Nathalie, 48 ans, a choisi la zoothérapie pour sa fille autiste : « On ne peut que constater les bénéfices au quotidien »…

Cette mère de famille a adopté en 2013 Gringo, un chien d’accompagnement destiné à aider sa fille autiste. Au micro d’Olivier Delacroix, sur Europe 1, elle raconte comment ce compagnon à quatre pattes a changé leur quotidien.

Nathalie, 48 ans, a choisi la zoothérapie pour sa fille autiste : "On ne peut que constater les bénéfices au quotidien"

Nathalie, 48 ans, est la mère de Suzy, une jeune fille de 15 ans, diagnostiquée tardivement autisme « à haut niveau ». Si ce trouble du développement lui permet d’avoir des interactions sociales et une relative indépendance, la moindre perturbation dans les habitudes de la jeune fille peut avoir des conséquences dramatiques. Pour aider Suzy à affronter les incidents du quotidien, la famille a adopté il y a cinq ans un chien d’accompagnement. Au micro d’Olivier Delacroix, sur Europe 1, Nathalie raconte comment Gringo aide chaque jour sa fille à apprivoiser son handicap.

« Suzy fait face à un handicap invisible. […] Quand on voit un enfant autiste dit ‘de haut niveau’, on a l’impression d’un enfant neurotypique, sans difficulté particulière. Sauf qu’elle a des contraintes importantes qui sont cachées, qu’on ne décèle pas au premier coup d’œil et qui peuvent la mettre dans des situations d’angoisse et de panique très importantes, et qui vont l’empêcher de faire un certain nombre de choses, voire la déstabiliser au point de ne plus rien faire.

Par exemple, elle a un trouble de l’automatisation du geste, qui est très discret maintenant, mais qui reste prégnant au niveau visio-spatial, c’est-à-dire que la prise d’information au niveau des yeux est anarchique, et donc se repérer dans l’espace peut être compliqué. Sur un trajet, si les choses changent ça peut la perturber au point qu’elle ne sache plus comment se rendre d’un point à un autre.

Aborder la construction du temps a été extrêmement compliqué, c’est-à-dire qu’elle ne perçoit pas le continuum espace-temps comme nous nous le percevons, au moyen d’une ligne. La notion du temps qui défile peut lui échapper ; elle peut se concentrer très fort sur quelque chose et en oublier le temps qui passe.

Convaincue des bienfaits de la zoothérapie après avoir rencontré une petite fille amputée, Nathalie a décidé de se tourner vers Handi’chien, une association qui forme et fournit gracieusement des chiens d’accompagnement.

Je suis orthophoniste en libéral, et dans ma patientèle la mère d’une jeune fille que je suivais, qui avait […] été amputée d’une jambe, avait fait une demande pour qu’elle soit accompagnée d’un chien d’assistance Handi’chien. Donc, j’ai découvert Handi’chien au travers du vécu de Léa, qui venait au cabinet avec son chien. J’ai trouvé ça vraiment formidable. […] Très rapidement, je me suis posée la question des bienfaits pour accompagner Suzy qui, à l’époque, était relativement jeune, elle devait avoir sept ans. Moi, j’ai beaucoup d’affection pour les animaux, et Suzy en avait aussi. On n’avait pas d’animaux à l’époque et elle en réclamait un très souvent.

Une fois que le dossier est sélectionné, il faut faire un stage de passation. En l’occurrence ça a duré 15 jours, en présence d’un adulte responsable, de l’enfant et de l’animal. C’était à Alençon. On essaye quatre ou cinq chiens qui, potentiellement, pouvaient correspondre à notre demande et, au fur et à mesure des essais, la famille et l’enfant font des jeux et ensuite l’équipe statue sur le fait que ce soit tel chien qui correspondra le mieux. À partir du troisième jour, on évolue 24 heures sur 24 avec le chien. Il rentre avec nous le soir au centre, il est tout le temps avec le bénéficiaire et jusqu’à la fin du stage on va travailler, s’accorder. Il va y avoir des ajustements progressifs entre le chien, l’enfant et le référent pour que ça matche par la suite.

Si Gringo aide Suzy à gérer les petits aléas du quotidien, il a surtout permis à la jeune fille de s’ouvrir davantage au monde extérieur.

Gringo est arrivé en décembre 2013, ça fait un peu plus de cinq ans maintenant qu’il fait partie de la famille. Il est attribué à Suzy, mais nous, autour d’elle, on ne peut que constater les bénéfices de sa présence au quotidien.

«  Elle ose faire des choses qu’elle n’oserait pas faire sans lui « 

Dans le cas de Suzy, on ne guérit pas puisque c’est un handicap. On est vraiment dans la compensation, et Gringo compense les contraintes de Suzy à plusieurs niveaux. Au quotidien, il va être à la fois sa béquille quand elle trébuche, physiquement, il va l’aider à se déplacer. Gringo va être aussi un parachute émotionnel, parce que quand on est autiste [et que l’on tombe], le monde s’écroule, mais aussi et surtout un tremplin et une passerelle avec le monde qui entoure Suzy. C’est-à-dire qu’il a permis de rendre visible ce handicap invisible et d’apporter beaucoup plus de bienveillance dans le regard extérieur, vis-à-vis de Suzy.

La passerelle ne fonctionne pas que dans le sens Suzy-le monde extérieur, mais elle fonctionne aussi dans le sens monde extérieur-Suzy. Les gens viennent à elle parce qu’ils sont intrigués par la présence de Gringo. […] Là est le rôle de Suzy qui va les informer, leur expliquer. Ça la valorise, ça lui permet de suivre une conversation, de s’adapter aux demandes d’un interlocuteur dans la rue, ce qu’elle ne pourrait pas faire en temps normal. Si quelqu’un l’abordait dans la rue sans la présence de Gringo, en lui posant une question, elle serait fragilisée, perdue. Là ce n’est plus du tout le cas et elle ose faire des choses qu’elle n’oserait pas faire sans lui. C’est un vrai tremplin sur lequel elle rebondit toujours plus vite et vers une autonomie plus sûre. »

Source EUROPE 1.

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