Dépakine. La justice reconnaît la responsabilité de l’État..

Ce jeudi 2 juillet, la justice française a reconnu pour la première fois la responsabilité de l’État français dans l’affaire de la Dépakine, un médicament controversé qui occasionne des troubles graves chez certaines femmes enceintes.

Le tribunal administratif de Montreuil l’a condamné à indemniser trois familles dont les enfants sont lourdement handicapés.

Le médicament Dépakine, qui occasionne des troubles graves chez certaines femmes enceintes.

La justice a reconnu pour la première fois jeudi la responsabilité de l’État dans le scandale de la Dépakine, le condamnant à indemniser trois familles dont les enfants sont lourdement handicapés après avoir été exposés in utero à cet anti-épileptique.

Le tribunal administratif de Montreuil (Seine-Saint-Denis) a encore estimé que les responsabilités étaient également partagées, dans une moindre mesure, par le laboratoire Sanofi et des médecins prescripteurs.

Entre 20 000 et 290 000 euros d’indemnités

L’État a été condamné à indemniser chaque famille à des montants d’environ 200 000 €, 290 000 € et 20 000 €, en fonction de la date de naissance des cinq enfants concernés, âgés aujourd’hui de 11 à 35 ans.

Il « a manqué à ses obligations de contrôle en ne prenant pas les mesures adaptées et a engagé sa responsabilité », a estimé le tribunal dans un communiqué.

L’avocat des familles, Charles Joseph-Oudin a salué de « bonnes décisions », notamment car elles engagent aussi la responsabilité du laboratoire, tout en annonçant que les requérants allaient « faire appel dans les trois dossiers ».

Lors de l’audience le 24 juin, le rapporteur public avait préconisé de verser aux victimes et à leurs parents des indemnités pouvant aller jusqu’à 152 000 € par personne.

« Je suis en colère car 80 des enfants nés avant 2004 sont exclus des indemnités »

« Je salue la condamnation de l’État, nous nous y attendions, le tribunal reconnaît également la responsabilité des médecins prescripteurs du médicament », a réagi Marine Martin, présidente et fondatrice de l’Apesac (association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anti-convulsivant), qui représente 7 500 victimes.

« Mais je suis en colère car 80 % des enfants nés avant 2004 sont exclus des indemnités », dénonce-t-elle, rappelant que « l’autisme les rend invalides à vie ».

En effet, dans le dossier d’un enfant né en 1985, la justice a estimé que « seuls les risques de malformations étaient suffisamment documentés pour alerter la vigilance des autorités sanitaires » mais que les risques quant à l’apparition de troubles neuro-développementaux tel l’autisme n’étaient pas suffisamment connus à l’époque.

D’où l’appel dans les trois dossiers, a indiqué Me Joseph-Oudin.

Le nombre d’enfants handicapés à cause du valproate de sodium, molécule présente dans la Dépakine et utilisée contre l’épilepsie et les troubles bipolaires, est estimé entre 15 et 30 000, selon les études.

Sanofi reconnu coupable

Le tribunal administratif a également considéré que la responsabilité de l’État n’était pas entière et pouvait être exonérée partiellement à cause d’autres acteurs au cœur de ce scandale sanitaire.

Ainsi, le laboratoire français Sanofi et des médecins prescripteurs ont également été reconnus responsables, à degrés divers, de n’avoir pas suffisamment informé les patientes des risques encourus en poursuivant leur traitement.

Le laboratoire n’ayant pas été partie à la procédure, celui-ci n’a pas pu faire valoir ses arguments, notamment l’ensemble de ses demandes de modification des documents d’information sur le produit à destination des praticiens et des patients, s’est défendu le géant pharmaceutique, qui a toujours soutenu avoir respecté ses obligations.

Sanofi s’est lancé dans une guérilla judiciaire pour refuser d’indemniser les victimes, a dénoncé pour sa part Me Joseph-Oudin.

Le laboratoire français, qui a été mis en examen en février pour tromperie aggravée et blessures involontaires après le dépôt de 42 plaintes de familles, est par ailleurs au coeur d’une vingtaine de procédures au tribunal judiciaire de Nanterre (Hauts-de-Seine).

Parallèlement aux procédures judiciaires, 500 dossiers de victimes directes ont été déposés à l’Oniam (Office national d’indemnisation des accidents médicaux), et 1 400 sont en cours de constitution. L’organisme a déjà proposé un total de 6,5 millions d’euros d’indemnisations aux victimes de la Dépakine.

Avec le Mediator, dont le procès-fleuve se clôt lundi prochain, la Dépakine est l’un des plus retentissants scandales sanitaires en France ces dernières années.

Source OUEST FRANCE.

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