Franche-Comté | Social Une aide-soignante témoigne de son travail physique et épuisant en Ehpad…

À l’occasion de la Journée d’action nationale intersyndicale des Ehpad et des services d’aides à domicile, une aide-soignante d’un établissement pour personnes âgées situé en milieu rural témoigne de son quotidien et de la dureté du métier en sous-effectif constant.

Un sous-effectif chronique dans les établissements qui accueillent des personnes âgées.  Photo d’archives ER /Lionel VADAM

Elle se prénomme Fanny* et travaille dans un Ehpad privé de la région. Un Ehpad très rural, ce qui ne facilite pas le recrutement aux salaires proposés. Elle-même parcourt une cinquantaine de kilomètres par jour pour aller bosser comme aide-soignante mais « la plupart des filles sont faisant fonction et ne dépassent pas le Smig. » Elle balance mais elle a vu pire ailleurs et d’ailleurs pas très loin. Alors, les annonces bienveillantes depuis la crise des Ehpad révélée par la grève de 117 jours des aides-soignantes de Foucherans (Jura) , il y a deux ans, la font sourire. Enfin, façon de parler.

« Trois pour 60 résidents »

« On subit un manque de personnel criant, au point qu’on a l’impression de bosser sur une chaîne de fabrication et pas avec de l’humain ! » Elle, travaille avec des résidents atteints de pathologies neurologiques. C’est dur mais elle n’a qu’une douzaine de personnes à servir le soir et à coucher, toute seule, et seulement deux à faire manger. « Les petites jeunes à l’étage, elles sont trois pour 60 résidents. À 22, 23 ans, elles ont déjà le dos cassé. C’est tellement physique ce métier. Alors, parfois, elles s’arrêtent. Pas parce qu’elles refusent de travailler mais parce qu’elles n’en peuvent plus. Heureusement qu’on l’aime ce métier. »

Fanny, elle, s’en sort avec des tendinites et un pincement de la moelle épinière. « Mais je ne cours plus dans les étages, positive-t-elle. On parle de la dureté du métier de maçon mais il faudrait venir voir, passer une journée avec nous, pour se rendre compte de la réalité de ce qu’on fait chaque jour. Même l’Agence régionale de santé s’en fout. Récemment, ils sont passés et rien qu’au vu des plannings ont décidé que l’on pouvait se passer d’un poste. On a réclamé. On leur a dit qu’ils s’étaient trompés, qu’on leur avait mal expliqué. Qu’il nous manquait plutôt un poste. Ce sont des bureaucrates. Ça ne changera rien. Ils pensent que ce métier, c’est cool. On ne sait pas comment on va faire mais il faudra vous y habituer nous a-t-on dit. »

Dans les Ehpad publics, les places sont rares

Entre-temps, il y aura eu l’été, une première canicule, des remplacements avec des petits jeunes qui veulent bosser l’été et n’ont jamais fait une toilette à une personne alitée. « Alors on le fera à leur place. Les intérimaires, c’est trop cher. Dans le privé, on tire sur tout jusque sur la nourriture. »

Bien sûr qu’elle a pensé à postuler ailleurs, dans le public où les postes sont plus tranquilles, « mais les gens ne bougent pas trop quand ils ont un bon boulot. Les places sont rares ». Alors, en cette Journée d’action nationale intersyndicale des Ehpad et des services d’aides à domicile, elle balance : « À un moment, il faut savoir dire les choses comme la nana qui a accosté avec son navire en Italie. L’humain est prioritaire. Alors moi je le dis, gardez le plus longtemps vos personnes âgées auprès de vous… »

*Le prénom a été changé.

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