Coronavirus : Premières explications à la perte d’odorat chez les patients atteints du Covid-19…

Une première étude américaine s’est penchée sur ce symptôme spécifique, la perte brutale d’odorat sans nez bouché.

 

Coronavirus : Premières explications à la perte d’odorat chez les patients atteints du Covid-19

  • A cause du Covid-19, certains patients se plaignent de perte soudaine de l’odorat, suivie souvent par une perte du goût.
  • Des études commencent à expliquer pourquoi ce coronavirus, à la différence des autres, provoque cette anosmie sans que le nez ne soit bouché.
  • Des pistes qui pourraient aider les médecins à mieux diagnostiquer la maladie et à aider les patients à retrouver un odorat fonctionnel.

Le Covid-19 fait partie de la même famille que les coronavirus  responsables des rhumes, mais s’en éloigne par bien des aspects. La mortalité élevée, bien sûr, mais aussi un symptôme spécifique qui a beaucoup intrigué. Fin mars, c’est par des forums de médecins oto-rhino-laryngologistes (ORL), qui s’étonnent de rencontrer plusieurs fois par jours des patients ayant subi  une perte subite de l’odorat – l’anosmie – et du goût, que cette particularité émerge. Et ce alors que les patients n’ont pas du tout le nez bouché.

« J’ai l’impression que les formes les moins sévères de coronavirus sont atteintes par cette perte d’odorat, ce sont d’ailleurs surtout de jeunes patients qui l’évoquaient », avance Jean-Michel Klein, président du Conseil National Professionnel d’ORL. Pour qui l’anosmie sans nez bouché est un signal aussi fiable qu’un test PCR pour savoir si vous êtes atteint du virus… Depuis, des équipes de chercheurs ont exploré les nez des patients infectés pour mieux comprendre d’où vient cette perte aussi soudaine que désagréable. Et quelques réponses commencent à se dessiner.

Une atteinte non des sinus, mais dans la partie supérieure du nez

On sait maintenant qu’à l’inverse d’un rhube qui vous embêche de resbirer, ce coronavirus  peut supprimer brutalement toute odeur sans modifier votre respiration (ou votre élocution). Une étude américaine publiée le 19 mai dévoile que sur 1.002 patients atteints du Covid-19, la moitié souffrait d’une perte d’odorat, 48 % d’une perte de goût. Sachant que ces deux sens sont très liés. Autre information : le nez qui coule – ou obstruction nasale – se retrouve moins souvent dans cette maladie que pour d’autres coronavirus. Pourquoi donc les patients ne sentent-ils plus rien, alors que leur nez n’est pas bouché ?

Un article de The Conversation apporte un début de réponse. « Des scanners du nez et des sinus effectués sur des patients Covid-19 atteints de perte d’odorat ont révélé que la partie de leur nez responsable de la perception des odeurs, la fente olfactive, se retrouve bloquée par un gonflement des tissus mous ainsi que par du mucus. Cette situation est connue sous le nom de « syndrome de la fente olfactive ». Le reste de l’organe et leurs sinus ont une apparence normale, c’est pourquoi les personnes concernées n’ont aucun problème pour respirer par le nez. »

Si dans le rhume, ce sont les sinus qui sont bouchés, le coronavirus attaque donc la partie supérieure du nez. Pour mieux comprendre, Jean-Michel Klein propose un petit rappel anatomique. « Au-dessus des fosses nasales se trouve une plaque olfactive qui est comme un toit, entre le nez et le cerveau, sauf qu’il est perçé de micro-trous où se trouvent des terminaisons nerveuses responsables du décodage de l’odeur. Dans le Covid, vous avez une inflammation de cette zone et probablement une réaction neurogène : les fibres nerveuses gonflent, ce qui fait qu’elles n’assurent plus leur fonction de transmission de l’odeur. Comme si la zone était court-circuitée. »

Un odorat qui réapparaît modifié

Deuxième question : pourquoi cette disparition puis cette réapparition brusque de ce sens ? On pensait de prime abord que le virus détruisait les neurones olfactifs, qui transportent les molécules aromatiques jusqu’au cerveau. Mais, comme l’explique l’article scientifique, « des travaux menés par une équipe internationale ont récemment démontré que les récepteurs ACE2 nécessaires au virus pour entrer dans les cellules n’étaient pas présents à la surface des neurones olfactifs. Ils ont en revanche été détectés à la surface des cellules « sustentaculaires », qui assurent un support structurel à ces neurones. Ces cellules de support sont vraisemblablement celles qui sont endommagées par le virus durant l’infection. » Les neurones olfactifs ne sont donc pas endommagés et une fois le virus éliminé du corps, les molécules aromatiques pourraient à nouveau rejoindre les récepteurs et le cerveau reconnaître le parfum du café ou du pain.

Troisième surprise : certains patients ne retrouvent pas ce sens ou gardent un odorat assez déficient. Ainsi, le café avait une odeur de poussière ou pire, de poubelle. Appétissant. « Dans cette maladie, qui décidément ne rentre pas dans les clous, il semble qu’il y ait parfois une dénaturation de l’odorat, parfois des odeurs chimiques réapparaissent, d’égout (cacosmie) ou une parosmie, ce qui veut dire qu’elle ne correspond pas à l’objet, reprend Jean-Michel Klein. Cela peut être extrêmement mal vécu. » Pour le moment, il n’existe que des hypothèses pour éclairer ce mystère. « Lorsque l’inflammation est sévère, les cellules à proximité sont elles aussi endommagées, voire détruites, victimes de dommages collatéraux, avance l’article de The Conversation. Le temps que les neurones olfactifs se régénèrent, elles peuvent dysfonctionner ».

Quels traitements ?

Existe-t-il des remèdes contre cette perte d’odorat ? Cela dépend de l’atteinte. Si la plupart du temps, les parfums et arômes reviennent aussi soudainement qu’ils avaient disparu, il arrive que « l’atteinte soit tellement sévère qu’elle détruit les terminaisons nerveuses, et que l’odorat ne revienne pas », prévient l’ORL.

Difficile pour ces soignants d’évaluer cette perte, très subjective. « On se base sur l’olfactométrie pour mesurer objectivement et dire s’il existe un espoir de régénération. Dans ce cas, on va conseiller le lavage de nez, des vitamines du groupe B qui aident à régénérer les cellules, et on fait un suivi. Mais on n’a pas de vrai remède. D’autant qu’en général, on prescrit de la cortisone car c’est un anti-inflammatoire, mais ce traitement est contre-indiqué en phase aiguë du Covid. »

 

 

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