Déconfinement: des enfants de soignants mis à l’écart…!

Des inspecteurs ou des directeurs d’école, surinterprétant le protocole sanitaire, ont tenté d’isoler ces élèves.

Déconfinement: des enfants de soignants mis à l’écart...!

Un million et demi d’élèves, sur un total de 6,7 millions, ont commencé à reprendre mardi le chemin de l’école primaire après huit semaines d’interruption, malgré des protestations. Le protocole sanitaire extrêmement strict imposé par le ministère de l’Éducation nationale, à la demande des syndicats enseignants, permet la réouverture de 86 % des écoles mais favorise parfois un excès de zèle et d’inquiétude, comme à Toulouse, Nice ou Paris.

À Toulouse, une inspectrice de l’Éducation nationale a adressé le 5 mai une lettre aux parents d’élèves soignants leur annonçant qu’ils devraient laisser leurs enfants dans des écoles particulières. Une décision motivée par la volonté de «ne pas occasionner un brassage d’enfants qui ne serait pas en accord avec les conditions sanitaires requises». Dans un autre courrier adressé à des parents d’élèves de Nice, il est expliqué que «les enfants dont les parents ont une profession prioritaire ne pourront pas intégrer leur classe habituelle ni prendre leur récréation en commun».

« Les enfants de soignants sont stigmatisés et discriminés avec des mesures drastiques de distanciation sociale avec les autres élèves qui sont disproportionnées. »

Lamia Kerdjana, présidente de Jeunes Médecins Île-de-France

Un père médecin s’est quant à lui entendu dire cette semaine par une directrice d’école parisienne que ses enfants seraient mis à l’écart. Depuis, ces parents, choqués, ne décolèrent pas. «Les enfants de soignants sont stigmatisés et discriminés avec des mesures drastiques de distanciation sociale avec les autres élèves qui sont disproportionnées. En l’absence de symptômes, ils n’ont aucune raison de subir une éviction de leur classe et aucune étude ne permet d’affirmer qu’ils sont plus transmetteurs du coronavirus que les autres enfants accueillis», argumente Lamia Kerdjana, présidente de Jeunes Médecins Île-de-France et anesthésiste-réanimatrice. Elle craint que ces tentatives d’éviction ne fassent tache d’huile. La France applaudit les médecins tous les soirs à 20 heures car ils mettent leur santé et celle de leur famille en danger mais leurs enfants ne doivent «surtout pas être mêlés au reste de la population»…

Organisation «quasi militaire»

Certes, quelque 30.000 enfants de soignants ont été accueillis pendant le confinement par l’Éducation nationale mais dans des conditions proches d’une simple garderie, sans enseignement, «devant rattraper avec leurs parents souvent épuisés le programme que les autres élèves faisaient au fil de l’eau», regrette-t-elle. «Est-on revenu au temps des léproseries alors que ce sont des enfants sains?»

Le Syndicat national des infirmiers-anesthésistes a envoyé une lettre au ministre: «La note toulousaine est un message catastrophique envoyé à l’ensemble de la population française et notamment aux camarades de nos enfants: certains élèves français ne sont plus fréquentables. Cette décision qui semble plus être guidée par la peur irrationnelle et l’approximation que par des arguments scientifiques éclairés ou éthiques va à l’encontre des valeurs républicaines de fraternité et d’égalité», souligne son président, Christophe Paysan.

Le ministère de l’Éducation nationale dément quant à lui toute volonté de mettre à part ces élèves et évoque des «surinterprétations locales du protocole sanitaire déjà réglées par les recteurs de Nice et de Toulouse». Le syndicat des jeunes médecins a néanmoins déposé lundi un appel en référé-liberté à l’encontre d’une réponse toulousaine jugée encore «peu claire». «Au-delà de nos enfants, je m’inquiète pour tous les élèves, ajoute Lamia Kerdjana, car le protocole sanitaire est excessif. Certaines écoles interdisent aux enfants de bouger de leur place. C’est quasi militaire! Il faut dédramatiser la situation. Les pédopsychiatres sont inquiets de ce que les adultes font subir aux élèves. Normalement, si on se lave les mains régulièrement et qu’on évite de se toucher le visage, ça suffit!»

Source LE FIGARO.

 

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