Silicon Valley : acteurs d’Internet, ils alertent sur ses dangers…

D’anciens employés de Facebook ou de Google décident de prendre leurs distances avec Internet et tirent même le signal d’alarme, raconte « The Guardian ».

Facebook.

Alors que la « digital detox » est devenue ces dernières années une véritable tendance dans un monde hyperconnecté, il s’avère que ce besoin de liberté touche également ceux qui sont à l’origine de cette addiction. Un paradoxe que raconte le quotidien britannique The Guardian, qui est allé à la rencontre de ceux qui, malgré leur contribution à l’essor des principaux réseaux sociaux, souhaitent aujourd’hui faire marche arrière et retrouver une certaine sobriété dans leur approche d’Internet.

C’est le cas par exemple de Justin Rosenstein. Cet ancien ingénieur chez Google et Facebook, qui a notamment contribué à la conception du bouton « like » (« j’aime ») du réseau social, porte désormais une vision nettement plus désabusée sur ce qu’il considérait à l’époque, en 2009, comme un succès. Aujourd’hui, il évoque cette fonction comme un fournisseur de « pseudo-plaisir » et regrette que toute l’économie de ce secteur soit centrée sur la publicité, la plupart du temps ciblée et personnalisée grâce, justement, au « like » ou aux fonctions de partage et de commentaire.

Une poignée de personnes d’une poignée de sociétés orientent, par leurs décisions, la façon de penser d’un milliard de personnes aujourd’hui.

« Tout le monde est distrait, tout le temps », explique Rosenstein, appuyant ainsi les résultats d’une étude citée par The Guardian et qui montre que la présence d’un smartphone, même éteint, contribue à perturber la concentration de son propriétaire. S’il travaille toujours à San Francisco, à la tête d’une société qui aide les entreprises à améliorer leur productivité, le jeune homme de 34 ans a quitté Snapchat et Reddit, limite son temps passé sur Facebook et a même demandé à son assistante d’installer un verrou parental sur son téléphone pour l’empêcher d’installer de nouvelles applications.

À 33 ans, Tristan Harris a, lui, décidé d’exprimer publiquement ses critiques envers un « système » pernicieux. « Nos esprits peuvent être piratés. Nos choix ne se font pas de manière aussi libre que ce que nous pensons », explique cet ancien de Google, diplômé de la prestigieuse université californienne de Stanford. « Une poignée de personnes d’une poignée de sociétés oriente, par ses décisions, la façon de penser d’un milliard de personnes aujourd’hui », alerte-t-il, estimant qu’il n’y a, selon lui, « pas de problème plus urgent » que celui-ci à l’heure qu’il est.

Les émotions décodées grâce aux clics

Selon ce « lanceur d’alerte », il en irait donc de la sauvegarde de nos libertés et de nos droits fondamentaux. Si les réseaux sociaux ont modifié de façon marquante le fonctionnement des sociétés industrialisées, à la fois sur le plan économique et politique, les Gafa (Google, Apple, Facebook et Amazon) se servent également des émotions exprimées par leurs utilisateurs à des fins mercantiles. Un rapport interne de Facebook, rendu public cette année, montrait d’ailleurs que le réseau social pouvait identifier les moments où les adolescents se sentaient en manque de confiance ou fragiles psychologiquement grâce aux boutons sur lesquels ils cliquaient.

Le constat d’ensemble de ces témoins privilégiés de l’une des plus importantes révolutions technologiques de notre histoire est donc particulièrement sombre, autant en ce qui concerne les pratiques des géants de l’Internet que sur leurs conséquences sur des milliards d’utilisateurs. James Williams, ancien stratège de Google, résume la situation en évoquant « la forme la plus importante, standardisée et centralisée de contrôle de l’attention dans l’histoire de l’humanité ».

Source LE POINT.

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