« Une définition standardisée du handicap commence à s’imposer : l’indicateur de restriction globale d’activité »….

Pour mieux connaître les conditions de vie des personnes handicapées dans les enquêtes statistiques, la Drees a tranché en faveur d’un question unique, utilisée à l’échelle européenne. Patrick Aubert, sous-directeur de l’observation de la solidarité, salue cette uniformisation.

Une définition standardisée du handicap commence à s’imposer : l’indicateur de restriction globale d’activité

 

D’une source à une autre, on s’y perd. Les personnes handicapées en France seraient 4,8 millions, 9,6 millions, ou même 12 millions… Comment se fait-il que l’on peine à trouver un chiffre clair et définitif ? Tout simplement parce que toutes les études n’utilisent pas les mêmes critères. Dans un dossier paru jeudi, la Drees (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) tranche : après treize années d’utilisation à l’échelle européenne, un critère fait enfin consensus.

L’indicateur Gali (Global Activity Limitation Indicator, ou indicateur de restriction globale d’activité) permet, en une seule question, de savoir de façon considérée comme fiable si une personne est atteinte d’un handicap ou non. En France métropolitaine, 4,9 millions de personnes âgées de 16 ans ou plus et vivant dans un logement ordinaire (c’est-à-dire hors institution) sont ainsi concernées. Soit 9% de la population.

Grâce à sa formulation condensée, la «question Gali» peut être posée dans un grand nombre d’enquêtes non spécifiquement dédiées au handicap. Et permet ainsi d’avoir une vision plus complète des conditions de vie des personnes handicapées. Patrick Aubert, sous-directeur au sein de la section dédiée aux solidarités de la Drees, revient sur les enjeux de l’utilisation de cet indicateur.

Quelles difficultés y a-t-il à comptabiliser les personnes handicapées dans les enquêtes statistiques ?

Le handicap est une notion complexe. Il peut être approché de différentes manières, qui ont toutes leur pertinence. On peut par exemple comptabiliser les personnes qui se disent fortement limitées dans les activités de la vie quotidienne, celles qui ont une reconnaissance administrative du handicap ou celles qui ont de fortes limitations dans les fonctions du corps (pour entendre, voir, monter les escaliers…). Mais chaque critère ne reflète qu’une partie de la vision.

Certaines personnes refusent de s’identifier comme handicapées même si, de manière objective, elles ont des limitations. Parce que ça peut être péjoratif d’être vues comme telles. D’autres, au contraire, vont rechercher la reconnaissance parce que ça permet d’avoir une aide, par exemple. On constate aussi que très peu de personnes âgées se déclarent handicapées alors qu’elles le sont, parce que la perte d’autonomie est souvent vue dans le champ de la dépendance. De la même façon, s’attacher à la reconnaissance administrative du handicap offre une vision partielle, parce que des personnes handicapées ne recourent à aucune aide.

Les enquêtes spécifiquement consacrées au handicap peuvent prendre le temps de se consacrer à chaque définition, mais d’autres ne peuvent pas se permettre de mettre cinquante questions. Donc une définition standardisée commence à s’imposer : l’indicateur Gali.

En quoi cet indicateur est-il plus pertinent que les autres ?

Il consiste à demander si vous êtes limité depuis au moins six mois à cause d’un problème de santé, dans les activités que les gens font habituellement. Ça fait à la fois référence aux problèmes de santé, au caractère durable (par opposition à une maladie passagère), aux limitations et ça se place dans un environnement. Ce n’est pas dans l’absolu qu’on est handicapé, mais par rapport aux activités de la vie quotidienne. La définition légale du handicap est beaucoup plus longue et complexe, mais on ne peut pas entrer dans le même niveau de détail. Il faut aussi que la question soit compréhensible par les personnes interrogées, qui ne sont pas forcément spécialistes.

Les travaux autour de l’indicateur Gali ont commencé à la fin des années 90, début des années 2000, au niveau européen. On cherchait une formulation, assez courte, qui permettait de résumer les personnes handicapées. C’est intéressant parce que tout est condensé dans une même question. Eurostat [l’organisme européen dédié à l’information statistique à l’échelle communautaire, ndlr] pousse beaucoup à développer l’utilisation de cet indicateur.

Le manque de données statistiques concernant les personnes handicapées est souvent critiqué. A quoi cela sert-il d’en avoir ?

C’est vrai que c’est une critique qui revient régulièrement. En grande partie, c’est une critique qui se trompe : souvent, ce ne sont pas de données qu’on manque, mais d’études faites sur les données. Le fait d’avoir l’indicateur Gali dans un nombre plus grand d’enquêtes permet d’avoir des résultats plus fréquents.

Il y a des services statistiques dans à peu près tous les ministères, donc si tout le monde prend la peine d’insérer cette question, on sera en mesure de distinguer les personnes handicapées et les personnes non handicapées. Ça va nous permettre de voir comment évoluent les conditions de vie, année après année, des personnes handicapées et de voir si elles s’améliorent sous l’effet des réformes.

Source LIBERATION.

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