« Encore une rentrée sans école pour des enfants en situation de handicap »…

Dans une tribune que publie le JDD, Luc Gateau, le président de l’Unapei, dénonce le fait que de nombreux enfants, en situation de handicap, ne pourront pas faire leur rentrée dans des conditions normales.

Pour de nombreux enfants en situation de handicap, il n'y aura pas de rentrée scolaire cette année.

Mardi, c’est la rentrée scolaires. Mais pour de nombreux enfants, il n’y aura pas de rentrée ni d’école comme l’explique dans une tribune que publie le JDD Luc Gateau, le président de l’Unapei, la première fédération d’associations de représentation et de défense des intérêts des personnes handicapées mentales et de leurs familles. « Faute de moyens, on porte atteinte à l’intérêt supérieur de ces enfants », dénonce-t-il, rappelant le droit fondamental à l’éducation. Et de souligner la promesse d’Emmanuel Macron selon laquelle « aucun enfant ne soit privé d’école à la rentrée ». Voici sa tribune :

« Encore une rentrée sans école »

Mardi prochain, dans la plupart des familles, les enfants prépareront leurs cartables, leurs parents vérifieront qu’ils ont bien crayons et cahiers et on se pressera pour ne pas risquer d’arriver en retard… Certains partiront grognons de ne plus être en vacances, d’autres iront en courant retrouver leurs copains. Quoi de plus banal qu’une rentrée scolaire?

Sauf que pour de nombreux enfants en France, la rentrée ne se passe pas du tout ainsi. Tout simplement parce que, pour eux, il n’y a pas de rentrée du tout. Comment est-il possible qu’en France des enfants soient privés d’école, en violation manifeste de leurs droits fondamentaux?

« Pourquoi les élèves en situation de handicap devraient-ils se contenter d’une école au rabais? »

« Mon fils sera scolarisé 30 minutes 4 fois par semaine à partir d’octobre » ; « comme il n’y a pas de places pour lui en CE1, on propose à mon fils de passer directement du CP au CE2 alors qu’il ne sait pas encore bien lire ou écrire » ; « je renonce ». Absence totale de scolarisation par manque de place dans les établissements ou unités spécialement conçus pour eux, scolarisation à temps partiel -comme si les apprentissages pouvaient se faire à mi-temps- scolarisation inadaptée due à l’impossibilité pour la communauté éducative d’aménager les programmes éducatifs et les locaux afin d’accueillir ces enfants aux besoins particuliers… les témoignages que l’Unapei recueille encore cette année sur la plateforme marentree.org montrent la variété des situations. Et l’ampleur du scandale!

Le droit à l’éducation est un droit fondamental. Il n’est pas négociable. Il ne devrait jamais avoir à être bricolé. Faute de moyens, on porte atteinte à l’intérêt supérieur de ces enfants. Comment pouvons-nous accepter qu’en France, des milliers d’enfants n’aient pas le droit d’aller à l’école? Qu’on laisse à leurs parents, souvent les mères, la responsabilité de leur faire classe? Ou de devoir gérer les solutions de scolarisation inadaptées qui empêchent non seulement la cohérence des parcours éducatifs et la sérénité des apprentissages pour les enfants mais qui entravent également considérablement la vie de leurs parents et de leurs frères et sœurs?

Aller à l’école pour les apprentissages mais aussi pour y jouer, s’y faire des amis… Pour se construire, s’épanouir, s’émanciper, devenir citoyen. L’importance de l’éducation est capitale. Alors, pourquoi les élèves en situation de handicap en seraient-ils exclus? Pourquoi devraient-ils se contenter d’une école au rabais?

Chaque année, les pouvoirs publics affichent leur ambition… En février dernier, le Président de la République s’est engagé à ce qu’aucun enfant ne soit privé d’école à la rentrée prochaine. Mais l’affichage est le même chaque année et nous sommes fatigués d’entendre de beaux discours.

Fatigués que chaque rentrée scolaire soit synonyme de stress, d’inquiétude et de colère pour les familles. Fatigués qu’elle soit synonyme de rejet et d’injustice pour les enfants. Fatigués aussi parce que la crise sanitaire a induit un épuisement supplémentaire pour tous et que le risque pour ces enfants d’être exclus durablement de la société est réel.

« Il ne suffit pas d’ajouter un adjectif pour faire de l’inclusion une réalité! »

Les intentions sont là. Elles sont bonnes. Il faut désormais que les moyens suivent. La crise sanitaire nous a obligé collectivement à nous adapter, à nous transformer. Pour répondre aux injonctions des protocoles sanitaires, l’école et toute la communauté éducative a procédé à des aménagements. Cela signifie que c’est possible.

Alors à quand une école réellement inclusive? Une école accueillant tous les élèves, et donc aussi ceux en situation de handicap? Une école s’appuyant sur une coopération étroite entre l’ensemble des professionnels qui contribuent au parcours éducatif des élèves? Une école avec des locaux accessibles à tous les types de handicap, avec des espaces de répit et des espaces dédiés aux interventions médico-sociales? Une école avec des programmes scolaires adaptés et avec des modules de formation effectifs pour les enseignants et l’ensemble de la communauté éducative (cantine, ATSEM, intervenants du périscolaire)? Une école avec un grand E répondant aux besoins de tous les élèves et intégrant pleinement les enfants accompagnés par les établissements et services médico-sociaux.

« Nation inclusive », « relance inclusive », « école inclusive »… Il ne suffit pas d’ajouter l’adjectif pour faire de l’inclusion une réalité!

Source JDD.

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