« Je sens mes jambes, mes genoux, mes chevilles » : Sebastian, paraplégique, commence à remarcher grâce à l’électrostimulation…

Sebastian Tobler fait partie des trois paraplégiques qui ont réussi à remarcher grâce à des électrostimulations.

Sebastian Tobler a réussi à remarcher grâce à l'électrostimulation.

À l’automne 2018, une équipe de chercheurs de Lausanne, en Suisse, annonçait avoir réussi à faire remarcher trois paraplégiques, grâce à des électrostimulations.  Quelques mois après, franceinfo a rencontré l’un de ces trois hommes. Il s’appelle Sebastian Tobler, il est Suisse, et paraplégique depuis six ans. Cet homme modeste espère avant tout faire avancer la recherche.

Dans sa vie de tous les jours, Sebastian Tobler est en fauteuil roulant. C’est d’ailleurs en fauteuil qu’il arrive à l’hôpital de Lausanne ce matin-là, pour son entraînement. Son programme du jour : marcher sur un tapis roulant. Il est vêtu d’un short, d’un T-shirt, il a des chaussures de sport aux pieds, et au niveau des épaules, un harnais qui va lui permettre de le soulager en supportant une partie du poids de son corps,

La machine se lance, Sebastian Tobler se lève de son fauteuil, déploie son corps de colosse. Cet ancien très grand sportif paralysé après un accident de VTT a le haut du corps musclé, les jambes frêles… mais des jambes désormais qui marchent. « Au début ça paraît assez saccadé, pas contrôlé, explique-t-il. Puis là, ça s’améliore. Je sens mes jambes, mes genoux, mes chevilles, et puis la stimulation. »

La stimulation, ce sont des électrodes implantées dans le bas du dos. Aujourd’hui les nerfs de sa colonne vertébrale sont endommagés et ne relient plus le cerveau aux jambes. C’est donc, dans la salle d’entraînement, un ordinateur qui stimule à distance les électrodes, ses nerfs, et par conséquent les muscles des jambes, un à un. Un qui permet de lever le pied, puis un autre pour l’extension, puis l’autre jambe. Mais ce n’est pas l’ordinateur seul qui commande les jambes. C’est un équilibre avec la volonté de Sebastian, qui parvient à contrôler une partie du mouvement. « En marchant, je peux essayer de contrôler la position du pied, le déclenchement de la flexion, de l’extension. » 

« Tout à coup j’ai commencé à lâcher une main »

Ce jour-là, Sebastian bat son record : une heure et quart de marche, soit environ 1 600 mètres. Et lorsque la stimulation s’arrête, il parvient à faire ensuite quelques pas. C’est là que réside l’espoir des scientifiques. L’espoir, comme pour les expériences menées sur les rats, que les nerfs soient réactivés, et à terme refonctionnent par eux-mêmes.

Sebastian se souvient de la première fois où il a pu remarcher. « Cela a été quand j’ai marché avec ma kiné, se rappelle-t-il. Tout à coup j’ai commencé à lâcher une main après l’autre. De voir que je pouvais faire quelques pas seul, en étant stimulé bien sûr, mais sans aide extérieure, c’était assez fort. Vous réalisez que vous êtes en train de faire quelque chose que vous n’arriviez pas à faire il y a quelques temps. »

Un combat pour faire avancer la recherche

Sebastian espère un jour remarcher, nager à nouveau, refaire du ski de randonnée. Mais en l’état actuel de la recherche, il n’y a quasiment aucune chance que sans ces stimulations électriques, il puisse remarcher seul, de façon autonome. Il constate quand même des progrès.

« Dans la vie de tous les jours, je fais des exercices à la maison, je peux me lever, en m’agrippant avec les mains, ce que je ne pouvais pas faire avant ». Sebastian Tobler à franceinfo

Ce sont des petits progrès dans le quotidien, mais Sebastian a peu de chances de progresser davantage. Avant tout, il fait ces entraînements, ces expériences dans l’esprit d’un pionnier pour la science, pour la recherche. « La science m’intéresse. C’est plus qu’un objectif personnel, conclut-t-il. Souvent les gens me demandent si j’ai retrouvé le goût de vivre. Cela a plutôt donné un sens à ma vie. J’ai 49 ans, il me reste trente ans à vivre. Je peux être utile, amener quelque chose, utiliser tout ce qui me reste pour essayer de faire avancer quelque chose. Cela a de la valeur. » Trente ans encore à vivre, cela paraît court tant ce professeur dans une école d’ingénieurs fourmille de projets de recherche, et d’amélioration du quotidien des paraplégiques.

Source FRANCE INFO.

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