Portes trop lourdes, écrans illisibles… Le nouveau tribunal de Paris est inaccessible aux personnes à mobilité réduite…

Des portes trop lourdes, une absence d’inscriptions en braille, des écrans illisibles, l’accessibilité du nouveau palais de justice de Paris est un parcours du combattant pour les personnes ayant un handicap.

Les installations du palais de justice ne sont souvent pas à la bonne hauteur pour l'avocat Alexis Ridray.

  • Inauguré en avril 2018, le nouveau palais de justice situé porte de Clichy, n’a pas été conçu avec les personnes à mobilité réduite.
  • L’association Droit pluriel et la commission accessibilité de l’Ordre des avocats travaillent sur les points à améliorer.
  • Si des outils sont installés, ils ne sont pas tous opérationnels et leur existence n’est pas toujours connue du personnel du tribunal.

« Les portes tournantes ne peuvent accueillir qu’une personne. Comment je fais pour entrer en étant aveugle ? Personne ne peut venir avec moi », s’interroge Anne-Sarah Kertudo. Dès le sas d’entrée du nouveau palais de justice de Paris, le ton de la visite est donné. Situé porte de Clichy, ce nouvel édifice inauguré en avril 2018 présente de nombreuses lacunes pour les personnes ayant un handicap. L’association Droit pluriel et la commission accessibilité de l’Ordre des avocats faisaient un état des lieux ce jeudi. Et le constat est alarmant. Si l’architecture de ce tribunal imaginé par Renzo Piano impressionne, la qualité des infrastructures inquiète.

Des portes trop lourdes, un marquage au sol uniquement à l’entrée, un système d’audioguidage qui ne fonctionne pas ou encore une absence d’inscription en braille. « Nous pouvions pardonner à l’ancien palais de justice du fait de son ancienneté mais là c’est édifiant, ce palais n’a pas été conçu avec les personnes à mobilité réduite », s’insurge Elisa Rojas, avocate au barreau de Paris en fauteuil roulant. Une visite qui ne débute pas sous les meilleurs auspices. Cette avocate ne peut regarder la table d’orientation pour se renseigner, trop haute et pas suffisamment inclinée pour une personne en fauteuil. Pas vraiment pratique pour rejoindre un lieu précis dans le palais.

« Impossible de se déplacer seul dans le palais »

Et rejoindre une salle d’audience relève d’un véritable parcours. « C’est tout simplement impossible de se déplacer seul. Il n’y a rien pour se repérer, pas d’écrans d’accueil vraiment identifiables pour les personnes en situation de déficience visuelle, du braille encore moins », souffle Anne-Sarah Kertudo, juriste et directrice de l’association Droit pluriel qui souhaite rendre la justice accessible à tous.

Les écrans aux couleurs grises ne sont pas lisibles pour les personnes en situation de déficience visuelle.

Une fois arrivé dans une salle d’audience, se frayer un chemin s’effectue sur les extrémités. « Les places handicapées diffèrent selon les salles, tantôt reléguées au fond ou devant derrière le banc des avocats », explique l’avocat Alexis Ridray. Si les places sont plutôt bien réalisées pour le public, les avocats en fauteuil roulant n’ont pas cette chance. « Lorsque je plaide, le pupitre est souvent bien trop grand et je ne peux pas me placer sur le banc aux côtés de mes confrères, l’espace étant trop serré », poursuit le jeune avocat.

Les membres de la commission accessibilité de l'Ordre des Avocats et de l'association Droit Pluriel.

« Nous demandons de l’autonomie puis de l’aide »

La commission accessibilité de l’Ordre des avocats travaille déjà sur les points à améliorer. « Le handicap constitue un frein majeur à l’accès au droit », soupire l’avocat et membre de la commission Benjamin Pitcho. Avant de se faire couper par Elisa Rojas. « Nous demandons de l’autonomie puis de l’aide. Les outils doivent être opérationnels, il ne s’agit pas simplement d’investir. Et surtout former les gens car nous sommes tributaires de la bienveillance quand on ne les agace pas avec nos demandes d’aides. »

La visite se termine. Et là encore un détail intrigue. « L’ascenseur ne possède pas de signaux sonores, c’est franchement désagréable », s’exclame Anne-Sarah Kertudo. Avant de renchérir, « nous allons partir mais il y a encore tellement de choses à évoquer comme la visio interprétation, la langue des signes. Elle est inexistante. » Preuve que le combat est loin d’être terminé.

Source 20 MINUTES.

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