VIDEO. « Un animal, on en prend plus soin » : l’enquête d' »Envoyé spécial » sur la maltraitance dans certains Ehpad privés…

Nos parents et grands-parents seraient-ils maltraités et mal soignés dans certains Ehpad de grands groupes privés, ces maisons de retraite médicalisées, souvent cotées en Bourse ?

« Envoyé spécial » a enquêté et recueilli des témoignages édifiants de soignants et de familles. Le reportage du 20 septembre 2018 s’ouvre avec le témoignage de Dominique.

VIDEO. "Un animal, on en prend plus soin" : l’enquête d'"Envoyé spécial" sur la maltraitance dans certains Ehpad privés

Patients dénutris, malades errant dans les couloirs sans surveillance, rationnement  (de nourriture, mais aussi de couches ou de matériel de soin)… nous avons tous en tête des images et des témoignages révoltants recueillis dans certains établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Débordé et en colère, le personnel s’était massivement mis en grève en janvier 2018. Derrière les murs de ces maisons de retraite privées, nos parents et grands-parents sont-ils un peu mieux traités ?

« Moi, j’appelle ça de la maltraitance »

« Quand on laisse une personne dans des draps souillés, quand on laisse des couches souillées dans la salle de bain, quand on laisse une nappe où maman a rendu son repas roulée en boule sous la table où elle mangeait… moi, j’appelle ça de la maltraitance, parce que la dignité de la personne est atteinte. » C’est pour rendre sa dignité à sa mère que Dominique témoigne dans ce reportage diffusé par « Envoyé spécial » le 20 septembre 2018. En souvenir de Marguerite, qui y a passé ses derniers mois avant son décès, à 92 ans. De l’extérieur, l’établissement « présentait bien », mais au quotidien, selon Dominique, la réalité s’est révélée tout autre.

Images glaçantes filmées au téléphone portable

Pourtant, beaucoup de ces maisons de retraite privées (elles seraient près de 2 000 en France) affichent des profits records. Elles appartiennent à de grands groupes : DomusVi, les Opalines, Korian, Orpéa… Les deux derniers, des géants du secteur, ont refusé les demandes de tournage d' »Envoyé spécial ». Alors le magazine a enquêté, aidé par des employés mais aussi des familles de patients. Certaines situations sont inquiétantes : les cris d’une malade gisant à terre sans que personne ne lui vienne en aide, des conditions de travail très difficiles, des familles qui affirment ne pas avoir été prévenues du décès de leur proche… Des manquements dénoncés par des familles qui paient souvent plus de 3 000 euros par mois de frais d’hébergement.

« Irrespect », manque « d’écoute »

C’était le cas de Marguerite, la mère de Dominique. « Trois mille euros, mais qu’est-ce qui justifie ça ? s’indigne sa fille dans cet extrait. Il y a deux aides-soignantes par étage. Quand on les appelle, elles mettent une heure à venir. Le médecin ? fantôme… Quand on voit ces sommes-là et le quotidien, on se dit qu’il y a un bug, un grand vide sidéral… » Un grand vide, un « irrespect » qui se ressentirait aussi au niveau de « l’écoute » et de la « sensibilité », déplore-t-elle. Les conditions dans lesquelles, selon elle, sa mère est décédée ont achevé de la révolter. Un week-end de Premier mai, seule à l’hôpital. Sans que sa fille soit prévenue. « Maman est restée deux jours, entrant en agonie certainement, confie-t-elle, et personne n’a été attentif à ça. Personne ne l’a accompagnée. Personne ne m’a prévenue. On ne la laisse pas comme ça sur un lit d’hôpital, comme un animal ! Un animal, on en prend plus soin… »

« Une sous-médicalisation catastrophique »

Quant aux soins, ils semblent parfois dévolus… aux urgentistes. Certains affirment devoir intervenir de plus en plus dans les Ehpad (+ 63% en cinq ans en Seine-Saint-Denis, par exemple) et y faire des découvertes effarantes : personnes âgées déshydratées, fièvres mal soignées (comme ce choc septique suite à une infection urinaire non traitée), dossiers médicaux de trois lignes… « Aujourd’hui, on a des personnes qui décèdent par défaut de soin ou par retard à la prise en charge », dénonce Christophe Prudhomme, médecin urgentiste. Et pour faire des économies, selon lui, les Ehpad « utilisent le service public de manière substitutive pour ne pas payer d’infirmiers et de médecins »… Sa vision des Ehpad privés ? « [Leur] particularité, c’est une absence de stabilité du personnel, une sous-médicalisation catastrophique, dans un environnement parfois clinquant. »

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Extrait de « Maisons de retraite : derrière la façade ». Retrouvez en intégtalité l’enquête diffusée dans « Envoyé spécial » le 20 septembre 2018.

Source FRANCE INFO.

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