Être insomniaque exposerait à davantage de troubles de la mémoire…

D’après une étude canadienne menée sur 28.000 personnes, le manque de sommeil causé par l’insomnie chronique peut impacter négativement la mémoire.

Être insomniaque exposerait à davantage de troubles de la mémoire

Oublier de nourrir son animal de compagnie, se tromper de bus, laisser un gâteau trop cuire dans le four… Tout le monde en a déjà fait le constat: après une mauvaise nuit, la moindre tâche devient plus difficile. Et lorsque les troubles du sommeil s’installent pour de bon, comme c’est le cas pour les 10% de la population souffrant d’insomnie, c’est la mémoire qui en prend un coup. Des chercheurs de l’université de Concordia à Montréal (Canada) ont en effet montré que les personnes souffrant d’insomnie chronique sont plus sujettes aux troubles de la mémoire que celles qui ont un sommeil de plomb. Leur étude a été publiée le 16 mai dans la revue médicale Sleep .

Une étude sur 28.000 personnes

Les chercheurs ont recruté 28.000 volontaires de plus de 45 ans, puis les ont répartis en 3 groupes en fonction de la qualité de leur sommeil. Le premier comprenait les patients souffrant d’insomnie chronique, le second les personnes ayant ponctuellement des insomnies et le dernier groupe réunissait les personnes sans aucun trouble du sommeil. On dit qu’une insomnie est chronique si elle se manifeste plus de trois nuits par semaine pendant au moins trois mois et qu’elle altère la qualité de vie (fatigue, somnolence, irritabilité, difficulté de concentration).

«Le groupe souffrant d’insomnie chronique a moins bien réussi les tests que les individus des deux autres groupes.»

Pr Thien Thanh Dang-Vu, chercheur en santé cognitive et neurosciences et coauteur de l’étude

Par la suite, les participants ont rempli un questionnaire et passé des tests neuropsychologiques. Résultat? «Le groupe souffrant d’insomnie chronique a moins bien réussi les tests que les individus des deux autres groupes», indique dans un communiqué le Pr Thien Thanh Dang-Vu, chercheur en santé cognitive et neurosciences et coauteur de l’étude. Lors de l’exercice consistant à retenir une liste de 15 mots, les participants insomniaques se sont souvenus de 3,18 mots sur 15 après 30 minutes, contre 3,42 pour les participants sans trouble du sommeil. Une différence qui semble mince mais que les auteurs estiment significative. Si les capacités mémorielles étaient similaires entre les groupes, ce chiffre ne devrait fluctuer que de quelques centièmes d’unités tout au plus. Cependant, chaque test cognitif n’ayant été réalisé qu’une seule fois par personne, ces résultats doivent être abordés avec prudence.

L’insomnie n’est pas la seule responsable des troubles cognitifs

Cette baisse de performance pourrait-elle être due à autre chose qu’à l’insomnie? La question mérite d’être posée car la mémoire peut être affectée par de nombreux facteurs: un AVC, certains médicaments, l’alcoolisme etc. Pour s’assurer que c’est bien l’insomnie qui est en cause, les auteurs n’ont pas retenu les personnes diagnostiquées pour une démence ou un traumatisme crânien important, mais ils ont aussi pris en compte les effets possibles d’autres problèmes de santé tels que l’anxiété et les douleurs chroniques.

«Le type de mémoire principalement touché est la mémoire déclarative, c’est-à-dire la mémoire des objets et évènements», explique le Pr Dang-Vu. Cette mémoire permet par exemple de se souvenir de la date d’obtention de son permis de conduire, du lieu où l’on a retrouvé des amis etc. Fait étonnant, le groupe d’insomniaques ponctuels a mieux réussi les tests de flexibilité mentale (capacité à passer d’une tâche cognitive à une autre) par rapport aux deux autres groupes. Un résultat fragile que les chercheurs expliquent par l’hyperactivité consécutive au manque de sommeil.

Le sommeil permet d’optimiser la mémoire : lorsque nous dormons, le cerveau trie les informations et les stocke.

Ce n’est pas le seul résultat inattendu: l’étude montre que ce sont les plus jeunes participants (45 – 65 ans) qui ont le plus souvent souffert d’insomnies et de troubles de la mémoire. Or on aurait pu s’attendre à ce que les personnes âgées, plus à risque de démence, soient les plus touchées. Serait-ce alors annonciateur d’un déclin cognitif à venir? Est-ce que ces déficits cognitifs peuvent être prévenus, voire inversés? «Ce sont des questions importantes qui doivent encore être explorées et qui auront un impact majeur sur la prévention et le traitement des troubles cognitifs liés à l’âge», affirme le Pr Dang-Vu.

On le sait, le sommeil permet d’optimiser la mémoire: lorsque nous dormons, le cerveau trie les informations et les stocke. Non seulement il travaille à se souvenir des éléments importants, mais il élimine ceux qui ne le sont pas. Selon les phases du sommeil, ce n’est pas la même mémoire qui entre en jeu. Ce sont les phases de sommeil léger et profond qui agissent sur la mémoire déclarative, justement celle touchée chez les participants insomniaques de l’étude canadienne. Reste à savoir si cet impact de l’insomnie est transitoire ou durable, et s’il constitue un signe prédictif de survenue de démence.

Source LE FIGARO.

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