Lutter contre l’obésité permet de réduire le nombre de cancers…

5,4 % des cancers en France sont attribuables au surpoids et à l’obésité.

Quels sont les leviers permettant d’agir, pour éviter leur augmentation dans les décennies à venir ? 

Un article publié récemment dans la prestigieuse revue scientifique The Lancet Public Health fait état d’une augmentation alarmante des taux de cancers chez les jeunes adultes américains, sur la période s’étendant de 1995 à 2014.

Cette augmentation touche particulièrement les jeunes de 25 à 29 ans et concerne principalement des cancers dont on sait qu’ils sont liés à l’obésité : cancer du rein, du pancréas, de la vésicule biliaire, de la muqueuse de l’utérus et du côlon-rectum. Les auteurs de ces travaux établissent un lien entre ces observations et l’aggravation de la surcharge pondérale (surpoids et obésité) aux États-Unis au cours des dernières décennies.

La France, où le surpoids et l’obésité sont aussi des problèmes de santé publique, quoique dans des proportions moindres, n’est pas épargnée par cette problématique.

Que sait-on aujourd’hui des liens entre surcharge pondérale et cancers ? Quels sont les leviers permettant d’agir pour éviter une augmentation de ces derniers dans les décennies à venir ?

Surpoids et obésité en augmentation

On considère qu’il existe une surcharge pondérale lorsque l’indice de masse corporelle (ou IMC, qui correspond au poids, en kg, divisé par la taille, en m, au carré) est supérieur ou égal à 25 kg/m2. Lorsque l’IMC est supérieur ou égal à 30 kg/m2, on parle d’obésité.

D’après l’étude nationale américaine de surveillance en santé et nutrition (NHANES), entre 1980 et 2016 la prévalence de la surcharge pondérale a été multipliée par un facteur de 2,5 chez les enfants et adolescents âgés de 2 à 19 ans. Sur la même tranche d’âge, la prévalence de l’obésité a été multipliée par 3,5. Chez les adultes âgés de 20 à 74 ans, la prévalence de la surcharge pondérale a augmenté de 63 %, celle de l’obésité a été multipliée par 2.

Conséquences : en 2016, 18,5 % des enfants et 39,8 % des adultes américains étaient obèses. Au total dans le monde, pour cette même année, ce sont 340 millions d’enfants et d’adolescents âgés de 5 à 19 ans et plus de 1,9 milliard d’adultes qui sont en surpoids ou obèses, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

En France, la surcharge pondérale est stable depuis une dizaine d’années, mais elle reste un problème de santé publique. En 2015, elle concernait 17 % des enfants de 6 à 17 ans et 49 % des adultes de 18 à 74 ans (54 % des hommes et 44 % des femmes). En outre, 4 % des enfants et 17 % des adultes français sont obèses.

L’obésité augmente le risque de nombreux cancers

Depuis plus de 25 ans, le World Cancer Research Fund (WCRF) et l’American Institute for Cancer Research (AICR) évaluent les niveaux de preuve des relations entre les facteurs nutritionnels et le risque de cancers. Le 3e rapport d’expertise collective WCRF/AICR, publié en 2018, fournit un état des connaissances actualisé. Il conclut que la surcharge pondérale augmente le risque de 15 cancers.

En 2015, l’expertise collective réalisée par un groupe de travail coordonné par l’Institut national du cancer, constitué d’experts du réseau NACRe, a également établi un niveau de preuve probable pour les cancers hématologiques (lymphomes, leucémies, myélome multiple). Ces résultats ont été confirmés par une méta-analyse récente.

Par ailleurs, en 2016 un rapport du Centre international de recherche sur le cancer avait conclu que l’absence de surcharge pondérale était associée à la diminution de divers cancers. Aux cancers cités précédemment s’ajoutent le myélome multiple, le cancer de la thyroïde et le méningiome.

Nous avons aussi pu montrer que l’obésité au diagnostic d’un cancer du sein est associée à une augmentation du risque de seconds cancers du sein, de l’endomètre et du côlon-rectum.

On sait qu’actuellement, en France, 40 % des cancers sont liés au mode de vie et à l’environnement. Parmi les quatre principales causes de cancer évitables, après le tabac, trois concernent la nutrition : l’alcool, l’alimentation déséquilibrée et la surcharge pondérale. Ainsi en 2015, 18 600 cancers diagnostiqués en France, représentant 5,3 % de l’ensemble des cancers, étaient attribuables à la surcharge pondérale, dont 4 500 cancers du sein et 3 400 cancers du côlon.

Prévenir et réduire le surpoids et l’obésité, c’est possible

Comme toutes les maladies chroniques, l’obésité a des causes multifactorielles. Certains facteurs de risque ne sont pas modifiables. C’est le cas des prédispositions génétiques impliquées dans la prise de poids ou du statut hormonal.

D’autres déterminants, en revanche, sont modifiables. La plupart d’entre eux sont liés à l’évolution de nos modes de vie et à un déséquilibre entre les apports et les dépenses énergétiques.

D’après le rapport WCRF/AICR 2018, le risque de prise de poids et de surcharge pondérale est augmenté par le temps d’écran, les boissons sucrées, une alimentation dense en énergie (de type fast-food ou occidentale). Il est diminué par l’activité physique (marche, endurance), par une alimentation riche en fibres ou de type méditerranéen, et par le fait d’avoir été allaité. Autant de facteurs sur lesquels il est possible d’agir !

En ce début d’année 2019, nous disposons de nouvelles recommandations pour les adultes sur l’alimentation, l’activité physique et la sédentarité publiées par Santé publique France. Elles visent à orienter les consommateurs vers les meilleurs choix alimentaires et un mode de vie plus actif.

Elles proposent, entre autres, de mettre à profit le Nutri-Score, un nouveau système d’information nutritionnelle qui aide à repérer les produits alimentaires de moins bonne qualité nutritionnelle (Nutri-Scores D et E), dont il convient de limiter la consommation.

Cet outil peut s’avérer utile pour la prévention des cancers. En effet, l’étude de cohorte prospective française NutriNet-Santé a révélé que la consommation élevée d’aliments ayant une qualité nutritionnelle médiocre (correspondant à des NutriScores D et E) est associée à un risque accru de cancer du sein. Par ailleurs, l’étude européenne EPIC a aussi montré qu’une telle consommation était aussi associée à une augmentation du risque de plusieurs autres cancers.

En France, on estime que 40 % des cancers sont « évitables », car résultant de facteurs comportementaux ou environnementaux. Ceux attribuables au surpoids et à l’obésité, qui représentent 5,4 % des cancers survenant dans notre pays (soit plus de 18 000 cas pour l’année 2015), en constituent une proportion conséquente. S’approprier ces recommandations sur l’alimentation, l’activité physique et la sédentarité peut nous aider à réduire non seulement notre risque de surpoids et d’obésité, mais aussi à lutter contre ces cancers et d’autres maladies chroniques.

Source OUEST FRANCE.

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