Un an après ses 152 victoires aux 12 coups de midi, la star du jeu télé raconte son autisme…

Souvenez-vous. Entre avril et octobre 2019, Paul El Kharrat enchaînait les victoires lors de l’émission de TF1 Les 12 coups de midi.

Un an plus tard, le jeune homme publie un livre où il se dévoile et aborde avec pédagogie son handicap, l’autisme.

Paul El Kharrat le reconnaît dans son autobiographie, intitulée Ma 153e victoire (Éditions Harper Collins) : « Il faut sans doute être un peu fou pour s’afficher dans une émission regardée par des millions de personnes quand on a tant de mal à aller vers les autres… »

C’est pourtant le défi que s’est lancé cet étudiant en 2019. Le 29 avril, les téléspectateurs découvrent ce jeune homme de presque 20 ans dans l’émission Les 12 coups de midi. Ils ne le savent pas encore, mais celui qui sera surnommé « Wiki Paul » de par ses connaissances encyclopédiques restera dans le jeu de TF1 pas moins de 153 jours.

Avec 152 victoires et plus de 691 000 € de gains à son palmarès, il reste à ce jour l’un des plus grands champions de l’histoire du divertissement à l’antenne depuis 2010.

« Le plus difficile était de m’acclimater aux conditions de l’émission »

Un candidat populaire, apprécié pour son franc-parler et sa gentillesse. Mais sa première émission reste un souvenir compliqué. « Le plus difficile était de m’acclimater aux conditions de l’émission, aux lumières, à toutes les sollicitations », se remémore-t-il pour l’édition du soir. Paul ne cache pas être peu à l’aise face aux caméras, lui qui a toujours eu des difficultés avec les relations sociales.

Alors, dès son premier jour de tournage, le ton est clair : « Je suis, je suis je suis… Paul, je suis plutôt quoi alors ? », lui demande l’animateur Jean-Luc Reichmann lors des premières minutes de l’enregistrement. « Je suis plutôt… Je suis plutôt Asperger moi ! », répond du tac au tac le candidat.

Syndrome d’Asperger. Voilà quelques minutes que l’émission du jour a commencé et le mot est lancé. « Je voulais le dire dès le début. Comme ça, on plante le décor et on évite tout ce qui pourrait être interprété comme une bizarrerie », nous explique, depuis Paris, Paul El Kharrat, plus d’un an plus tard.

La sensibilisation, sa 153e victoire

Car si ce passionné d’histoire voulait participer au jeu de TF1, allant jusqu’à passer deux fois le casting de l’émission, c’est autant par esprit de compétition que par volonté de mieux faire connaître son handicap.

« C’est une part intrinsèque de moi-même. Je voulais faire de la sensibilisation à ce syndrome autistique. Je voulais dire que malgré ce handicap, on peut aller au-devant de ses peurs, aller à la télévision et relever des défis », développe-t-il.

C’est sa « 153e victoire », d’où le titre de son autobiographie, sortie en librairie le 2 septembre. Tout au long des près de 200 pages, le jeune homme utilise sa mémoire visuelle et auditive impressionnante pour coucher sur le papier, à l’aide d’un prête-plume, ses nombreux souvenirs.

Il aborde son enfance passée entre la Martinique, la Réunion, l’Eure-et-Loir et l’Isère, raconte les coulisses de sa participation aux 12 coups de midi. Sans occulter les tensions avec ses proches, sa difficulté à être indépendant, ou même ses coups de sang.

Comme cette fois où Jean-Luc Reichmann tue une mouche sur le plateau sous les rires du public. Un acte qui mettra en rage ce défenseur des animaux, à tel point que le candidat envisage alors de quitter l’émission.

À travers les chapitres, Paul écrit de la manière la plus pédagogique possible son quotidien d’autiste Asperger : sa nécessité de planification et d’organisation, sa difficulté à se mettre à la place des autres, les codes sociaux impossibles à maîtriser…

« Si je peux servir d’exemple, tant mieux »

« On m’a proposé d’écrire un livre sur mon parcours. J’ai dit oui pour ne plus que ce syndrome reste méconnu », nous explique simplement ce grand lecteur. Car Paul lui-même a mis du temps à savoir qu’il était atteint d’autisme. Le diagnostic, établit alors qu’il venait tout juste de célébrer ses 16 ans, était alors tombé comme un soulagement pour lui.

Durant son enfance, il avait consulté de nombreux psychiatres, pédiatres ou autres médecins, sans qu’aucun ne pose le bon diagnostic. « Certains me disaient que j’étais un enfant curieux, d’autres disaient que je n’avais rien, d’autres que j’avais une jeunesse fougueuse… Jamais le syndrome d’Asperger n’est apparu », raconte-t-il, regrettant que « beaucoup de professionnels du milieu médical ne connaissent pas l’autisme ». Lui-même confie n’avoir jamais entendu parler de ce syndrome avant de savoir qu’il en était victime.

Il n’a pas non plus le souvenir d’avoir vu de personne autiste à la télévision quand il était enfant. « Alors si je peux servir d’exemple, tant mieux », poursuit celui qui refuse cependant de s’ériger en « porte-parole ».

Une jeune femme se rend compte qu’elle est autiste en le voyant à la télévision

Pourtant, Paul est aujourd’hui devenu un symbole et un modèle pour de nombreuses personnes touchées par le syndrome d’Asperger. Au gré des diffusions télévisées, il continue de recevoir des centaines de messages.

Il se souvient notamment de cette fan du jeu, qui s’est rendu compte qu’elle avait le syndrome d’Asperger en le voyant ou de ces parents qui lui confient avoir compris que leur enfant était autiste grâce à lui.

« Je suis content de voir que beaucoup de familles se retrouvent en moi, même si je ne concerne qu’une seule forme d’autisme et que je n’imaginais pas du tout d’avoir tous ces retours », jure-t-il.

La télé lui manque-t-elle pour autant ? « Non, pas tellement », affirme Paul. Les 12 coups de midi non plus. « J’ai réussi à faire mon deuil », résume-t-il, rappelant avoir traversé une dépression lors de la fin des tournages.

Du petit écran à la faculté d’histoire

Ces cinq mois dans le jeu télévisé, qu’il estime dans son livre être « sans doute les plus heureux de ma vie », lui auront appris à faire abstraction de l’environnement, à se concentrer… « Aujourd’hui, ça me sert beaucoup à créer des relations sociales, ce qui m’a fait cruellement défaut dans ma vie antérieure », dévoile-t-il.

Alors, il ne dit jamais non pour des participations exceptionnelles lors d’un prime. D’ailleurs, celui qui a placé les gains remportés et a revendu nombre de cadeaux gagnés se verrait bien tenter Questions pour un champion, « quand je me serais plus entraîné », ou même Qui veut gagner des millions ou, encore plus inattendu, le jeu d’aventure Fort Boyard.

Mais la télévision n’est pas sa vie. Dans quelques jours, il laissera derrière lui les nombreux passages médiatiques pour la promotion de son livre pour retrouver les bancs de sa faculté d’histoire, pour sa troisième et dernière année de licence à Grenoble. Loin des paillettes, de Paris et de la célébrité.

Source OUEST FRANCE.

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