« J’ai l’impression que mon corps pourrit à l’intérieur »: le calvaire des patients déprogrammés…

La situation commence à être critique dans les hôpitaux de la région. A l’hôpital Nord Franche-Comté de Trévenans, comme partout ailleurs, en raison du Covid, les déprogrammations s’accélèrent, on ne garde que les opérations urgentes.

Mais ce n’est pas sans conséquence pour des centaines de malades.

146 patients sont décédés à l'hôpital de Trévenans depuis le début de la deuxième vague

 

Dès ce lundi 12 avril, l’hôpital Nord Franche Comté passe un nouveau palier et déprogramme la plupart des opérations non urgentes. Cela répond à une demande l’Agence Régionale de Santé (ARS pour faire face à l’afflux de patients Covid.  Mais toutes ces déprogrammations commencent à avoir des conséquences importantes pour les patients.

C’est le cas de Léa Farey-Coulin : elle aurait dû se faire opérer en novembre dernier, à Trévenans, pour une endométriose, une maladie chronique qui touche l’utérus d’une femme sur 10. Mais l’opération, considérée comme non urgente, a déjà été reportée deux fois. « J’arrive à saturation, j’ai des douleurs de plus en plus fortes, des kystes dans les ovaires, sans compter la fatigue, et puis plus la maladie progresse, plus le risque de stérilité augmente, c’est angoissant.« , s’inquiète la jeune femme. « J’ai l’impression que mon corps pourrit à l’intérieur. »

200 personnes sur liste d’attente, des opérations repoussées à l’année prochaine

Léa est loin d’être un cas isolé. Des centaines de patients ont vu leurs interventions repoussées en Franche-Comté. Et cela va encore s’accélérer puisque la capacité de l’hôpital arrive à saturation : 94 patients sont hospitalisés en raison du Covid à Trévenans et 21 sont en réanimation. « Dans mon service, je reprogramme des opérations à l’année prochaine, j’ai 200 patients sur ma liste d’attente« , déplore le docteur Jean-Baptiste Andreoletti, chef du service chirurgie plastique.

« C’est vrai que l’on fait majoritairement de la chirurgie de confort mais nous avons tout de même des femmes qui attendent une reconstruction mammaire après un cancer du sein, ou bien des personnes qui ont perdu beaucoup de poids et qui attendent une chirurgie réparatrice pour ne plus avoir de macération sous les plis aux endroits où ils ont des excès de peau« .

Seulement trois salles d’opérations ouvertes sur 14

Mais surtout le docteur Andreoletti, qui est également président du conseil des blocs opératoires, s’alarme de la situation dans tous les autres services : « Mes collègues de chirurgie digestive n’ont jamais vu autant de cancers du colon au stade T4, donc très avancés, qui arrivent en urgence. Soit parce qu’ils ont eu des diagnostics retardés, ou qu’ils n’ont pas eu leur coloscopie, etc…« , s’alarme-t-il. « Autre exemple : les chirurgiens vasculaires m’ont signalé beaucoup de cas d’artérites des membres inférieurs (ndlr : des problèmes de circulation du sang vers les pieds), qui ne sont pas pris à temps. Donc au lieu d’une intervention chirurgicale mineure, ils sont amenés à les opérer à des stades beaucoup plus lourds, et donc avec bien plus de risques d’amputation« .

Et cette situation concerne tous les services. Car désormais, à l’hôpital de Trévenans, seules trois salles d’opérations sont ouvertes sur les 14 prévues à l’origine. Tous les personnels sont mobilisés pour faire face à l’épidémie de Covid. Et les patients s’en rendent compte : « J’ai le sentiment qu’il n’y a que l’épidémie de Covid qui compte en ce moment, mais il faut qu’on pense aux autres patients« , estime Léa Farey-Coulin. « Tout cela devient invivable« .

Source FRANCE BLEU.

 

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