Et si la pandémie était une chance pour redémarrer autrement. A Reims, le philosophe Gérard Lemarié l’espère…

Nous n’acceptons plus la solitude, « certains font les mariolles, en refusant le port du masque ou le vaccin ».

Pour le philosophe Gérard Lemarié, la crise sanitaire nous renvoie à nos peurs de toujours.

Il faut attendre pour en mesurer l’impact, mais elle nous a montré notre fragilité.

Gérard Lemarié pense que "personne ne sait de quoi demain sera fait".

Gérard Lemarié pense que « personne ne sait de quoi demain sera fait ».

Ceux qui ont le goût du questionnement, de la réflexion, ont sans doute, un jour assisté à une conférence du professeur de philosophie, Gérard Lemarié, que ce soit dans le cadre d’interventions à la médiathèque de Reims, dans la Marne, ou encore dans le cadre du cycle de conférences Passerelles. Si aujourd’hui, le philosophe a cessé de donner des cours à l’école de commerce, Neoma, et à la faculté de médecine, il fourmille de projets de nouvelles conférences.

Nous traversons une épreuve, celle de la pandémie. Et sur ce Coronavirus et ses conséquences, le philosophe, Gérard Lemarié porte un regard classique. « Il n’y a pas d’étonnement« , déclare-t-il, « dans la mesure où l’on a toujours eu peur de tout, des autres, de la nature, de ce que nous-mêmes pouvons  faire à nous-mêmes. Le virus existe depuis 3.000 ans. Ce n’est pas nouveau. Là, on est confronté à un énorme problème mondial, avec l’impossibilité de nous protéger, alors que nous avions les moyens de le faire. La pandémie a révèlé notre impuissance, face à la nature, malgré les merveilleuses avancées technologiques, qui n’ont au fond servi que de cataplasmes ».

« Il faut penser global et agir local. Il faut s’y mettre tous, et que le vaccin s’étende à la population mondiale. »

Gérard Lemarié, philosophe.

« Nous craignons, depuis toujours la souffrance et la mort, la nôtre et celles des autres« . Gérard Lemarié précise que la philosophie, représente une aide pour en avoir moins peur, mais ne parvient pas à les éradiquer. « La pandémie n’est rien d’autre qu’une récurrence de cette triple peur à jamais présente en nous« .

 Pascal, il y a plusieurs siècles, se penchait sur l'homme et la solitude.
Pascal, il y a plusieurs siècles, se penchait sur l’homme et la solitude.© Daniel Casanave.

La question de la solitude

Si le philosophe constate que depuis deux ans, la technologie est incapable de régler la question, il s’étonne également que les gens ne soient pas plus responsables. « Il y a des choses à faire« , dit-il. « On assiste à des dérèglements irrationnels. Quand on compare les vaccins et les risques pour la santé, on peut s’étonner que les gens soient si craintifs. Il ne faut pas non plus faire les mariolles en refusant de porter le masque ».

Dans son analyse de la situation, Gérard Lemarié, renvoie à Pascal, au 17ème siècle. « La philosophie nous invite à rester seul, mais on n’accepte plus la solitude, le courage. On ne comprend pas que le confinement, c’est se retrouver seul, dans une chambre, avec un livre. Pascal », nous rappelle Gérard Lemarié, « affirmait que le malheur des hommes venait du fait de ne savoir le faire. Aujourd’hui, pour certains, il faut constamment être entouré « . Le philosophe considère qu’on ne mesurera l’impact considérable de cette crise que lorsqu’on en aura dépassé la crainte. Pour autant, il pense que des choses auront changé, mais assistera-t-on à un retour à nos modes de vie d’avant la pandémie?

Et si cette période était l'occasion de reconsidérer ses priorités ?
Et si cette période était l’occasion de reconsidérer ses priorités ?© Daniel Casanave.

L’espoir d’une réflexion

Nous n’en avons pas encore fini avec la crise sanitaire, loin de là. Mais déjà, Gérard Lemarié espère que la pandémie fera réfléchir, notamment sur les vraies valeurs, l’argent, la technique. « On assiste à une victoire de la technologie et de sa faiblesse. On ne peut rien, ce qui entraîne froid, frayeur. On s’attendait à avoir tous les moyens, et on s’aperçoit qu’on est fragile ».

Ce que souhaite le philosophe, c’est que la situation nous fasse aller dans une direction meilleure. « Si un évènement peut nous faire changer, c’est un évènement comme celui-ci. Il faut penser global et agir local. Il faut s’y mettre tous, et que le vaccin s’étende à la population mondiale. Actuellement, la crise sanitaire nous apporte, en même temps, des aspects positifs, mais aussi négatifs. Ca peut nous faire réagir, pour qu’on ne reparte pas sur les mêmes bases. C’est presque une chance, une vraie chance ».

« On ne comprend pas que le confinement, c’est se retrouver seul, dans une chambre, avec un livre. Aujourd’hui, pour certains, il faut constamment être entouré. »

Gérard Lemarié, philosophe.

« Il n’y aura pas de retour en arrière« , analyse Gérard Lemarié, « parce que nous sommes au cœur d’une nouvelle fracture, une rupture dans l’ordre du savoir, coupure qui transforme à chaque fois nos manières de penser le monde qui nous entoure ».

Accepter les réseaux sociaux

La mondialisation souvent mise en cause, Gérard Lemarié rappelle qu’on  l’a réclamée, dès le 17ème siècle. « On était persuadé qu’on allait tout savoir, et on a démocratisé. L’une des conséquences, ce sont les réseaux sociaux. On ne peut pas les critiquer, car c’est la possibilité de dire ce qu’on a envie de dire. Il faut tout accepter ». S’il craint que « les liens ne reposent désormais plus que sur l’argent« , le philosophe considère que « personne ne peut dire de quoi demain sera fait« .

Pendant les différents confinements, Gérard Lemarié n’est pas resté inactif. La rentrée de septembre sera pour lui riche en  évènements avec la création d’un grand cycle de conférences, à Bezannes, près de Reims, dans la Marne, dans la salle Galaxy. De nombreuses conférences, dans le cadre des Social Clubs du groupe Frey, auront lieu dans ses centres commerciaux, mais il faudra suivre également la mise en place d’un cycle de rencontres prestigieuses dans la salle Proust, chez Drouant, à Paris, où le prix Goncourt est décerné, chaque année. Le regard du philosophe sur ce moment si particulier que nous traversons y est très attendu.

Source FR3.

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