Stationnement et bugs en série : des personnes handicapées verbalisées injustement dans toute la France…

Depuis le 1er janvier 2018, le contrôle du stationnement est à la charge des mairies qui sont autorisées à déléguer la surveillance à des entreprises privées.

Ce qui donne lieu à des bugs à répétition et des sanctions erronées.
Les personnes handicapées sont particulièrement lésées.
Explications.

Ô regrettées pervenches. Depuis le 1er janvier 2018, la loi « de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles » (Maptam) autorise les municipalités à céder le contrôle du stationnement par le biais d’une délégation de service public. Dans de nombreuses villes, des entreprises privées ont donc pour mission de sanctionner le mauvais stationnement et de distribuer les nouveaux PV : les « forfaits de post-stationnement » (FPS). Le problème, c’est que tout ne se passe pas comme prévu et que les bugs s’enchaînent. De nombreux automobilistes sont verbalisés sans raison alors qu’ils étaient en règle au moment du contrôle. C’est particulièrement le cas des personnes handicapées qui, pourtant, avaient sur leur pare-brise un document justifiant de leur handicap et de leur autorisation à stationner gratuitement.

Défaillance généralisée

Depuis 2014, les personnes disposant d’une carte européenne de stationnement peuvent en effet stationner gratuitement à n’importe quel emplacement autorisé. Et depuis le 1er janvier 2017, un autre document destiné aux personnes handicapées ou à mobilité réduite donne le même droit : la carte mobilité inclusion stationnement (CMI-S). À terme, elle est censée remplacer le premier titre, jugé trop facilement falsifiable. Mais pour le moment, ces deux documents – à condition d’être présentés de façon visible sur le tableau de bord ou le pare-brise – les dispensent de mettre quelques pièces dans l’horodateur et donc, logiquement, de recevoir une amende.

Pourtant de nombreux titulaires de ces cartes ont tout de même été verbalisés. « Nous recevons un nombre impressionnant de signalements de ce type, rapporte Nicolas Mérille, membre du conseil national de l’Association des paralysés de France (APF). Et ça ne concerne pas que Paris, loin de là. » Il n’est toutefois pas en mesure de nous donner un chiffre précis.

Selon lui, ce phénomène s’explique par deux raisons liées au nouveau système de stationnement. D’abord, par le recours aux « voitures à lecture automatique de plaques d’immatriculation » par certains prestataires. Leur rôle : scanner les plaques d’immatriculation d’une zone définie et les comparer au fichier des véhicules qui se sont acquittés du montant du FPS. Les agents ont ensuite à sanctionner les propriétaires des véhicules absents de la liste. C’est sans compter sur un détail majeur. Les titulaires de cartes destinées aux personnes handicapées y sont absents, même en étant en règle. Leur document étant enregistré sous leur nom et non rattaché à la plaque de leur véhicule. « On nous assure qu’un agent vérifie, sur le terrain, le travail de la machine, qu’il scrute les pare-brise et qu’il s’assure que chaque amende est justifiée. Il y a une défaillance quelque part pour que tant de personnes soient pénalisées injustement. », explique-t-il.

Manque de formation

L’autre raison est à trouver dans la formation de ces agents, d’après Nicolas Mérille. « On nous témoigne parfois de scènes cocasses où des agents ne reconnaissent pas la nouvelle carte (CMI) et la considèrent comme fausse. Dans le doute, ils verbalisent donc le titulaire de la carte qui est pourtant bien handicapé. »

Pour les personnes sanctionnées, il faut donc tenter de contester la contravention via le site consacré, à l’origine, au paiement du PV. Avec leur réclamation, ils doivent alors joindre la copie de leur carte justifiant de leur handicap, mais aussi leur carte grise, le certificat d’immatriculation, l’accusé d’enregistrement dans le système d’immatriculation des véhicules… Bref, des démarches fastidieuses alors qu’ils sont censés en être préservés. « Lorsque ces cartes de stationnement ont été mises en circulation, elles devaient faciliter la vie des personnes handicapées. Pourtant, aujourd’hui, on nous la complexifie. » D’autant que, face aux réclamations, certaines communes demandent aux automobilistes en situation de handicap de s’enregistrer dans chaque mairie qu’ils traversent pour ne pas se trouver pénalisés. « C’est une demande insensée, on nous ajoute une contrainte supplémentaire », dénonce Nicolas Mérille.

Face à ces situations ubuesques, l’association a décidé de saisir le ministère de l’Intérieur pour obtenir « les clarifications nécessaires pour que la gratuité des places pour les personnes en situation de handicap continue à être la règle appliquée sans démarches supplémentaires que l’obtention de ladite carte de stationnement ». Un courrier envoyé fin janvier qui reste sans réponse. Depuis, les bugs continuent de se multiplier. Et les personnes handicapées ne peuvent que subir ces dysfonctionnements.

Source MARIANNE.

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