Dans le Sénonais, des femmes en situation de handicap témoignent : « C’est épuisant de toujours prouver qu’on est capable »…

Elles sont âgées de 27 à 58 ans, ces quatre femmes sont en situation de handicap.

Un fait qu’elles acceptent, mais régulièrement elles se heurtent à des difficultés qui paraissent anecdotiques aux yeux d’une personne valide.

Dans le Sénonais, des femmes en situation de handicap témoignent : "C’est épuisant de toujours prouver qu’on est capable"

 

Elles papotent de tout et de rien, comme n’importe quelle bande d’amies. Mais ces quatre femmes ne sont pas comme n’importe qui, Françoise est mal-voyante, Alison a complètement perdu la vue alors que Géraldine et Marie (*) sont paraplégiques. Ces quatre femmes ont une vie bien remplie : sport, enfants, vies associative et professionnelle sont au coeur de leurs préoccupations. Pourtant, quand on est une femme en situation de handicap, il y a des gestes quotidiens plus difficiles à effectuer.

Des difficultés liées à l’autonomie

Elles sont coquettes ces femmes, pourtant faire les boutiques quand on ne voit pas ou quand on est en fauteuil s’avère être un véritable défi. « Dans les petites boutiques, je demande de l’aide aux vendeuses pour lire les étiquettes de prix ou de taille, mais dans les grands centres commerciaux je n’y vais pas car je m’y perds et il m’arrive de prendre les miroirs pour des portes de sortie », sourit Françoise, atteinte de déficience visuelle. Alison, devenue complètement non-voyante il y a quelques années, ne peut y aller seule. Alors elle demande à sa belle-mère ou à ses amies de l’accompagner.

Dans le Sénonais, des femmes en situation de handicap témoignent : "C’est épuisant de toujours prouver qu’on est capable"

Marie se rend à Troyes pour faire les magasins. « C’est plus facile d’accès que les boutiques du centre-ville de Sens. » Parfois, ces sorties se compliquent à cause de certaines réflexions… « Les gens me demandent pourquoi j’achète des chaussures alors que je ne marche pas », raconte Géraldine. Mais pas de quoi décontenancer ces femmes, sûres d’elles. « L’important, c’est ce que tu dégages, l’image que tu renvoies de toi », confie Françoise. Une force de caractère qui définit très bien Marie, qui a refait sa vie après son divorce.

« Je disais d’emblée que j’étais en fauteuil, une personne avec qui je discutais m’a envoyé le lien d’un site de rencontres pour personnes en situation de handicap, je lui ai répondu que c’était dommage qu’il n’en existe pas pour les abrutis comme lui ! »

Alison a tenté de se maquiller un peu pour la rencontre, mais c’est exceptionnel. « Moi, je suis une vraie fille, je vais à l’onglerie de temps en temps pour faire poser du vernis », assure Françoise. Mais les problèmes rencontrés à propos de l’autonomie reviennent vite dans la discussion. « J’essaye d’en faire le maximum seule mais il y a des moments où ce n’est pas simple, notamment pour se déplacer », assure la quinquagénaire. Quant à Marie, elle assume pleinement son autonomie. « Après le divorce, j’ai eu la garde alternée de mes enfants et tout s’est très bien passé, je fais beaucoup de choses seule. »

Dans le Sénonais, des femmes en situation de handicap témoignent : "C’est épuisant de toujours prouver qu’on est capable"

Se battre contre les préjugés

Les quatre femmes n’ont pas seulement le sport en commun, elles sont aussi des mamans. Chacune a du faire face aux craintes de la famille ou des proches à l’annonce de ce désir de maternité.

« Mon mari est également déficient visuel, donc on est allé voir trois généticiens pour savoir si l’enfant risquait de développer des problèmes de vue et ce n’est pas le cas. Mais certains membres de famille m’ont fait part de leur inquiétude, alors que je savais m’occuper d’enfants ! »

Françoise (Malvoyante depuis sa naissance)

Alison n’a pas eu de souci lors de sa grossesse, car elle était encore valide. Mais c’est ensuite que les questions sont arrivées. « Je me dis que je ne suis pas capable de faire les choses, alors que c’est le cas. » Sa copine Françoise complète, « c’est épuisant de toujours prouver qu’on est capable. Ce n’est pas parce qu’on est en situation de handicap et des femmes qu’on ne peut pas faire aussi bien voire mieux ».

Dans le Sénonais, des femmes en situation de handicap témoignent : "C’est épuisant de toujours prouver qu’on est capable"

Car leurs enfants ont été sensibilisé dès leur plus jeune âge à la fragilité de leurs mères. « Ce sont des enfants très prévenants, ils se rendent compte des difficultés qu’on rencontre et nous indiquent ce qui nous attend », souligne Géraldine. Ce qui n’exclut pas non plus les grands moments de complicité entre ces mères et leurs enfants. « Quand ma fille reçoit un nouveau jouet, elle me le fait toucher pour que je comprenne ce que c’est », détaille Alison.

Dans le Sénonais, des femmes en situation de handicap témoignent : "C’est épuisant de toujours prouver qu’on est capable"

A contrario, Marie ne demande pas d’aide à ses enfants dans la vie de tous les jours. « Je reste toujours la même personne et je ne veux pas qu’ils m’aident. » Car, contrairement à Françoise ou Géraldine, Marie est devenue handicapée suite à un accident de la route. Elle était déjà maman à ce moment là. « Ça a été compliqué d’assurer à ma belle-famille que j’y arriverai donc j’ai fini par demandé le divorce », souligne-t-elle. Mais elle n’a pourtant aucun regret.

Je ne sais pas si j’aurais fait autant de choses en étant valide.

Ces quatre femmes ont donc décidé de mordre la vie à pleines dents. « Puis, ça permet de combattre le préjugé des personnes en situation de handicap qui ne font rien de leurs journées ! », assure Françoise. D’ailleurs, la rencontre doit toucher à sa fin car Alison doit aller récupérer sa fille à l’école, son quotidien l’a (déjà) rattrapée.

(*) Marie est un prénom d’emprunt afin de préserver l’anonymat de cette personne.

Source L’YONNE REPUBLICAINE.

 

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