Handicap: ces pays où l’assistance sexuelle est encadrée, voire remboursée…

Pour rouvrir le débat en France, où la pratique est interdite car assimilée à de la prostitution, la secrétaire d’État aux personnes handicapées invoque la Suisse, le Danemark ou les Pays-Bas, pays où la pratique est légale voire remboursée par la sécurité sociale.

L’assistance sexuelle est principalement légale dans les pays où la prostitution l’est également. (Photo d’illustration).

L’assistance sexuelle pour les personnes handicapées s’invite une nouvelle fois dans le débat public. Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du premier ministre chargée des personnes handicapées, a saisi le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) en ce sens. Un débat clos depuis 2013 lorsque le comité avait rendu un avis négatif, s’appuyant sur le «principe de non-utilisation marchande du corps humain». En effet, en France, la loi interdit l’activité des assistants sexuels puisque ces derniers sont rémunérés à la séance. Une pratique proche de la prostitution. Il ne s’agit pas «d’ouvrir un réseau de prostitution, cette question est totalement ridicule, à côté de la plaque. Ces assistants de vie sexuelle existent déjà en Belgique, aux Pays-Bas, en Suisse. Allons voir comment ont été formées ces personnes», a alors dit Sophie Cluzel sur Europe 1 et CNews.

La problématique a déjà été évoquée dans la convention des nations unies du 13 décembre 2006 relative aux droits des personnes handicapées. L’article 25 de cette convention précise notamment: «Les États Parties reconnaissent que les personnes handicapées ont le droit de jouir du meilleur état de santé possible sans discrimination. Ils prennent toutes les mesures pour leur assurer l’accès à des services de santé qui prennent en compte les sexospécifités.» Il est également précisé que les pays ayant ratifié cette convention doivent leur fournir «des services de santé gratuits ou d’un coût abordable couvrant la même gamme et de la même qualité que ceux offerts aux autres personnes, y compris des services de santé sexuelle et génésique et des programmes de santé publique communautaires».

Plusieurs pays voisins «ont d’ores et déjà encadré l’assistance sexuelle; cela, de différentes manières. Le statut des professionnels varie également selon la réglementation des États, mais tous insistent particulièrement sur le ‘recrutement’ et la formation des aidants», expliquait déjà François Vialla, directeur du Centre européen d’études et de recherche droit et santé, dans l’avis du CCNE de 2013.

• Pays-Bas

Les Pays-Bas ont été un des premiers pays à avoir proposé l’assistance sexuelle pour les personnes handicapées, au début des années 1980. À noter que le système prostitutionnel hollandais est très permissif. L’association pour des Relations Alternatives SAR propose des prestations sexuelles depuis 1982. Les tarifs varient entre 85 et 100 euros l’heure. D’après l’association, 95% des demandes sont masculines.

Au Pays-Bas, l’assistance sexuelle est reconnue comme un soin. «Les prestations sont parfois remboursées par les assurances sociales des collectivités locales», expliquait François Vialla. Dans son ouvrage «handicaps et sexualités: le livre blanc» , Marcel Nuss explique aussi: «Dans certaines régions, les personnes handicapées peuvent toucher une allocation de la part des services sociaux pour ce type de prestations».

• Danemark

La prostitution est dépénalisée au Danemark, seules les organisations comme le proxénétisme et les maisons closes sont interdites. D’ailleurs, les travailleurs du sexe doivent s’inscrire en tant que travailleur indépendant et sont même susceptibles de payer des impôts à partir de 50.000 euros de revenus par an. Le versement d’une aide sociale, considérée comme une «indemnité de handicap» a également été mis en place pour permettre aux personnes handicapées d’obtenir les services d’une assistante sexuelle ou d’une prostituée.

• Belgique
Bien que l’on cite souvent en exemple la Belgique, l’assistance sexuelle y est certes pratiquée mais non réglementée. Les questions morales étant identiques à celles posées en France et concernant l’assimilation à la prostitution. La prostitution n’est pas interdite en Belgique et le pays a la même législation que le Danemark: le proxénétisme et les maisons closes sont interdits.

Dans un avis du Comité national d’éthique belge rendu en 2017, les membres estiment que «comme tout adulte majeur, la personne handicapée physique jouit en droit de sa pleine capacité d’exercice et peut dès lors consentir librement à toute pratique sexuelle qu’elle souhaite».

L’assistance sexuelle devrait ainsi «constituer une offre de service reconnue par les pouvoirs publics à travers un cadre réglementaire» mais ne devrait pas «faire l’objet d’un remboursement par les pouvoirs publics (via les mutuelles ou autres)».

• Suisse Romande

En Suisse Romande, les premières formations d’assistance sexuelle ont vu le jour en 2007 à l’initiative de l’association Sexualité et handicaps pluriels. La prostitution est légale et encadrée et «toute personne désirant exercer cette activité est libre de le faire et est considérée comme indépendante», précise Christine Fayet, secrétaire générale de l’association. Le métier d’assistant sexuel est, ainsi, assimilé à une activité prostitutionnelle. L’État ne prend absolument pas en charge les formations. Ces dernières sont données par des associations. Les formations sont ouvertes à tous et les profils sont variés: il s’agit parfois de prostituées, de professionnels de santé ou d’autres types de métiers.

• Allemagne

En Allemagne, la prostitution est légale et régulée. En 1995, un «service de contact corporel», nommé SENSIS, a été créé. En principe, tout le monde peut devenir assistant sexuel et plusieurs associations proposent des formations. L’institut pour l’autodétermination des personnes handicapées (ISBB) est notamment spécialisé. Selon les länder, certains actes sexuels réglementés de façon différente. «La plupart du temps, il s’agit de massages et de caresses et la pénétration est interdite», explique Julia Tabath, présidente de l’association Choose.

• États-Unis

Outre-Atlantique, l’assistance sexuelle est apparue dans les années 1970. Aux États-Unis, aucune loi n’interdit spécifiquement l’accompagnement sexuel bien que la prostitution soit tout de même considéré comme un délit dans la majorité des États.

Dans certains États, notamment en Californie où la prostitution est illégale, les assistants sexuels ont le statut de «sexual surrogates» (partenaire de substitution). L’activité est reconnue et un accompagnant sexuel peut même être proposé à une personne handicapée par son médecin ou son thérapeute.

Source LE FIGARO.


 

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