Mon enfant est handicapé…

Avoir un enfant handicapé n’est pas qu’une source d’isolement et de problèmes pratiques quotidiens, mais peut aussi amener les parents et la fratrie à se rapprocher des questions essentielles.

Mon enfant est handicapé. Photo illustration

Comment accueillir le plus faible ? Comment supporter les complications, les inquiétudes, les lourdeurs à gérer au quotidien ? Quand le handicap est éloigné de sa vie, la tentation est grande de l’ignorer. Mais quand il concerne son enfant, la fuite est impossible.

Il faut alors aimer en actes, jour après jour. C’est épuisant. Et cela prend du temps… Pourtant, cette expérience peut devenir une aventure très forte, parce qu’elle questionne et rapproche des questions essentielles.

Avoir un enfant handicapé peut être désocialisant

« Pour accepter leur enfant, raconte Jean-Baptiste Hibon, psychosociologue et handicapé, tous les parents doivent faire le deuil de l’enfant parfait. C’est plus vrai encore pour l’enfant handicapé. » Plus difficile aussi car le couple est fragilisé. Les parents peuvent avoir envie de se séparer, l’homme et la femme ne réagissant pas de la même manière.

Anne Debargue, psychologue clinicienne qui anime des groupes de parole de parents d’enfants handicapés, explique : « Pour le père, avoir un enfant handicapé a un effet désocialisant terrible : il se sent diminué, disqualifié ; la mère, elle, a souvent besoin de surprotéger son enfant. Elle s’enferme dans cette relation et a ensuite du mal à demander de l’aide. »

Il est important de s’avouer à soi-même ses faiblesses

Un enfant handicapé, c’est aussi une épreuve pour l’entourage. « Or, la personne handicapée agit comme un aimant. Face à elle, on est soit attiré, soit repoussé. Cela peut mettre à distance des personnes dans la famille élargie », dit Jean-Baptiste Hibon.

Certains choisiront la fuite, d’autres deviendront des appuis solides. Dans tous les cas, il est important de s’avouer à soi-même ses faiblesses. Accepter le handicap, c’est d’abord apprendre à reconnaître ses sentiments.

Sophie, maman de Philippine, 11 ans, polyhandicapée, confie : « Une psychothérapie m’a aidée à exprimer ma colère. Une phrase m’a apporté un grand soulagement. Une psy m’a dit, avant une opération de notre fille : “Tu n’as pas peur que Philippine meure, tu as peur de ce que tu penses de la mort de Philippine”. »

Etre tendre et aimant

Accepter, c’est aussi dire la vérité à l’enfant. « Dès mon plus jeune âge, mes parents m’ont fait comprendre que je ne pourrais pas faire tout ce que font les autres », témoigne Claire, 49 ans, porteuse d’un spina-bifida. Car le handicap, s’il est lourd à porter pour les parents, l’est plus encore par l’enfant lui-même.

« Les parents, dit Anne Debargue, doivent passer du sentiment de culpabilité à celui de légitimité : dans le fait d’avoir un enfant handicapé aussi, ils sont légitimes. » Ainsi, ils auront l’attitude ferme, tendre et aimante qui convient.

Ne pas surprotéger son enfant

Claire confirme : « Ce n’est pas parce que j’ai un handicap que je n’étais pas grondée. Certains amis trouvaient mes parents sévères ; aujourd’hui, ils pensent avec moi que cette éducation était la bonne. Si un enfant handicapé est surprotégé, c’est une souffrance pour les parents, et pour les frères et sœurs, c’est très lourd. »

Et même si Clément, 15 ans, peut réclamer plus d’attention, Isabelle dit comment la présence de Paul, trisomique, 18 ans, a appris la générosité à ses enfants : « Notre aînée expliquait lors de ses entretiens d’embauche combien la relation avec son frère l’avait construite, et deux de nos enfants, médecin et infirmière, ont trouvé avec Paul leur vocation. »

Penser que les autres enfants de la fratrie vivent une expérience qui les enrichit, et le leur dire, les autorise aussi à être heureux.

Comprendre le handicap pour ne pas en avoir peur

L’enfant handicapé a besoin d’aide, mais lui aussi peut aider son entourage. Solange Bollin, auxiliaire de vie scolaire, raconte : « Pour Hugo, en CE1, hémiplégique, ouvrir sa trousse, tenir un stylo, c’est difficile. Je l’aide, mais il doit apprendre à faire ces gestes seul pour progresser. » Hugo est bien intégré dans sa classe car les enfants le connaissent : l’échange est enrichissant pour tous.

Mais on a peur de ce que l’on ne connaît pas, et parfois, le handicap dérange. Sophie rapporte les propos d’un ami de la famille : « Quand on voit Philippine pour la première fois, cela fait peur. »

D’où l’importance, selon elle, d’être “éduqué” au handicap : « Philippine a été la première personne handicapée que je rencontrais. J’aurais aimé faire cette expérience plus tôt. D’abord, parce que j’ai tout découvert avec elle. Et puis, parce que j’ai l’impression qu’avant, il me manquait une dimension. »

Le handicap renvoie à l’essentiel

L’être humain se développe à 90 % par mimétisme, un comportement impossible face à un handicapé. « Il existe un tel décalage entre ce que l’on perçoit de moi et ce que je suis, dit Jean-Baptiste Hibon. Le regard des autres sur soi, on ne s’y fait jamais. En devenant psychologue, j’ai voulu mettre des mots sur ce que je vivais. »

Refuser la fragilité de la personne handicapée, ne pas reconnaître sa différence, revient souvent à nier ses propres faiblesses. Le handicap renvoie à l’essentiel, et permet de relativiser. Il agit comme un révélateur de sa relation à l’autre et peut amener à se dépasser.

Quelles sont les aides possibles ?

Chaque département possède une maison départementale des personnes handicapées (MDPH), interlocuteur unique pour se renseigner sur :

  • les aides financières : l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et ses compléments varient selon le degré de handicap d’un enfant de moins de 20 ans, les dépenses liées au handicap, et la cessation d’activité d’un des parents. Toutes les informations sur le site service-public.fr.
  • l’école : la demande d’une auxiliaire de vie scolaire (AVS) fait l’objet d’un projet personnalisé de scolarisation (PPS) par l’équipe éducative ; le dossier est transmis à la MDPH.
    Plusieurs structures assurent la scolarisation des enfants handicapés :
    – 250 centres d’action médico-sociale précoce (CAMSP) reçoivent les enfants de 0 à 6 ans, puis les classes d’intégration scolaire (CLIS) aident à poursuivre la scolarité en milieu ordinaire ;
    – les Instituts d’éducation motrice (IEM) assurent la scolarisation des enfants ayant une déficience motrice ;
    – les Instituts médico-éducatifs (IME) proposent une prise en charge éducative, thérapeutique et pédagogique. Adresses répertoriées dans l’annuaire d’Action-sociale.
  • les vacances : l’Association des paralysés de France propose des colonies et séjours adaptés sur son site et sur le blog APF Evasion.

Source Santé MAGAZINE.

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