Bientôt les Vacances : Voyager comme tout le monde malgré son handicap…!

Alors que les Journées nationales Tourisme & Handicaps se déroulent tout le mois, «Le Figaro» a enquêté sur cette clientèle qui franchit les obstacles pour ne pas se priver du plaisir de la découverte.

Voyager comme tout le monde malgré son handicap

Le guide Handitourisme du Petit Futé est une mine d’infos et de conseils, par région et par pays. 15,95 €, version numérique à 6,99.

www.handicap-info.fr

Handicap – Info référencé sur le guide Handitourisme 2019

 

Audrey n’oubliera jamais son vol entre Hongkong et Paris. Après un voyage en solo de trois mois en Asie, cette jeune handivoyageuse pensait rentrer en France en toute sérénité. Sauf qu’à son arrivée à l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, elle ne reconnaît plus son fauteuil électrique. «Les cale-pieds étaient complètement en vrac, la roue arrière droite fracassée, les rayons entièrement fêlés et fissurés», déplore-t-elle sur son blog (1). Ce genre de mésaventure est la principale crainte des voyageurs appareillés.

«L’aérien est le premier frein au voyage chez les personnes à mobilité réduite», reconnaît Marie-Odile Vincent, tétraplégique et consultante handicap chez Comptoir des voyages. Même en respectant les règles et précautions édictées par les compagnies (réservation d’une assistance 48 heures avant le départ, indication du type et des dimensions du fauteuil), le risque zéro n’existe pas. «Pour éviter les mauvaises surprises, mieux vaut éviter les compagnies low-costs et prendre des vols sans escale, quitte à payer plus cher», conseille Marie-Odile Vincent.

Les journées du tourisme et du handicap, dont la 13e édition se tient partout en France tout le mois d’avril, donnent l’occasion aux professionnels de trouver des solutions pour cette clientèle négligée. Une population difficile à chiffrer – le handicap étant considéré comme un facteur de recensement discriminant -, mais qui ne veut pas se priver du plaisir de voyager. «Dès les années 1990, les personnes atteintes d’un handicap ont commencé, via des associations, à revendiquer leur droit d’utiliser leur pouvoir d’achat pour avoir des loisirs et partir en vacances comme tout le monde», détaille Annette Masson, présidente de l’association Tourisme & Handicaps, organisatrice de ces journées.

Si l’offre de voyage est encore loin d’être parfaitement adaptée, les handivoyageurs comptent sur leurs petites astuces. «Quand elles existent, les informations sur l’accessibilité des hébergements manquent de précision. Lire “chambre accessible” sur Booking ne signifie rien. Alors, avant de réserver, je contacte plusieurs hôtels pour connaître leurs aménagements, comme la largeur des portes, la taille de la salle de bains ou la présence ou non d’une marche. Et, surtout, je leur demande des photos», abonde Blandine (2), une Belge de 27 ans qui a récemment conclu un tour du monde d’un an en solo. Il s’agit aussi de se renseigner sur les lieux et activités adaptés. «Il n’y a pas de place pour l’improvisation, je dois planifier mes visites à l’avance. Je ne peux pas prendre le risque de me déplacer pour, au final, me retrouver devant un musée ou un monument qui ne peut pas m’accueillir», ajoute Charlotte (3). Autre solution: solliciter des agences spécialisées.

Comptoir des voyages propose des séjours sur mesure dans une trentaine de destinations. «Pour qualifier ses besoins, le client fournit des informations très précises: les dimensions et le poids exacts du fauteuil, son degré d’autonomie, sa capacité à faire sa toilette seul ou non», précise Marie-Odile Vincent. L’agence recommande ensuite les logements les plus appropriés, tous testés et approuvés. Hauteur du lit, largeur de la porte, taille des sanitaires, équipements lors des excursions…

Aucun détail n’échappe à son œil expert. «Un hôtel parfaitement aux normes peut ne pas être proposé si les infrastructures aux alentours, comme l’accès à la plage, ne sont pas adaptées», prévient-elle. Quant à savoir si ces voyages coûtent plus cher, elle rétorque: «La vie quotidienne d’une personne en fauteuil coûte déjà plus cher en soi, il est logique que le séjour le soit aussi.»

En 2009, Yoola a investi un marché quasiment inexistant en France. L’agence s’est d’abord fait connaître en proposant des circuits 100 % accessibles lors de grands événements sportifs. Puis elle s’est élargie au tourisme plus traditionnel. Pourquoi s’en priver? Selon son fondateur, Malik Badsi, «les personnes à mobilité réduite sont mal informées sur l’offre disponible. Résultat, elles se privent de partir malgré leur capacité physique et financière à voyager». Comptoir des voyages, Yoola, ces deux spécialistes proposent entre autres loisirs sportifs du parapente, des safaris, des balades en quad ou à dos de dromadaire, et prévoient une assistance médicale sur place, en option.

En France, les handivoyageurs peuvent se référer au label «Tourisme & Handicaps», attribué par l’association éponyme. Cette marque d’État, créée en 2005 par le ministère de l’Économie, est décernée aux hébergements, restaurants et lieux de loisirs qui répondent aux besoins d’au moins deux handicaps parmi les quatre reconnus (moteur, auditif, visuel et intellectuel). Aujourd’hui, près de 5300 sites ou organismes bénéficient de ce label attribué sur demande pour une période de cinq ans renouvelable. Un chiffre qui paraît assez faible au regard du très grand nombre d’établissements recevant du public, touristique ou non. La loi accessibilité de 2005 leur donnait dix ans pour être se mettre aux normes. Mais entre les impossibilités techniques, les contraintes liées à la conservation du patrimoine et le coût des travaux, il semble difficile de faire respecter strictement la loi. Aujourd’hui, moins de 40 % de ces établissements sont accessibles.

Le métro de Paris bénéficie d’une dérogation, les travaux étant contraints par l’ancienneté du réseau. Seule une dizaine de stations sur 300 peuvent accueillir des personnes en fauteuil. Mais ne pas pouvoir traverser la capitale en transports en commun n’empêche pas d’aller à l’autre bout du monde.

La plupart des handivoyageurs s’accommodent très bien du manque d’infrastructures. «Les pays les moins accessibles matériellement sont souvent les plus accessibles humainement, note Blandine. Lorsque j’avais besoin d’aide en Asie, des dizaines de personnes se pliaient en quatre pour moi.»«En voyage, j’aime perdre mon autonomie. Cela m’oblige à innover, à imaginer et à me dépasser», avoue de son côté Marie-Odile Vincent. Quant à Jean-Pierre Brouillaud, voyageur non voyant, il se dit «peu tracassé par ces questions d’accessibilité». Auteur du blog «L’Illusion du handicap» (4) et de l’autobiographie Aller voir ailleurs(Points Aventure), il affirme: «Si tout était traduit en braille, je me sentirais trop dépendant. Je perdrais la force que je tire de ma vulnérabilité. Et surtout, je serais privé de l’essentiel du voyage: les belles rencontres.»

Carnet de route

TRAIN
Pour les trajets nationaux, internationaux et TER sous conditions: service Accès Plus de la SNCF, au plus tard 48 heures avant le départ. Gratuit. Assistance en gare et réduction sur le billet de l’accompagnateur. Tél.: 0890 640 650 et accessibilite.sncf.com

AVION
Service Saphir d’Air France à réserver dès l’achat des billets jusqu’à 48 heures avant le départ. Pour faciliter les déplacements du terminal au siège de l’avion et le transport de fauteuils en soute. En France et 19 autres pays. Tél.: 09 69 36 72 77 et www.airfrance.fr

CIRCUITS
Avec Comptoir des voyages: 5 jours / 4 nuits à Séville dès 530 € ; 4 jours / 3 nuits à Stockholm ou Oslo dès 600 € ; 11 jours / 8 nuits de safari au Kenya dès 2 700 €. Tél.: 01 53 10 30 15. www.comptoir.fr
Avec Yoola, 3 jours / 2 nuits dès 590 € dans la plupart des villes européennes (Rome, Barcelone, Londres, Berlin…) ; 7 jours dans les Antilles dès 1 790 € ; 7 jours à Bali dès 2 590 € ; circuit de 10 jours en Argentine
dès 3 490 €. Tél.: 01 83 64 70 06 et yoola.fr

Source LE FIGARO.

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