Des massages ludiques pour soulager les enfants atteints de cancers et leurs parents…

A l’occasion de la Journée internationale des cancers pédiatriques, zoom sur une nouvelle pratique qui s’invite à l’hôpital : des « massages magiques » qui améliorent le bien-être des enfants et de leurs parents.

Des massages ludiques pour soulager les enfants atteints de cancers et leurs parents

  • Le samedi 15 février, c’était la Journée internationale du cancer de l’enfant.
  • Une vingtaine d’hôpitaux français forment désormais les parents d’enfants malades à des « massages magiques ».
  • Ce jeu gratuit encourage les parents et les soignants à s’occuper des enfants avant, après ou pendant des soins douloureux, pour leur redonner le sourire.

Le petit escargot, la balançoire, le cœur sur la main… Voilà des mots qu’on associe rarement au cancer d’un enfant. Depuis quelques mois pourtant, certains services d’oncologie pédiatrique forment les parents à des massages répondant à ces doux noms. A l’occasion de la journée internationale du cancer de l’enfant,20 Minutes s’intéresse à ce concept de « massage magique ».

C’est quoi, ces massages ?

Depuis 2019, la Fondation La Roche-Posay développe cet outil à disposition des enfants atteints de cancer et de leurs familles, en partenariat avec Childhood Cancer International. Sept professionnelles (des infirmières, une socio-esthéticienne, une puéricultrice, une danseuse, une psychomotricienne et une kinésithérapeute) ont mêlé leurs savoirs pour accoucher d’un jeu qui invite petits et grands à se servir du toucher pour mieux se reconnecter. Concrètement, ce jeu de société, baptisé les « Massages magiques », propose des gestes à réaliser à l’hôpital par les infirmières ou à la maison par les parents sur un enfant malade. « Beaucoup de publications scientifiques montrent que le massage régulier peut aider à limiter la douleur et à soulager les effets secondaires pendant un cancer », assure Perrine Marec Berard, pédiatre et oncologue à l ’Institut d’hématologie et d’oncologie pédiatrique (IHOPe) à Lyon.

Illustration d'un massage spécial pour les enfants atteints de cancer.

Enzo, atteint d’une leucémie à 12 ans, a été l’un des premiers à tester. « Pendant un an, j’avais une chimiothérapie soit à l’hôpital Debré (Paris), soit à Mantes-la-Jolie (Yvelines) », explique l’adolescent de 14 ans. C’est dans ce deuxième hôpital qu’il croise la route et les mains d’Isabelle Landault, infirmière puéricultrice, qui le masse après chaque chimiothérapie. « Il était très anxieux, très nauséeux, et très demandeur de ces moments de répit, qui lui permettaient de relâcher toutes les tensions », explique l’infirmière, qui a participé à l’élaboration du jeu.

Pendant qu’Isabelle masse un bras, la mère d’Enzo s’occupe du deuxième, pour que peu à peu, elle prenne le pli et puisse le masser à la maison. « Souvent, elle me massait le soir avant une chimiothérapie pour m’aider à m’endormir, raconte Enzo. Les noms qu’on avait donnés aux différents gestes, « bracelet », « plumes », c’était ludique, pour qu’on s’en souvienne facilement. » Et Enzo en a profité pour apprendre à masser sa mère.

Quelles précautions prendre ?

Enzo a désormais fini ses traitements et le jeu a hérité de ces noms imagés. Au total, les professionnelles ont imaginé 25 gestuelles douces. C’est l’enfant malade qui choisit le menu : la durée du massage, quelle partie du corps et quelles gestuelles. « Il va d’autant plus prendre plaisir que c’est lui qui décide », assure l’infirmière. Surtout à un moment où il est l’objet de soins et peu le sujet de choix. Au dos des cartes, la gestuelle est expliquée par écrit et sous forme de dessin, pour que tous puissent comprendre, quelle que soit l’origine de la famille et l’âge du patient.

Illustration du jeu

Masser un enfant atteint d’un cancer nécessite des précautions. Il ne faut jamais toucher la zone tumorale, des cicatrices, la zone du cathéter. Surtout, il faut que ce soit le bon moment pour l’enfant et son parent. « On ne peut pas détendre l’un sans l’autre, et il faut prendre en compte la fatigue du jeune malade, poursuit Isabelle Landault. En oncologie, on n’a pas le droit de masser avec des pressions, toujours avec un effleurage ». Et l’infirmière d’expliquer le rituel. « L’idéal, c’est de commencer par prendre trois grandes respirations ensemble, pour entrer dans la bulle de cocooning. Puis de répéter chaque gestuelle trois fois. Mais il y a des enfants, comme Enzo, pour qui cela pourrait durer à l’infini ». Ce moment peut se dérouler pendant les soins, afin de détourner l’attention. Car moins le jeune patient sera tendu, mieux il supportera ses traitements.

Un soulagement pour les parents

L’infirmière est persuadée que cette pratique – où le parent formé, et non le soignant, s’occupe de son enfant – soulage les proches. « Quand on annonce une maladie aussi grave qu’un cancer, c’est un bouleversement total, souligne-t-elle. Les parents se sentent souvent démunis, impuissants. » Car la maladie va dicter le planning de l’enfant, transbahuté entre hôpitaux, cabinets médicaux, chimio et examens, et grignoter les temps de jeu et de complicité. « Le parent ne va plus oser toucher son enfant par peur de lui faire mal. De son côté, l’enfant qui souffre n’accepte pas forcément aussi bien qu’avant le toucher. » Or, on sait aujourd’hui combien les caresses sont indispensables pour grandir correctement.

Selon une étude de la Fondation La Roche Posay, 68 % des parents d’enfants atteints d’un cancer expriment un besoin d’aide pour communiquer et/ou pour rentrer en contact physiquement avec lui. En proposant de prendre ce temps, les professionnelles de santé espèrent recréer du lien et de la joie. Car quand les fourmis font des chatouilles et quand le jeu raconte l’histoire d’un petit lapin sur un trampoline, le rire s’invite dans un quotidien lourd. « Les parents d’une fille de 5 ans m’ont expliqué qu’ils finissaient par oublier la maladie pendant ces massages, ils se sentaient indispensables », témoigne l’infirmière.

Une vingtaine d’hôpitaux en France a déjà adopté ces massages originaux. Et des structures pédiatriques russes, américaines et brésiliennes veulent le tester. « C’est le signe que les oncologues pédiatriques sont de plus en plus sensibilisés aux techniques non médicamenteuses », se réjouit la pédiatre et oncologue. Si ce jeu, gratuit et téléchargeable sur Internet, s’adresse en priorité aux familles touchées par les cancers pédiatriques, il peut se décliner pour d’autres pathologies, notamment psychiatriques. Et Isabelle Landault de s’amuser : « c’est réalisable pour tout le monde. J’ai une fille de 16 ans, elle a servi de cobaye et elle a apprécié… »

Source 20 MINUTES.

 

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