas, n’allait pas à l’école et ne pouvait pas parler. J’ai alors su que je n’aurais pas la même vie que les autres… »

« Il faut prévoir les trajets et les arrêts »

« Mes vacances ne sont pas ordinaires. Un jour, on a voulu partir en vacances en famille sur l’île d’Oléron. On a donc dû s’organiser ! Premier gros problème : le trajet. Les arrêts sont un peu prévus à l’avance. Par exemple, on doit s’arrêter régulièrement pour aller aux toilettes car il faut changer la couche de Maya. Toutes les toilettes ne sont pas adaptées pour les fauteuils roulants. Il faut donc porter ma sœur et mes parents ont mal au dos à cause de ça. On est souvent obligés d’utiliser les tables à langer pour bébé qui sont maintenant trop petites.

Et nous ne pouvons pas faire n’importe quelles activités. Pour les activités du type sportif : impossible ! Les parcs d’attractions, eux, sont accessibles, mais c’est quand même limité. En arrivant, il faut faire la queue durant longtemps, jusqu’à une sorte de bureau où ils vérifient les papiers pour savoir si Maya est « vraiment » handicapée. Puis, il nous arrive des fois, à mon père, mon autre petite sœur, et moi, de partir faire une activité, comme la pêche à pied, et de laisser ma sœur et ma mère au cottage. Maya peut faire des activités plutôt dans le style de la baignade ou des choses relaxantes (massage, espace Snoezelen, balade), mais rien qui la secouerait trop. »

« Une fois le fauteuil s’est embourbé dans le sable »

« Le simple fait d’aller à la plage est galère avec le fauteuil roulant… Les palettes pour aider à rouler ne vont pas loin. Après, il y a du sable partout dans le fauteuil. Une fois, le fauteuil s’est embourbé dans le sable. Des surveillants de baignade ou des pompiers ont alors aidé mon père à le porter et à le sortir du sable. Maintenant, on a acheté une serviette spéciale dans laquelle le sable ne rentre pas.

Avant, quand mes parents emmenaient Maya dans l’eau, mon père devait la porter, mais maintenant, nous avons un matelas gonflable semi-immergé : le centre, c’est de la toile, du coup son corps est dans l’eau. Une année, nous sommes allés à une plage accessible. Il faut faire une demande au préalable. Elle était super ! Elle était faite de galets et il y avait des caillebotis en bois qui allaient loin. On nous a prêté des hippocampes : des fauteuils roulants qui peuvent aller dans l’eau. »

« On retourne dans les endroits que l’on connaît »

« Les sorties pour manger doivent aussi être préparées. Maya doit, soit avoir pris son repas avant de partir, soit il faut vérifier qu’il y ait un mixeur sur place. Pour sélectionner les restaurants, on vérifie qu’ils sont accessibles aux fauteuils. Cela peut prendre longtemps de vérifier tous les critères et réserver. Si on va plusieurs fois au même endroit en vacances, on retourne dans les endroits que l’on connaît déjà.

Tous les ans, nous nous rendons à Center Parcs avec l’association française du syndrome de Rett (ASFR). Elle réserve un restaurant pour les « petites filles Retts », où les chefs sont au petit soin. Ils mixent le nécessaire et vérifient que nous avons tout à notre disposition. Center Parcs est plutôt bien équipé vis-à-vis des fauteuils roulants. Les cottages aménagés sont bien faits et possèdent une salle de bains supplémentaire et une entrée plus grande. Les piscines aussi sont grandes, et il y a de l’espace pour les fauteuils. »

« Les voyages sont plus compliqués pour les personnes handicapées, car il faut que des lieux, du matériel et des activités accessibles. »

« Les voyages sont plus compliqués pour les personnes handicapées, car il faut que les lieux, le matériel et les activités soient accessibles. Il faudrait des lieux plus spacieux pour accueillir les fauteuils, et sans marche pour l’entrée, ou avec une rampe. Souvent, ce qui est accessible ou adapté ne nous donne pas vraiment le choix !

Pour prendre le TGV, il faut faire plusieurs demandes à la SNCF, « juste » pour avoir une rampe pour pouvoir monter dans le train à cause de l’écart entre le wagon et le quai. Une fois, les contrôleurs avaient oublié de nous amener la rampe et on a dû porter le fauteuil avec Maya dedans. Des passagers ont aidé mon père… Mes parents stressent toujours pendant les correspondances en train. Quant à la place pour fauteuil roulant : pas le choix, c’est en première classe et il faut un adulte qui accompagne, donc il faut les moyens de payer les billets. »

« Ce n’est pas parce que Maya est différente que je l’aime moins »

« Ces voyages me responsabilisent. Ils me permettent de prendre conscience de l’environnement qui m’entoure et de la difficulté à se déplacer avec un enfant polyhandicapé. Il faudrait améliorer l’accessibilité des lieux « classiques » : magasins, centres commerciaux, lieux touristiques, parcs, écoles, restaurants, et l’ensemble des transports en commun et privés.

Lors des sorties, il y a plusieurs types de « regard » : les personnes curieuses mais pas méchantes, les enfants qui trouvent ça intéressant… et ceux qui jugent ou qui nous regardent bizarrement. C’est très offensant que certaines personnes autour nous regardent comme des bêtes de foire car on a un enfant handicapé et en fauteuil roulant. Ce n’est pas parce que Maya est différente que je l’aime moins. »

Source OUEST FRANCE.

 

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