Covid: la forte mortalité dans les Ehpad aggravée par le manque de personnel, selon la Cour des comptes…

34.000 personnes sont décédées du fait de la pandémie entre mars 2020 et mars 2021.

Une mortalité importante qui révélait, avant même le scandale Orpea, des difficultés structurelles du secteur.

L'âge moyen des résidents en Ehpad était de 86 ans et six mois en 2015.

Sur les 600.000 personnes résidant dans l’un des 7500 établissements pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), près de 34.000 sont décédées du fait de la pandémie entre mars 2020 et mars 2021. Un lourd bilan humain qui ne s’explique pas uniquement par la fragilité des résidents, estime la Cour des comptes dans son rapport annuel 2022 publié mercredi, mais résulte également de difficultés structurelles. On peut en lister au moins trois.

D’une part, alors que les personnes accueillies sont de plus en plus âgées – la proportion des plus de 90 ans est passée de 29% à 35% entre 2015 et 2019 -, les médecins représentent moins de 1% des 377.000 équivalents temps plein que comptent les Ehpad. Si tous les établissements doivent normalement disposer d’un médecin coordonnateur, 32% n’en déclaraient aucun en 2015, et un quart fonctionnait avec des temps de présence inférieurs aux seuils.

D’autre part, les établissements font face à de fortes tensions sur le personnel, qui ont pénalisé la qualité de la prise en charge. Le taux d’absentéisme se situait en 2019 autour de 20%, selon la Cour, et l’instabilité des équipes rend difficile la formation et la montée en compétences du personnel.

Ainsi, la rotation annuelle des infirmiers était montée jusqu’à 83 % en 2017 dans l’Ehpad de La Filature à Mulhouse. À l’Ehpad Maison bleue de Villeneuve-lez-Avignon, en 2019, près de 159 personnes distinctes travaillant le jour se sont succédé, pour un effectif théorique de 40 personnes – avec un taux de rotation de 50 % pour les infirmiers et de 38 % pour les aides-soignants. Compte tenu des difficultés à recruter des aides-soignants, nombre d’entre eux sont remplacés par des personnels «faisant fonction» d’aides-soignants, bien qu’ils ne disposent pas des diplômes nécessaires.

Enfin, les bâtiments sont parfois inadaptés. Ainsi, 15% des Ehpad sont installés dans des bâtiments de plus de trente ans et leur configuration architecturale n’a pas toujours permis la mise en place de zones Covid-19 séparées, ni l’isolement des résidents atteints par la maladie. Seuls 45 % des Ehpad sont à même de ne proposer que des chambres individuelles, affirme la Cour. Enfin, à l’exception de ceux faisant partie d’établissements de santé, ils ne sont pas équipés de systèmes de distribution de gaz médicaux, notamment d’oxygène.

Face à la crise, les pouvoirs publics ont consenti «un effort financier pérenne considérable» souligne la Cour: compensation des pertes de recettes, couverture des dépenses liées à la pandémie, prise en charge par l’Assurance maladie (soit 1,7 milliard d’euros en 2020) de la «prime Covid» allouée aux personnels, revalorisations salariales du «Ségur de la Santé» allant de 10% à 15% (soit un coût de plus de 2,2 milliards d’euros en 2022). À cela s’ajoutent des investissements importants pour la rénovation de l’immobilier (1,5 milliard sur 4 ans) et le numérique (600 millions d’euros).

Au-delà de cet effort financier pour renforcer l’attractivité des métiers, il convient encore d’améliorer les conditions de travail des personnels: formation, évolution des carrières, prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles etc. D’autre part, il faut éviter les Ehpad isolés et pour cela favoriser leur insertion dans un réseau : adossement à un hôpital ou à un groupe, afin de permettre une mutualisation des ressources.

Source LE FIGARO.

POINT DE VUE. Handicap : « Pour une politique volontariste »…

Vingt et une associations du réseau national Unapei (fédération française d’associations de représentation et de défense des intérêts des personnes handicapées mentales et de leurs familles) signent une lettre ouverte pour « alerter sur une crise sans précédent. »

Douze millions de personnes sont porteuses d’un handicap en France, autant d’aidants familiaux et des centaines de milliers de professionnels de l’accompagnement.

 

« Monsieur le Président, nous réclamons des actes forts et immédiats ! Les 21 associations signataires de cette lettre ouverte, membres du réseau national Unapei (Fédération française d’associations de représentation et de défense des intérêts des personnes handicapées mentales et de leurs familles), formulent une alerte sur une crise sans précédent. Nous sommes 80 000 personnes accompagnées, proches, aidants, adhérents et professionnels. Nous réclamons des actes immédiats du gouvernement et à venir des engagements forts des candidats aux élections présidentielles et législatives.

« Un retour en arrière de 60 ans pour notre pays »

Trop de professionnels médico-sociaux et sociaux ne sont pas reconnus à la hauteur de leurs compétences et de leur engagement. Épuisés, paupérisés, ils quittent ce secteur pour lequel ils se sont engagés. Trop de personnes en situation de handicap sont mises en danger, privées de soins et d’activités essentielles à leur vie. Leurs droits fondamentaux, déjà peu respectés en temps normal, sont totalement bafoués. Trop de parents, de grands-parents, de sœurs, de frères, sont abandonnés par la société.

Ils sacrifient leurs vies personnelles et professionnelles pour s’occuper de leur proche en situation de handicap. C’est un retour en arrière de 60 ans pour notre pays ! Nous sommes plus que jamais oubliés et ignorés par les pouvoirs publics. En France, plusieurs millions de personnes en situation de handicap, de familles, de proches, d’aidants, de professionnels du social et du médico-social se sentent abandonnées, déconsidérées et désespérées.

Appliquer la revalorisation salariale prévue par le Ségur

La pétition du réseau Unapei, lancée en octobre 2021, est soutenue par plus de 80 000 signataires à ce jour. Cependant, l’État reste immobile et la situation s’aggrave tous les jours. L’hémorragie des professionnels médico-sociaux se poursuit inexorablement, avec pour corollaire de nombreuses personnes en situation de handicap en ruptures d’accompagnement ou subissant des restrictions d’activités essentielles à leur vie quotidienne. De nombreuses familles sont au bord de l’épuisement, inconsidérées. La revalorisation salariale prévue par le Ségur de la Santé pour les professionnels de santé, doit bénéficier sans délai à tous les professionnels sociaux et médico-sociaux en lien avec les personnes en situation de handicap. Tous les métiers doivent être revalorisés, sans restriction, sans conditionnement et avec une totale égalité de traitement.

Si nous espérons que cette mesure de justice sociale enrayera à court terme la crise, une vision d’une société solidaire et inclusive, et une politique volontariste s’avèrent indispensables compte tenu des attentes et besoins des Français en situation de handicap et de leurs proches. Les candidats à l’élection présidentielle doivent s’engager pour ces citoyens oubliés. 12 millions de personnes sont porteuses d’un handicap en France, autant d’aidants familiaux et des centaines de milliers de professionnels de l’accompagnement.

Signataires : Christian Vincent, président de l’Adapei-Nouvelles Côtes-d’Armor ; Frédéric Soudon, président Papillons Blancs du Finistère ; Catherine Lechevalier, présidente Adapei Ille-et-Vilaine ; Isabelle Hillion, présidente Association Sévigné ; Nelly Allanic, Présidente Association Notre Avenir ; Sophie Biette, Présidente Adapei Loire-Atlantique ; Sylvie Beauce, Présidente APEI Ouest 44 ; Jacques Fillonneau, Président ATIMP 44 ; Marie-Hélène Chautard, Adapei Maine-et-Loire ; Jacques Mariel, Président HandiCap’Anjou ; François De Sauveboeuf, présidents APAHRC ; Martine Evrard, Présidente Adapei Mayenne ; Annick Desmons, Présidente ATMP 53 ; Monique Doudard, Présidente EKLA (Apei Nord Mayenne) ; Armand Eichler, président Adapei Morbihan : Sandrine Guérard, Présidente Adapei de la Sarthe ; Odile Beauvoir, Présidente APEI Sablé Solesmes ; Philippe-Marie Durand, Président Adapei-Aria de Vendée ; Françoise Malette, Présidente ATHM de Vendée ; Florence Fourmont, présidente Unapei Pays de la Loire ; Jack Meunier, président Unapei Bretagne.

Source OUEST FRANCE.

« Six centimes d’augmentation en dix ans » : les travailleurs sociaux du Calvados crient leur colère…

Ils se surnomment les « invisibles ». Les salariés du secteur de l’action sociale se sont rassemblés ce lundi midi devant les locaux de l’institut régional du travail social à Hérouville-saint-Clair près de Caen.

Ils dénoncent une baisse de leur pouvoir d’achat et des conditions de travail dégradées.

Une centaine de salarié.es du secteur social du Calvados se sont rassemblé.es devant le siège de l'Institut régional du travail social à Hérouville-saint-Clair.

 

Éducateurs spécialisés, aides soignants… ils travaillent auprès de personnes handicapées ou de jeunes en rupture familiale. Dans le département du Calvados, cela représente plus de 5000 salarié.es. Un métier dur, éprouvant et qui ne cesse de se dégrader, selon les syndicats qui appelaient à la mobilisation. Une centaine de personnes se sont rassemblées à la mi journée devant le siège de l’IRTS, l’institut régional du travail social, à Hérouville-saint-Clair. La CGT, FO et Sud dénoncent une baisse de 30% du pouvoir d’achat en 20 ans.

Beaucoup de travailleurs pauvres parmi les salariés du secteur social

Aurélien Syren est délégué CGT à l’Oeuvre Notre Dame, foyer de protection de l’enfance à Troarn. « C’est un secteur où les temps partiels sont légions, et quand on est à 70% du SMIC, on se retrouve dans la catégorie des travailleurs pauvres » dénonce-t-il.Selon les syndicats, ces dégradations ne sont pas uniquement liées aux politiques nationales. « Elles sont aussi le fait du Syndicat Employeur du secteur« . Une délégation a été reçue par la direction.

« Les travailleurs sociaux ont du mal à se mobiliser pour dénoncer leur propre situation »

Dehors devant un brasero, la colère gronde. Frédéric Motel est éducateur spécialisé à l’institut de Démouville. Il s’occupe de jeunes en difficulté. « Ce n’est pas évident pour nous de débrayer, car on ne veut pas laisser ces jeunes » s’excuse-t-il. Mais face à des salaires bloqués depuis des années, il tenait à venir manifester. « Six centimes d’augmentation en 10 ans c’est scandaleux ! » s’emporte-t-il. Il dénonce aussi un secteur de plus en plus soumis aux contraintes administratives, « alors que notre cœur de métier c’est l’humain« .

Sylvie Ledunois est elle venue avec ses collègues du foyer de vie de l’ACSEA à Saint-Loup-Hors, près de Bayeux. « Je travaille dans ce secteur depuis 37 ans et j’ai vu les conditions de travail se dégrader » raconte cette aide-soignante. Et elle ne comprend pas qu’elle et ses collègues aient été exclus du Ségur de la santé. « Nous avons fait face à la pandémie, il y a eu un cluster dans notre foyer avec neuf cas positifs, et nous avons dû nous battre pour avoir la prime ! Alors que les personnes dont nous nous occupons sont dépendantes et que nous leur prodiguons des soins, c’est anormal. »

Source FRANCE BLEU.

Handicap : les oubliés du Ségur demandent à bénéficier des revalorisations salariales…

Les établissements pour personnes handicapées risquent de graves problèmes d’effectifs si le secteur ne bénéficie pas à son tour de la revalorisation salariale octroyée aux personnels des Ehpad et des hôpitaux dans le cadre du « Ségur de la Santé », se sont alarmées lundi les principales fédérations du secteur privé non lucratif.

Les établissements pour personnes handicapées risquent de graves problèmes d’effectifs si le secteur ne bénéficie pas à son tour de la revalorisation salariale octroyée aux personnels des Ehpad et des hôpitaux dans le cadre du «Ségur de la Santé». (Photo archives Matthieu Botte / La Voix du Nord)

 

Dans les structures privées accueillant des personnes handicapées, mais aussi des publics précaires ou des mineurs en difficulté, « la colère monte » et les salariés « ont le sentiment d’être humiliés et discriminés », a expliqué lors d’une conférence de presse Alain Raoul, président de Nexem, une organisation qui regroupe des employeurs associatifs du secteur médico-social.

En conséquence, certains « cherchent à aller ailleurs, dans des structures où les salaires ont été revalorisés ».

Les accords dits du « Ségur de la Santé », conclus l’été dernier, prévoient une augmentation de 183 € nets mensuels pour l’ensemble des personnels des hôpitaux et des maisons de retraite (publics et privés non lucratifs). Mais les établissements sociaux et médico-sociaux autres que les Ehpad ont été laissés de côté.

Les soignants migrent vers l’hôpital public

Des négociations sont en cours avec le gouvernement pour combler ce manque. Elles sont sur le point d’aboutir en ce qui concerne le secteur public, mais un accord semble encore loin pour le privé à but non lucratif, qui pèse pourtant 75 % du secteur, a déploré lundi Marie-Sophie Desaulle, présidente de la Fehap, une autre organisation professionnelle.

« Nous voulons une revalorisation pour tout le monde et dans le même calendrier que le secteur public », a-t-elle martelé.

En attendant, la situation est très préoccupante dans certaines structures : « À Paris, dans un de nos établissements accueillant des personnes avec un handicap lourd, 30 % des soignants sont partis », notamment à l’hôpital public où les salaires ont été augmentés, a déploré M. Raoul.

« Certaines offres ne débouchent sur aucune candidature »

Il faudrait 1,9 milliard d’euros par an pour élargir aux quelque 600 000 salariés du secteur les avantages salariaux du « Ségur », mais cette somme « doit être relativisée, elle n’est pas si élevée quand on la compare au plan de relance, par exemple », a argué Jean-Christophe Combe, directeur général de la Croix-Rouge française.

En janvier, la Fédération Paralysie cérébrale, qui gère 128 établissements pour personnes handicapées, s’était déjà publiquement inquiétée de graves problèmes de recrutement, en soulignant que le « Ségur » avait « exacerbé les difficultés ».

« Certaines offres d’emploi ne débouchent sur aucune candidature. C’est un défi du quotidien pour garantir un minimum de qualité dans nos accompagnements », avait expliqué cette fondation.

Source LA VOIX DU NORD.