La Cour européenne des droits de l’homme a appliqué rétroactivement, au travers de cette décision, la loi dite « anti-arrêt Perruche ».
Le handicap de l’enfant, qui n’avait pas été diagnostiqué avant sa naissance, n’avait pas été indemnisé par la France.
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné jeudi 3 février la France pour avoir refusé d’indemniser le handicap d’un enfant qui n’avait pas été diagnostiqué avant sa naissance en appliquant rétroactivement la loi dite « anti-arrêt Perruche ».
L’enfant et ses parents, domiciliés en Guadeloupe, « pouvaient légitimement espérer pouvoir obtenir réparation de leur préjudice correspondant aux frais de prise en charge de leur enfant handicapé dès la survenance du dommage, à savoir (sa) naissance », indique la Cour dans un communiqué.
Un handicap non détecté avant la naissance
Leur enfant, né en décembre 2001, est atteint d’un ensemble de malformations désignées sous le terme de « syndrome de VACTERL ». Un diagnostic réalisé quelques mois plus tôt, en mai de la même année, n’avait pourtant révélé aucune anomalie, explique la Cour.
S’appuyant notamment sur une expertise qui pointait une interprétation erronée des échographies, les parents ont engagé une procédure judiciaire afin que « les charges particulières résultant du handicap de leur enfant » soient indemnisées, poursuit la Cour.
Au terme d’un parcours juridique de plusieurs années, ils ont été déboutés par la justice administrative qui a invoqué notamment des dispositions de la loi Kouchner, dite « anti-arrêt Perruche ».
Cette loi avait été votée quelques mois après la naissance de l’enfant des requérants, en mars 2002, afin de mettre fin à la jurisprudence « Perruche », du nom de Nicolas Perruche, né gravement handicapé en raison d’une rubéole contractée par sa mère mais non détectée durant la grossesse.
Nicolas Perruche avait obtenu en 2000 de la Cour de cassation le droit à être indemnisé, décision qui avait soulevé une vaste polémique et avait conduit deux ans plus tard au vote de la loi Kouchner.
Un litige dans la suite « des affaires Maurice et Draon »
Pour la Cour, dans le cas de cette famille guadeloupéenne, la France n’aurait pas dû appliquer cette loi de manière rétroactive car c’est contraire à la Convention européenne des droits de l’homme (article 1 du protocole N° 1).
Selon elle, ce litige « s’inscrit dans la suite des affaires Maurice et Draon », deux dossiers français dans lesquels le bras judiciaire du Conseil de l’Europe avait déjà condamné Paris en 2005 pour avoir appliqué rétroactivement la loi Kouchner.
Un accord financier entre l’État français et ces deux familles avait ensuite été trouvé.
Source OUEST FRANCE.