Bien vieillir à domicile : La dépendance des personnes âgées, un enjeu de société. Le viager solidaire peut être une solution…

Après l’onde de choc provoquée par la publication d’un livre dénonçant de graves défaillances dans les établissements privés du groupe Orpea, le débat sur la prise en charge des personnes âgées est relancé.

Le viager solidaire fait partie des pistes de réflexion pour favoriser le maintien à domicile.

Comment mieux vieillir chez soi ? Le viager solidaire peut être une solution.

 

Avec l’allongement de la durée de vie, la dépendance est devenue un enjeu sociétal majeur. Une grande majorité des personnes âgées préfèrent vieillir chez elles plutôt qu’en maison de retraite. Le viager solidaire fait partie des solutions pour aider ce maintien à domicile.

Le viager solidaire, un modèle « d’utilité collective »

Dans la région lyonnaise, la SCIC (Société coopérative d’intérêt collectif) Les 3 Colonnes  propose un autre modèle de propriété. Lors que l’on sait qu’en France , plus de 70% des personnes âgées sont propriétaires de leur logement, certaines percevant des pensions modestes, et qu’elles désirent en grande majorité y rester jusqu’à leur dernier souffle, la structure s’est donnée des «objectifs humanistes».

Ce système est basé sur le modèle économique suivant : la coopérative rachète des logements occupés par les bénéficiaires, appelés des «crédirentiers». En compensation, ceux-ci reçoivent une fraction du prix total du logement ainsi qu’un «loyer» mensuel. Lorsque survient le décès de la personne âgée, la coopérative peut revendre le bien ou bien le mettre en location. Elle finance ainsi la propriété à travers une rente et un capital et laisse l’usage toute la vie restante à l’occupant.

La coopérative défend un modèle « de financement équitable et vertueux » , qui « permet aux financeurs d’agir de façon rationnelle et permet de procurer une source de revenus indispensable à bon nombre de personnes vieillissantes aux ressources insuffisantes. »

Selon cette société coopérative, pour maintenir un système de protection décent « il n’y a pas tellement d’autre alternative que d’accroître la richesse produite via le nombre d’actifs« . Une forme de fiscalité participative qui s’inscrit dans une nouvelle forme de modèle économique.

« Les 3 colonnes » compte aujourd’hui plus de 250 bénéficiaires et plus de 4000 financeurs.

La dépendance des aînés, enjeu politique

La publication du livre « Les Fossoyeurs », qui décrit un système où les soins d’hygiène, la prise en charge médicale, voire les repas des résidents des Ehpad gérés par la société Orpea sont « rationnés » pour améliorer la rentabilité du  groupe, a suscité une véritable onde de choc. Ces révélations entraînent de nombreuses réactions, notamment dans la sphère politique.

A l’instar de la candidate LR à la présidentielle Valérie Pécresse, qui a appelé à « radicalement changer le modèle des Ehpad », avec notamment un « référentiel » applicable au public et au privé, le député de l’Ain Damien Abad (patron des Républicains), évoque la nécessité de tenir des états généraux de la dépendance.

Les conditions de vie quotidienne doivent être « strictement contrôlées » selon le vice-président du département aindinois. Par ailleurs, la ministre déléguée chargée de l’Autonomie des personnes âgées, Brigitte Bourguignon, a convoqué le directeur général d’Orpea, Jean-Christophe Romersi, le 1er février pour « répondre » aux « accusations graves » concernant les pratiques du groupe dans ses Ehpad.

Source FR3.

TEMOIGNAGE : » Qu’ils soient publics ou privés, les EHPAD, il n’y en a pas un qui rattrape l’autre » selon la fille d’une résidente dans le Var…

Victor Castanet, auteur du livre-enquête Les Fossoyeurs, a causé une déflagration en dénonçant la maltraitance dans les EHPAD privés et les langues se délient.

La fille d’une résidente raconte son parcours du combattant pour faire valoir les droits de sa mère.

Monique a séjourné dans trois Ehpad du Var, sa fille pointe du doigt des dysfonctionnements. Image d'illustration.

 

Elle s’appelle Céline. Une jeune femme de 37 ans, varoise, juriste reconvertie en aide à domicile et accompagnante psychocorporelle. Elle livre son témoignage, forcément douloureux.

Sa mère, Monique, 77 ans aujourd’hui, souffre de la maladie d’Alzheimer. Le diagnostic est posé il y a une dizaine d’années. Elle a aussi des problèmes cardiaques, elle vit alors en région parisienne. Nous sommes en 2013. Elle changera de lieu de vie pour déménager près de sa fille, dans une résidence service, ces appartements conçus pour des personnes âgées autonomes qui veulent continuer à vivre de manière indépendante tout en bénéficiant d’un environnement sécurisé.

3 EHPAD, et à chaque fois les mêmes difficultés

C’est en 2016 que mère et fille conviennent qu’un hébergement un EHPAD est le plus adapté. Ce sera dans un établissement public du centre Var. Monique y restera un peu plus de deux ans.

« Je fais confiance au départ, mais je vois rapidement les capacités cognitives et la motricité de ma mère diminuer, il y a de grosses difficultés de communication avec les équipes, ma mère est victime d’agressions verbales et de menaces de la part d’un autre pensionnaire, mes mails restent sans réponse… »

Céline, fille d’une résidente

Céline, qui veut le mieux pour sa mère, fait venir des intervenants extérieurs pour la stimuler, et elle évoque la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale. Elle impose la création d‘un projet d’accompagnement personnalisé dans les 6 mois suivant l’arrivée du pensionnaire.

« Le rôle des professionnels consiste, entre autres, à écouter, à entendre et/ou à aider la personne accueillie, à exprimer ses attentes et, si elle le désire, construire, avec elle, le cadre d’un accueil et d’un accompagnement singulier. L’ensemble des professionnels va devoir mettre en œuvre le projet personnalisé pour proposer un accompagnement de qualité respectueux et adapté à la singularité de chaque résident ».

Et le projet d’accompagnement, c’est-à-dire un projet personnalisé « feuille de route » pour les équipes médicales, elle explique qu’elle l’attend toujours. Elle constatera que sa mère prend alors au long cours un puissant neuroleptique prescrit par le médecin coordonnateur de l’établissement. Il ne correspond en rien aux ordonnances du médecin traitant. Elle enverra des courriers à l’ARS (Agence Régionale de Santé) et à l’Ordre des médecins. L’ARS reconnaîtra un « dysfonctionnement dans le circuit du médicament ».

Une éventration qui serait due à une malnutrition

Deuxième EHPAD, même constat. Nous sommes en janvier 2020 dans un établissement privé d’un grand groupe cette fois dans le centre Var. Là encore, pour Monique, pas de projet d’accompagnement, peu ou pas de dialogue avec la direction pour faire venir des intervenants extérieurs (kinésiologue, art thérapeute, sophrologue) et une très mauvaise nouvelle : elle souffre d’une éventration observée quand elle partira 11 mois plus tard, conséquence, selon son médecin traitant, d’une fonte musculaire suite à une malnutrition.

Désormais, depuis avril 2021, Monique réside dans un EHPAD privé familial. Cette fois encore, Céline constate qu’on donne à sa mère des médicaments sans l’informer et sans être en lien avec le médecin traitant. Une ergothérapeute qui veut rester anonyme intervient ponctuellement dans l’établissement car Monique, comme tous les patients Alzheimer, a besoin de stimulation pour la mémoire et les repères spatio-temporels.

« On parle de stimulation, d’autonomie. Or tout est fait pour que la personne ne progresse pas mais régresse. Il faut aller vite pour les repas, on confine Monique dans des espaces sécurisés, ce qui lui fait perdre encore plus d’autonomie. Il y a la maladie, certes, mais il y a aussi une perte importante dans la qualité de vie. »

Une ergothérapeute

 

Il n’y en a pas un qui rattrape l’autre

Conclusion : trois EHPAD, et beaucoup de dysfonctionnements.

« Le pire ? C’est le refus de faire les choses correctement. J’envoie les articles de loi sur les obligations des établissements, je leur demande juste de faire leur boulot. Il y a un manque de prise de responsabilité. Le projet d’accompagnement, ça date d’il y a 20 ans, ils ne savent pas ce que c’est. »

Céline, fille d’une résidente

Quant au coût, il va du simple au double,  entre 1700 et 3470 euros.

« On se sent impuissant, franchement. On a l’impression qu’on est juste bon à payer, et ce n’est pas parce que c’est plus cher que c’est mieux. »

Céline, fille d’une résidente

Céline l’affirme, elle ne désespère pas de trouver la perle rare. Un établissement où le dialogue serait ouvert. Pour établir un vrai projet pour sa mère, pour qu’elle conserve son autonomie, sa motricité et sa joie de vivre le plus longtemps possible.

Source FR3.

Ehpad : deux aides-soignantes portent plainte contre Orpea pour «faux et usage de faux»…

Le groupe est dans la tourmente depuis les révélations du livre Les Fossoyeurs, qui jette une lumière crue sur les maltraitances au sein des Ehpad privés.

Une troisième aide-soignante pourrait également déposer plainte dans les jours qui viennent.

 

Les attaques en justice contre Orpea s’amoncellent. Deux aides-soignantes ont déposé une plainte pour «faux et usage de faux» contre le leader mondial des Ehpad et des cliniques privés, révèle ce mardi franceinfo. Les deux femmes ne travaillaient pas pour le groupe, mais l’accusent d’avoir utilisé leurs noms pour multiplier des embauches abusives en CDD, d’après nos confrères. Concrètement, Orpea se servait des deux plaignantes, présentées comme étant en CDI, pour recourir à des CDD de remplacement.

L’avocate des deux aides-soignantes, Sylvia Lasfargeas, estime auprès de franceinfo que le groupe utilisait ses clientes «afin de contourner la loi et de maquiller des recours semble-t-il abusifs aux CDD». De son côté, Orpea se dédouane, assurant «qu’il n’y a jamais eu d’emploi fictif» ni de «faux contrat de travail». En attendant, une troisième aide-soignante devrait déposer plainte dans les jours qui viennent.

Enquête administrative, plaintes…

Depuis la parution du livre Les Fossoyeurs, du journaliste Victor Castanet, le groupe Orpea est dans la tourmente. Le gouvernement a annoncé l’ouverture d’une enquête administrative, confiée conjointement aux inspections générales des affaires sociales (IGAS) et des finances (IGF). Les conclusions de cette mission devront faire l’objet d’un «rapport définitif» le 14 mars, ont précisé les ministres Olivier Dussopt (Comptes publics), Olivier Véran, Élisabeth Borne et Brigitte Bourguignon (déléguée à l’Autonomie) dans une note transmise vendredi à l’AFP.

La CGT, la CFDT et FO ont également indiqué qu’elles comptaient porter plainte contre Orpea, qu’elles accusent de «discrimination syndicale» et de s’être appuyé sur un syndicat «maison» à ses ordres. «Nous avions depuis longtemps des soupçons sur des agissements inacceptables de la direction, mais les témoignages et les preuves apportés par le livre de Victor Castanet vont nous permettre d’agir en justice», a expliqué à l’AFP Guillaume Gobet, responsable CGT et ancien cuisinier à Orpea.

La plainte, qui doit être déposée avant la fin du mois, pourrait viser des chefs de «discrimination syndicale» et «d’entrave à l’activité syndicale», a précisé Guylain Cabantou, un autre responsable de la CGT. Une autre piste envisagée est une plainte pour harcèlement, dont auraient été victimes les élus CGT de la part de la direction, a indiqué de son côté Me Apolline Cagnat, l’avocate en charge du dossier au pénal.

Source LE FIGARO.

Décès à l’Ehpad de Lherm : « ll y a une chape de plomb, il faut faire bouger les choses » pour les familles de victimes…

INTOXICATION – Alors que les plaintes se multiplient contre les groupes privés gestionnaires d’Ehpad, les familles des victimes de l’établissement de Lherm, décédées après une intoxication, dénoncent les manques de moyen et attendent toujours un procès.

Décès à l’Ehpad de Lherm : « ll y a une chape de plomb, il faut faire bouger les choses » pour les familles de victimes

 

  • Depuis la sortie du livre Les Fossoyeurs, les plaintes de familles se multiplient pour dénoncer la maltraitance des aînés dans certaines maisons de retraite privilégiant la rentabilité aux dépens de l’humain.
  • Dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2019, cinq pensionnaires de l’Ehpad la Chêneraie décédaient à cause d’une intoxication alimentaire.
  • Les familles des victimes, qui attendent toujours un procès, dénoncent des dysfonctionnements dans l’établissement, qui seraient dus notamment à des économies.

« Maintenant ça fait trois ans, on aimerait que le procès arrive vite. On en a marre. Ce qu’on entend dans les médias, ça nous fait remonter la haine », reconnaît Alain Lapeyre. Cet habitant de Saubens, au sud de Toulouse, a perdu sa maman Antoinette dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2019, décédée comme quatre autres pensionnaires de l’Ehpad de la Chêneraie, au Lherm, d’une intoxication.

L’enquête judiciaire ouverte par le parquet de Toulouse pour « homicides involontaires aggravés, blessures involontaires aggravées, mise en danger de la vie d’autrui » avait rapidement pointé des manquements aux règles d’hygiène, notamment sur la propreté d’un mixeur.

Mais elle a aussi révélé d’autres dysfonctionnements dans cet établissement racheté deux mois plus tôt par le groupe Korian. En particulier la rupture de la chaîne du froid, mais aussi du chaud. Pour monter dans les chambres, les plats sont placés dans un meuble-casier, appelé « échelle », afin de les conserver à une certaine chaleur et éviter que les bactéries ne se développent.

Un collectif de victimes s’est monté

Mais celui de la résidence de La Chêneraie ne fonctionnait pas. Au grand dam des membres du personnel qui avait demandé son remplacement. « C’est ce que nous a appris l’enquête. Les services de l’hygiène étaient passés trois semaines ou un mois avant que le drame se produise. Les thermomètres étaient cassés, rien n’était respecté. Il y avait eu une mise en garde, mais lorsque les décès sont survenus, rien n’avait été fait. Les thermomètres n’étaient pas remis, les repas étaient servis froids », déplore Alain Lapeyre.

A côté de lui, Alexandra Bernard, qui a perdu sa grand-mère Geneviève ce jour-là, ne décolère pas. Avec sa sœur, elle se rendait régulièrement dans la maison de retraite pour voir sa « mamie » et faire en sorte qu’elle mange chaud. « Si les repas sont servis froids en chambre, le temps que ça monte aux étages, comme il n’y a que deux personnes pour 80 résidents, les gens mangent froid et ça prolifère », assure-t-elle. Des bactéries qui ont bien été retrouvées dans les assiettes par la suite.

Un drame qui aurait pu être évité selon elle. « Il y avait un cahier interne pour les demandes du personnel. Il y avait des demandes d’achats qui n’ont pas été faits. Est-ce qu’il y a eu au moment du rachat les entre les deux groupes un laps de temps et de flottement ? », interroge celle qui a monté avec les autres proches un collectif de victimes.

Un audit n’avait « pas montré de dysfonctionnements »

Alain, lui, pense que le changement de propriétaire a eu un réel impact. « J’ai senti qu’au niveau de la maison de retraite, depuis quelque temps ça partait à vau-l’eau, ce n’était plus comme avant depuis le changement de direction. On nous avait aussi dit que c’était fait sur place et on s’est rendu compte que non », critique ce retraité.

En 2019, un porte-parole de Korian avait indiqué à 20 Minutes qu’un ensemble d’audits avait été réalisé par des experts indépendants avant le rachat de la résidence par le groupe et qu’il n’avait « pas montré de dysfonctionnements ».

Des affirmations que les juges d’instruction en charge de ce dossier ont depuis cherché à vérifier. En début d’année dernière, quatre membres de l’établissement avaient été placés en garde à vue. Suivis en mai de l’ancienne directrice du groupe Omega, propriétaire de l’établissement jusqu’en février 2019 avant d’être racheté par Korian.

Depuis, les familles attendent un procès pour répondre à toutes leurs questions. Mais aussi à celles que se posent aujourd’hui de nombreuses familles après les révélations du livre Les Fossoyeurs, qui dénonce un système institué, notamment sur les repas, pour améliorer la profitabilité de ces Ehpad.

« Au Lherm, il n’y avait pas assez de personnel »

« Il y a une chape de plomb. Nos défunts ne reviendront pas, mais pour le futur il faut faire bouger les choses et c’est notre combat depuis trois ans. Dans ces groupes privés, c’est la rentabilité qui prime, on le sait. Il faut tout revoir à la base, et de l’État et des grands groupes privés parce qu’on arrive au bout de quelque chose », plaide Alexandra Bernard qui attend avec impatience un dénouement dans le dossier. Car depuis le 31 mars 2019, elle attend pour faire incinérer sa mamie et faire véritablement son deuil. Son corps est en effet depuis cette date à la disposition de la justice, avec l’aval de la famille qui veut connaître toute la vérité.

Alors quand elle entend ces derniers jours la directrice de Korian dire qu’il a parfois des difficultés à recruter du personnel, elle ne peut s’empêcher de réagir. « Il y a un manque de personnel ? Eh bien payez les plus, ils resteront, motivez-les, ils resteront, donnez leur les moyens, ils resteront dans votre groupe », répond-elle.

Depuis deux semaines, aussi bien Orpea que Korian tentent de déminer le vent de critiques qui visent leur groupe, sur les questions de maltraitance et des moyens déployés pour faire fonctionner leurs nombreuses maisons de retraite. « Je suis assez content que les langues se délient. On a l’a vu dans ce dossier, on privilégie le financier sur l’humain. Au Lherm, il n’y avait pas assez de personnels, pas assez de rotations sur les horaires. Il y a trois ans, Agnès Buzin avait promis que tout serait fait dans les meilleurs délais, les promesses n’engagent que ceux qui les tiennent », tacle Me Nicolas Raynaud de Lage, avocat de l’une des familles de victimes.

Comme les autres parties civiles dans ce dossier, il attend la mise en examen des responsables. « On nous les avait promis à la fin de l’année dernière, on les attend. Aujourd’hui, les manquements sont clairement établis, il n’y a pas de doute sur la chaîne de responsabilité. Les audits les avaient informés sur les problèmes de tel ou tel appareil, et ils sont restés sans réponse », conclut Me Emmanuel Franck qui défend une autre famille.

Affaire Orpea : « Quand j’ai lancé l’alerte sur les Ehpad, Agnès Buzyn n’a pas voulu me recevoir », déplore Hella Kherief…

Bien avant « Les Fossoyeurs », la lanceuse d’alerte Hella Kherief, aide-soignante marseillaise, avait dénoncé les conditions de vie dans les Ehpad. La ministre de la Santé avait refusé de la recevoir à l’époque.

Affaire Orpea : « Quand j'ai lancé l'alerte sur les Ehpad, Agnès Buzyn n'a pas voulu me recevoir », déplore Hella Kherief

 

  • La publication du livre Les Fossoyeurs a déclenché en France une enquête sur les conditions de vie des personnes âgées dans les Ehpad.
  • Une aide-soignante marseillaise, Hella Kherief, lanceuse d’alerte, avait déjà fait le même constat dans un précédent livre paru en 2019.
  • La jeune femme se réjouit de cette médiatisation, tout en rappelant qu’à l’époque, personne au gouvernement n’avait souhaité la recevoir.

Des cadences de travail insoutenables, un manque de matériel, un Ehpad en sous-effectif, et une forme de maltraitance envers les personnes âgées. Le constat d’Hella Kherief, aide-soignante, est accablant, derrière le micro de France Culture. Avec trois autres collègues de la même maison de retraite du groupe Korian, la Marseillaise dénonce pendant de longues minutes les conditions de prise en charge des patients dans les Ehpad.

Nous sommes en… 2016. Six ans plus tard, le livre brûlot Les Fossoyeurs crée en France une véritable controverse avec, en ligne de mire, les conditions de vie des résidents des Ehpad des groupes privés Korian et Orpea. Alors, quand on rappelle Hella Kheriaf, six ans plus tard, l’aide-soignante soupire à l’autre bout du fil. « Je ne suis pas du tout surprise du constat qui est fait, lance la Marseillaise. C’est exactement les mêmes choses que je dis depuis toutes ces années : dans les Ehpad privés, on se fait de l’argent sur le dos des patients et il y a de graves défaillances. Et c’est bien qu’on en parle. Contrairement à moi, le journaliste a eu le temps d’investiguer pendant plusieurs années, et de mettre en lumière tout le système derrière ces Ehpad, notamment financier. »

Un rapide brossage des dents

Licenciée après avoir témoigné à plusieurs reprises dans les médias, Hella Kherief s’est rapidement muée ces dernières années en lanceuse d’alerte sur la maltraitance dans les Ehpad. L’aide-soignante avait notamment fait en 2019 le tour des plateaux de télévision lors de la publication de son livre au vitriol,  Le scandale des EhpadUn témoignage fondé sur son expérience professionnelle au sein des maisons de retraite marseillaises, dans lequel elle rapporte notamment que la toilette des résidents ne se résume parfois qu’à un rapide brossage de dents, par manque de moyens et de temps.

« La sortie de mon livre aura libéré la parole des soignantes, note Hella Khereif. Elle aura aussi permis aux familles d’être plus vigilantes quant à la prise en charge de leurs aînés. Mais à l’époque, aucun politique ne s’est intéressé en profondeur à ce que je dénonçais. On m’invitait sur les plateaux de télévision, on m’écoutait, mais il n’y a pas eu de suite. J’avais demandé à être reçue par Agnès Buzyn. A l’époque, elle était ministre de la Santé. Elle ne m’a jamais reçue : on m’avait dit qu’elle n’avait pas le temps ou qu’elle n’était pas la plus compétente. Aucun politique n’a répondu présent sur ces questions. »

Une nouvelle vie dans le Gard

Et d’accuser : « Si là, ça fait du bruit, c’est parce qu’on a touché au porte-monnaie des riches ! L’Ehpad Les Bords de Seine dont parle le livre, c’est 16.000 euros par mois. » Alors, si elle se réjouit de la médiatisation actuelle autour de ces questions, Hella Kherief reste quelque peu sceptique sur l’issue. « Tout cela arrive pas très longtemps avant les élections présidentielles et législatives, constate l’aide-soignante. Il faut vraiment que tous les politiques réunis mettent en place une loi pour le grand âge, et que ce soit une priorité, pour que tout ce système cesse ! »

En 2020, Hella Kherief a été contrainte de quitter Marseille, pour tenter de retrouver un travail fixe et stable. Direction Alès, dans le Gard. « Je suis blacklistée dans les Bouches-du-Rhône d’avoir dénoncé ce qui se passait dans les Ehpad », regrette-t-elle. Pour autant, l’aide soignante de 32 ans, par ailleurs militante CGT, continue de se battre. Quand on l’appelle ce jour-là, Hella Kherief… est en grève pour dénoncer le manque de moyens de la clinique privée dans laquelle elle travaille. « Si je baisse les bras, ceux qui aimeraient les lever n’oseront plus le faire ! »

Source 20 MINUTES.

Les Ehpad privés, poids lourds de l’économie française…

Dans un livre enquête, le journaliste Victor Castanet met en cause Orpea, géant de l’accueil des personnes âgées qui a dû suspendre sa cotation en Bourse.

Le taux d'encadrement dans les établissements privés commerciaux est inférieur à celui des établissements publics.

 

Tempête dans la «Silver economy». La publication du livre enquête «Les Fossoyeurs» du journaliste Victor Castanet a fait plonger l’action du groupe de maisons de retraite Orpea, ciblé par l’ouvrage. Le cours de l’action dévissait ainsi de 15% à la Bourse de Paris. La veille, la cotation avait été suspendue.

Orpea entraîne dans sa chute d’autres groupes de maisons de retraite cotés en Bourse, comme Korian, qui a vu son titre baisser de 14% lundi, ainsi que LNA Santé (-5,2%). Car l’ouvrage met une nouvelle fois le doigt sur les manquements de certains établissements dans le traitement des personnes âgées. Victor Castanet décrit un troisième âge bridé par le rationnement des produits alimentaires et sanitaires, et mal encadré en raison du manque de personnel.

Encadrement moindre

Selon la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) les 7502 Ehpad français accueillaient, en 2020, 601.300 résidents. 51% sont accueillis dans des établissements publics, 29% dans des établissements privés à but non lucratif et 20% dans des établissements privés commerciaux. Ces derniers ne représentent donc qu’une partie de l’accueil en France, mais ils ont contribué à faire évoluer l’offre vers une «premiumisation», avec davantage d’activités notamment.

Cette évolution tire en revanche les prix vers le haut: alors que le tarif moyen d’une chambre seule en Ehpad est de 2004 euros par mois en France, les tarifs médians dans les établissements privés commerciaux dépassent généralement ce prix car il est librement fixé. Leur médiane se situe donc plutôt autour de 2500 euros, voire 3000 euros dans les métropoles françaises et leur banlieue. Un chiffre à mettre en perspective avec le montant moyen de la pension de retraite en France, qui était de 1393 euros nets en 2019 selon la Drees. Dans certains établissements destinés à une clientèle financièrement à l’aise, les prix peuvent même atteindre 6000 à 7000 euros.

Vieillissement de la population

Malgré ces prix plus élevés, les Ehpad privés commerciaux ont en général un ratio salariés-résidents plus faible que celui des établissements publics. Dans le public, le taux d’encadrement médian est ainsi de 72,1 équivalents temps plein (ETP) pour 100 places en 2018, contre 52,3 ETP dans le secteur privé commercial, moins subventionné. Ça ne l’empêche pas, grâce à ses charges réduites, de dégager des résultats financiers enviables: en 2019, soit avant la crise sanitaire, le chiffre d’affaires de Korian était de 3,612 milliards d’euros. Celui d’Orpea s’établissait à 3,74 milliards d’euros.

Malgré leurs déboires et la préoccupation grandissante du public face aux conditions d’accueil des aînés, les Ehpad privés ont conquis à force d’investissements un rôle moteur dans ce secteur. Ainsi, selon Ilona Delouette, chercheuse à l’université de Lille et auteure d’une thèse sur la prise en charge de la dépendance interrogée par Le Monde, les groupes privés créent désormais «40% des nouvelles places d’accueil». Et ce, alors que la population française ne cesse de vieillir, et que les personnes accueillies dans les maisons de retraite sont de plus en plus dépendantes. Ainsi, en 2040, l’Insee anticipe que 1,2 million de personnes seront dépendantes en France, contre 800.000 actuellement.

Source LE FIGARO.

 

En Haute-Loire, les colocations pour personnes âgées se développent et sont une alternative aux Ehpad…

La Haute-Loire compte désormais une dizaine de colocations pour séniors, retardant d’autant l’entrée dans des structures d’accueil plus médicalisées que sont les Ehpad.

Pourtant l’administration a encore du mal à les reconnaitre et les occupants de ces maisons ne bénéficient pas de toutes les aides financières.

La Maison Buissonnière accueille des personnes âgées seules en colocation.

 

La sortie du livre « Les fossoyeurs » le 26 janvier 2022 dans lequel le journaliste Victor Castanet dénonce les pratiques et dérives mises en place dans certains Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes a mis en exergue la question de l’accueil des séniors. Pour les personnes en perte d’autonomie qui ont besoin d’une prise en charge, c’est une nécessité.

Mais pour celles qui sont dans une période intermédiaire, qui ne peuvent rester seules chez elles mais n’ont pas recours à cet accompagnement médical, la colocation pour séniors est une nouvelle proposition qui connait un certain succès. En deux ans à peine, une dizaine de maisons de ce type a ouvert en Haute-Loire, une des dernières créées se situe en plein centre d’Yssingeaux. Cinq dames âgées de 88 à 93 ans y vivent sous le même toit.

Avant d’être invités à entrer dans la Maison Buissonnière, on croise une des colocataires, Fernande Morisson, qui revient de la boulangerie où elle est allée chercher le pain du jour pour toute la maison : « Là j’ai l’infirmière le matin et après je peux partir, mais il faut être là à l’heure des repas ce qui est tout à fait normal. Ici, tout de suite, ça m’a plu ! ». C’est bientôt l’heure du repas, préparé en commun avec Guillaume Chastel, le maître de maison.

Pourtant il ne déjeunera pas avec les colocataires car il veut que cela reste un moment privilégié qu’elles partagent entre elles : « Elles ne sont pas seules et l’idée c’est qu’on est là pour les aider dans le quotidien, le ménage, le repassage et surtout la nourriture, parce que c’est ce qu’elles aiment, c’est le moment où elles se rassemblent ».

Ne pas rester seules

Elles sont même 6 à table aujourd’hui, il y a Marinette Jardin, une voisine : « Je suis veuve, je mangeais très mal. J’habite juste à côté, à 15 mètres à peine alors on m’a proposé de venir de temps en temps. Moi ça me permet de parler parce que je ne vois personne et ça m’oblige aussi à très bien manger et à m’habiller parce que parfois toute seule, il y avait des jours où je restais en robe de chambre. Et parfois je viens aussi quand il y  a une activité. Ça me fait un bien fou. Je viendrais là dans quelques temps car j’ai des problèmes d’équilibre ».

Quant à Mairie Moulin, elle habite ici depuis 2 ans : « J’étais la première, j’ai vu construire cette maison alors j’ai dit : si j’en ai besoin, j’irai là. Ce n’est pas un hôpital, c’est une petite maison, ça me plaisait. On n’est pas seul c’est sûr, mais ma maison était trop grande ».

Pour Jacques, un de ses neuf enfants : « Pour nous elle ira dans une structure comme un Ehpad que le jour où elle sera obligée d’y aller. Aussi longtemps qu’elle peut l’éviter, elle n’ira pas. C’est vraiment la formule tampon entre rester à la maison et l’obligation de soins quotidiens, contraignants qui sont dans un Ehpad qui feront qu’aussi longtemps qu’elle pourra rester autonome, elle restera dans une structure comme celle-ci et celle-ci lui va très bien ».

Une coloc’ presque comme une autre Guillaume Chastel, qui organise la vie de la maison, assisté par deux salariés. « On fait des colocations étudiantes et bien là c’est des colocations pour personnes âgées et l’intégration des mamies se passe très bien » dit-il. « On a de la demande mais c’est vrai qu’aujourd’hui, on aimerait que ça rentre dans les mœurs c’est à dire que ce n’est pas encore connu de tout le monde. Les personnes pensent essentiellement à l’Ehpad mais c’est vrai qu’entre le domicile et l’Ehpad, il y a encore une petite marge de manœuvre où elles peuvent intégrer une colocation pour séniors comme ici et retarder cette entrée en Ehpad ».

« Elles sont vivantes car elles participent à la vie de la maison »

Guillaume Chastel, maître de la Maison Buissonnière

Précurseur, il constate que la formule connait un réel succès, les colocations pour séniors sont de moins en moins un phénomène anecdotique : « Ça se développe de plus en plus et je trouve ça intéressant, c’est-à-dire c’est un bon compromis avant l’entrée en Ehpad. L’Ehpad, il y en a besoin forcément, mais pour des personnes qui ne peuvent pas rester chez elles, qui ont besoin d’être médicalisées. Ici, elles ont leur infirmière, leur kiné comme si elles étaient chez elles, mais en colocation et partagent la maison. Une grande maison où toutes les pièces sont chauffées plutôt que chez elles où elles ne chaufferaient qu’une pièce, on mutualise les coûts. C’est intéressant pour elles ».

L’administration à la traine

Tout serait formidable dans ce tableau, pourtant la nouveauté a pris de court les administrations, qui ne reconnaissent pas encore totalement ce mode d’habitation pour les personnes âgées. Pour l’instant, les colocataires ne peuvent pas toucher l’APA, l’allocation destinée à les aider à régler certaines dépenses liées à la perte progressive de leur autonomie dans la vie quotidienne. Ce que déplore Guillaume Chastel : « Pour l’instant ce n’est pas reconnu. Aujourd’hui l’APA, c’est de l’Aide Personnalisée à l’Autonomie, pour chaque personne. Mais il y a ici des communs, des salons, salles à manger, des terrasses, la cuisine alors oui quand on fait le ménage ce n’est pas personnalisé. Pour l’instant les colocations, c’est nouveau, il faut que l’administration se mette en route, la case n’existe pas. Maison individuelle, ça existe, Ehpad, ça existe et entre les deux il y a la colocation et cette case doit exister le plus rapidement possible car je trouve que les mamies sont bien dans cette forme d’habitat ».

Par son développement, ce système de partage d’habitat adapté au grand âge prouve pourtant son intérêt, d’autant qu’il s’articule autour de mécanismes plutôt simples : « Financièrement, les personnes louent une maison en commun. Il y a une partie loyer, il y a une partie charges, une partie nourriture qui est intégrée ;  comme dans une colocation quand on part en vacances on va mettre chacun de l’argent et il y a la partie services à la personne : ménage, repassage, entretien de la maison qui donne droit à un crédit d’impôts sur cette partie-là. Ça couvre également la téléassistance pour la nuit. Ça coûte 600 €, avec le crédit d’impôts ça revient à 300 €. En gros elles sont nourries, logées, blanchies pour 1330 € de reste à charge. L’APA permettrait la prise en charge d’une partie des services à la personne ».

Le département, « compétent pour mettre en œuvre toute aide ou action relative à la prévention ou à la prise en charge des situations de fragilité, au développement social, à l’accueil des jeunes enfants et à l’autonomie des personnes » comme l’indique l’article L3211-1 du code général des collectivités territoriales dit « réfléchir à une dérogation pour ce type de colocation pour personnes âgées » et l’Etat est en train de mettre en place une aide à la vie partagée, mais ce n’est pas encore à l’ordre du jour en Haute-Loire.

Source FR3.

 

Manque de moyens dans les Ehpad, « cela fait 15 ans que l’on crie dans le désert » …

Au début des années 2000, Joëlle Le Gall a fondé la Fédération Nationale des Associations et Familles des Personnes Agées.

Manque de moyens dans les Ehpad, "cela fait 15 ans que l'on crie dans le désert" . Image illustration Ehpad

 

Quand le livre de Victor Castanet « Les Fossoyeurs » sur la maltraitance dans les établissements d’Orpéa, est sorti, elle a retrouvé dans ces pages tout ce qu’elle dénonce depuis des années. Elle vient d’adresser une lettre ouverte à la ministre des solidarités, Brigitte Bourguignon.

« Il n’est pas question que j’aille avec tous ses vieux ! » Quand le père de Joëlle Le Gall est arrivé dans l’Unité de Soins Longue Durée et qu’une aide-soignante lui a annoncé qu’elle allait le conduire à la salle à manger, les choses ne se sont pas déroulées exactement comme prévu. « Nous, on espérait qu’il allait pouvoir finir sa vie dans de bonnes conditions, confie Joëlle, ce n’était pas très bien parti ! »

Comme elle ne voulait pas alourdir le travail du personnel, Joëlle Le Gall a proposé de venir lui donner ses repas le midi et le soir. En y allant tous les jours, elle a vu ce qu’il se passait.

Joëlle Le Gall vient d'adresser une lettre ouverte à la ministre des solidarités

« On lui donnait un bain tous les deux mois, quand il sonnait pour que quelqu’un vienne changer ses protections, le personnel arrivait des heures plus tard, la nourriture était immangeable. Et c’était pareil pour les autres. »

Joëlle Le Gall avait beau interpeller les infirmières, les médecins, rien ne bougeait. Alors, elle a fondé l’association Bien Vieillir Ensemble et commencé à essayer de faire bouger les choses. « On a fait comprendre au personnel des maisons de retraite que l’on n’était pas là pour les attaquer mais pour comprendre ce qui n’allait pas ».

En Bretagne, les personnes âgées représentent 29% de la population. « Elles ont le droit de finir leurs jours de façon digne et respectueuse. Cela fait 15 ans que l’on dénonce ce qui se passe et que nous ne sommes pas entendus. »

La personne âgée n’est pas un produit marchand

Joëlle Le Gall vient d’adresser une lettre ouverte à la ministre des solidarités. « Madame la Ministre, écrit-elle, le coût des EHPAD publics et associatifs, c’est l’omerta. Si le coût de l’hébergement concernant les EHPAD à but lucratif (cotés en bourse) est révoltant, il l’est aussi pour les EHPAD publics et associatifs à but non lucratif : 2.300 euros en moyenne nationale face à des retraites bien inférieures pour un grand nombre de citoyens. Aujourd’hui on rejoint un établissement par obligation : AVC, Parkinson, Alzheimer, maladies cardiaques, et non pas par choix comme si nous recherchions un bon hôtel pour nous accueillir. »

« Quand on demande autant d’argent à une personne, ce devrait être le nec plus ultra, résume Joëlle Le Gall, mais ce n’est même pas le cas. »

Des moyens matériels et humains

Le taux d’encadrement dans les établissements en France est de 0,56%. « Un peu plus d’une demi-personne par résident, c’est très insuffisant. On parle parfois de la maltraitance du personnel dans les Ehpad, là, c’est de la maltraitance de l’Etat sur ce personnel.  »

« Quand on a des financements qui ne sont pas à la hauteur, les gens ne veulent plus faire ce métier. Ils ont appris les bonnes pratiques, mais ils sont bousculés, il faudrait qu’ils aillent d’une chambre à l’autre en patins à roulettes. Ils sont en souffrance alors ils quittent la profession et vont ailleurs. » Joëlle Le Gall insiste donc sur l’urgence à revaloriser les salaires des soignants. « Il faut tout repenser ! « répète-t-elle.

La médecine fait des progrès constants, la durée de vie s’allonge, mais les maladies ne disparaissent pas. Les établissements doivent être dotés de plateaux techniques et de soignants en nombre suffisant.

Un regard extérieur

« Les familles doivent avoir un droit de regard sur l’accompagnement de leur parent et pouvoir s’exprimer sans crainte » poursuit la lettre. Joëlle Le Gall détaille, « dans les Conseils de Vie Sociale, tels qu’ils existent, les résidents n’ont pas très envie de se plaindre de peur des représailles, leurs familles se taisent aussi pour que leurs mots ne se retournent pas contre leur proche, les élus qui sont souvent membres des conseils de surveillance ne veulent pas de vagues. Il faut des contrôles, sinon on continuera à lire des livres comme Les Fossoyeurs ! « 

Les personnes de deviennent pas des sous-citoyens le lendemain de leur soixantième anniversaire. Un citoyen doit rester un citoyen à part entière, de sa vie à sa mort.

Joëlle Le Gall,

présidente Bien Vieillir Ensemble en Bretagne

« Nous vous prions de croire à notre bonne volonté pour continuer à réformer notre système de santé » écrit Joëlle pour terminer sa lettre, et au téléphone, elle ajoute comme pour prévenir, « cela fait 15 ans que je me bats, et jusqu’au bout, je mettrai toute mon énergie pour changer le système. »

Source FR3.

Ehpad : Quelles solutions pour mettre fin à la maltraitance des personnes âgées dans certains établissements ?…

SANTE – Les révélations du livre « Les Fossoyeurs » interrogent les acteurs du secteur et les pouvoirs publics sur les réformes à mettre en oeuvre dans les maisons de retraite.

Ehpad : Quelles solutions pour mettre fin à la maltraitance des personnes âgées dans certains établissements ?...

 

  • Dans son livre « Les Fossoyeurs », le journaliste Victor Castanet met directement en cause Orpea pour des situations de maltraitances. L’auteur y dénonce notamment l’obsession de la rentabilité au sein du groupe privé de maisons de retraite.
  • Joachim Tavares, ancien directeur d’Ehpad et fondateur de Papyhappy (entreprise spécialisée dans la recherche de logement pour senior) et Pascal Champvert, président de l’association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA), détaillent pour 20 Minutes les leviers à mettre en œuvre pour lutter contre les situations de maltraitances.
  • Tous deux estiment qu’une prise de conscience de l’État est nécessaire, tout comme un renforcement des moyens financiers alloués.

Comme un nouveau pavé dans la mare. La sortie l’ouvrage « Les Fossoyeurs » du journaliste indépendant Victor Castanet dévoile après trois ans d’enquête, les coulisses de certains établissements du groupe Orpea : carences de certains produits de santé et alimentaires, manque de soins administrés à certains résidents… Son travail vient étoffer la liste des signalements des associations et reportages télévisés déjà réalisés ces dernières années dans certains Ehpad (Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) français.

Dès la parution de bonnes feuilles dans Le Monde, la réaction du ministère de la Santé ne s’est pas fait attendre. « Pour que lumière soit faite sur les faits graves évoqués dans le livre de Victor Castanet, le directeur général d’Orpea a été convoqué dans les plus brefs délais , sur demande d’Olivier Véran. J’ai une pensée émue pour les résidents d’Ehpad, leurs familles et les professionnels », a assuré par le biais  d’un tweet Brigitte Bourguignon, ministre déléguée en charge de l’Autonomie.

Le directeur général Orpea reçu par la ministre

Une enquête flash a également été demandée auprès de  l’ARS Ile-de-France. Contacté par 20 Minutes, le ministère a confirmé que la ministre était totalement « révoltée contre ces traitements qui sont dégradants et indignes, s’ils étaient avérés ». Le Conseil d’administration d’Orpea a depuis annoncé avoir pris la décision de faire appel à deux cabinets indépendants pour évaluer l’ensemble « des allégations rapportées ». Jean-Christophe Romersi, le directeur général du groupe, a été reçu le mardi 1er février par Brigitte Bourguignon.

A la suite de ces révélations, 20 Minutes fait le point avec Joachim Tavares, ancien directeur d’Ehpad et fondateur de Papyhappy (entreprise spécialisée dans la recherche de logement pour senior) et Pascal Champvert, président de l’association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA). Quels sont aujourd’hui les différents leviers à disposition pour contrer la maltraitance dans certains Ehpad ?

Un système maltraitant ?

Pour Joachim Tavares, fondateur de Pappyhappy, ces révélations soulèvent « la problématique du système global de la prise en charge des personnes âgées ». Pour autant, il ne faut pas en faire une généralité transposable à tous les établissements, estime l’ancien directeur d’Ehpad. « Je pense qu’on ne prend pas le problème par le bon bout. On a de la facilité à taper sur des grands groupes comme Korian ou Orpea, mais c’est la profession et le secteur d’activité qui a besoin qu’on l’aide à s’améliorer. »

Un constat en partie partagé par Pascal Champvert, qui y voit un certain nombre de « maltraitances individuelles ». Néanmoins, pour le président de l’AD-PA, « une partie des choses qui sont révélées relèvent de la maltraitance systémique. C’est-à-dire que c’est l’ensemble du système qui est maltraitant ».

« L’État et les départements sont juges et parties »

Valérie Précresse a indiqué vouloir « radicalement » revoir le modèle des Ehpad et plaide pour la création d’un « référentiel obligatoire » pour tous les établissements. La candidate LR à la présidentielle souhaite que les conditions de vie quotidienne soient « strictement contrôlées », de la qualité de  l’alimentation​ et des soins à la taille des chambres, en passant par « le temps consacré individuellement à chaque résident par les soignants ».

Une meilleure prise en compte de ces signalements pourrait apparaître comme une solution simple et pérenne. D’après le directeur de l’AD-PA, un renforcement des contrôles n’aurait pas de sens sans une augmentation de la part de l’État des moyens humains et financiers et seulement s’ils sont effectués par des autorités indépendantes. « Dans ce cas-là, elles pourront vérifier ce que font l’État et les départements. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, puisqu’ils sont juges et parties. »

Une autorité indépendante pour assurer les contrôles ?

Car le financement des Ehpad, qu’ils soient publics ou privés, se divise en trois domaines : soins, dépendance et hébergement. Il repose en partie sur des fonds publics. Les dotations soins et dépendance sont financées respectivement à 100 % et 70 % par les administrations publiques. Or, dans plusieurs cas évoqués dans Les Fossoyeurs, « une partie de l’argent public qui devait être alloué au bénéfice des personnes âgées ne l’était pas », a affirmé Victor Castanet sur France Inter mardi. Le journaliste pointe également les responsabilités des agences régionales de santé (ARS) « qui, à bien des égards, ont failli à leurs missions premières : s’assurer de la bonne utilisation de l’argent public et, surtout, protéger nos aînés ».

Laurent Garcia, cadre infirmier et ancien d’Orpea, est le principal lanceur d’alerte dont les propos sont repris dans Les Fossoyeurs. Interrogé par France Info, il estime qu’il est nécessaire « qu’il y ait une autorité administrative indépendante qui puisse contrôler tous les Ehpad privés et publics ». Très engagé, il milite pour la création d’un Observatoire du grand âge (Ogra).

Problème de fond

D’après des informations transmises par les ARS au Défenseur des droits, le nombre de contrôles inopinés et d’inspections au cours des années de 2017 à 2019, variait entre trois et 50 par an, selon les régions. Dans un récent rapport de la défenseur des droits à propos des « droits fondamentaux des personnes âgées accueillies en Ehpad », cinq recommandations abordaient la maltraitance. L’une d’entre elles propose de mettre en place des observatoires régionaux afin de répondre aux signalements.

Joachim Tavares souligne également un manque d’action sur ce dossier. « Depuis plus de 20 ans, rien n’a été fait effectivement pour réfléchir à un nouveau système d’Ehpad et à un accompagnement. Les moyens humains à l’heure actuelle ne sont pas suffisants. »

Une feuille de route « Ephad » attendue

Pascal Champvert défend notamment la mise en œuvre d’un ratio de huit professionnels pour dix résidents. Outre les difficultés inhérentes aux manques de personnels soignants et qualifiés, « le vrai problème de fond, c’est qu’on est dans une société âgiste », souligne-t-il. Il estime qu’une prise de conscience est nécessaire, notamment de la part du monde politique et espère une prise de parole  d’Emmanuel Macron sur le sujet d’ici la fin de son mandat.

Source 20 MINUTES.

Affaire Orpea : Comment revaloriser le métier d’aide-soignant en Ehpad ?…

PREMIERE LIGNE – Les aides-soignants en Ehpad veulent profiter de la crise pour mettre en lumière leurs conditions de travail.

Affaire Orpea : Comment revaloriser le métier d'aide-soignant en Ehpad ?

 

  • L’enquête de Victor Castanet dans son livre « Les Fossoyeurs » bouscule le monde des Ehpad et dévoile les conditions de travail souvent difficiles des aides-soignants qui y travaillent.
  • Toute la corporation s’accorde sur le manque d’effectifs dans les maisons de retraite, conduisant à un travail réalisé dans l’urgence, au détriment des patients, mais aussi des professionnels.
  • Les aides-soignants souffrent également de l’image peu valorisée de la profession auprès du grand public.

Le scandale soulevé par le livre Les Fossoyeurs sera-t-il salvateur ? La convocation ce mardi de Philippe Charrier, nouveau PDG du groupe Orpea, en remplacement de Yves Le Masne (limogé dimanche), par Brigitte Bourguignon, sera peut-être la première étape d’une remise en cause globale. Parmi les acteurs concernés, les aides-soignants espèrent voir leur métier revalorisé. A plus d’un titre.

« Dans toute cette histoire, il ne faudra pas oublier la souffrance des personnels qui vivent ça au quotidien », a écrit sur Twitter Nathalie, aide-soignante dans une maison de retraite en Vendée. Si elle se sent « soulagée » que l’affaire fasse autant de bruit dans les médias, elle craint de voir le statut des aides-soignants mis sous le tapis, étouffé par les autres volets de l’affaire : « Parce que nous aussi, on en bave », insiste-t-elle.

Le manque d’effectif, à la base de tous les problèmes

Paule*, aide-soignante dans un Ehpad privé « similaire à Orpea », attend aussi beaucoup de cette mise en lumière : « C’est très simple, nous manquons de bras. C’est à la base de la majorité de nos problèmes. » Les repas servis froids, les soins parfois expédiés, les patients qui attendent des heures avec une couche souillée, la maltraitance… Pour l’aide-soignante la solution est de recruter : « Ce qui nous manque, c’est du temps, parce qu’on doit s’occuper de trop de patients à la fois, donc il faut tout faire très rapidement et devoir hiérarchiser les priorités. »

Un constat partagé par Denis Fischer, vice-président de la Fédération nationale des associations d’Aides-soignants (Fnaas) : « Le ratio personnel/patients est bien trop faible pour prodiguer une qualité de soins optimale. » Pour rétablir des effectifs en conformité avec les besoins du secteur, Pascal Champvert, président de l’Association des Directeurs au service des Personnes Âgées (AD-PA) demande le recrutement d’au moins deux aides-soignants par établissement, soit 40.000 personnes : « C’est au gouvernement de décider de cela. Pourquoi ne pas proposer des formations adaptées aux personnels de ménage qui pour beaucoup seraient ravis de le faire ? Et ensuite relancer une grande campagne de formation ? ».

Dans son rapport « Après la crise COVID, quelles solutions pour l’EHPAD de demain ? », voté le 18 janvier dernier, l’académie nationale de médecine tire la même conclusion en préconisant de « tendre vers un même ratio de personnel soignant quel que soit le type d’Ehpad » que dans le secteur sanitaire ou les missions sont moins larges et les charges moins lourdes. Autre problème : la difficulté à utiliser certains équipements. Lèves-personnes, verticalisateurs, draps de glisse… Le matériel existe pourtant pour faciliter la vie du personnel : « Mais c’est du matériel qui demande du temps à l’utilisation, et parfois d’être deux », ajoute le professionnel. Deux options souvent indisponibles pour les personnels.

Une souffrance physique et psychique pour les aides-soignants

Les conséquences de ce manque de moyens sont multiples pour les aides-soignants. Physiquement, la tâche est usante : « On court toute la journée et on se casse le dos à replacer des patients seuls », raconte Paule, qui ne compte plus les troubles musculosquelettiques parmi ses collègues. A ce rythme infernal s’ajoutent les congés trop souvent annulés pour combler une absence.

Mais le pire, ce sont les conséquences sur le moral. Outre la « gestion des ressources humaines paternaliste » et « le mauvais partage d’informations entre les différents membres de l’équipe soignante » en raison d’absence de relève, mis en avant par l’Académie de médecine, les aides-soignants souffrent de la considération portée à leur travail. La leur en premier lieu. « C’est difficile de voir la détresse des patients et de ne pouvoir y répondre tous les jours. Quand ils demandent du temps, de l’affection, ou juste de la dignité. Et qu’on ne peut s’attarder parce qu’on est débordé… Parfois on se demande comment on peut accepter ça. On perd un peu de notre humanité », commente Nathalie avec des trémolos dans la voix.

Redorer l’image du métier

Cette perte de sens, Paule la vit aussi régulièrement, dans les yeux des autres. Son mari a beau lui rappeler qu’elle fait un métier noble, son sentiment n’est pas toujours celui-ci à la fin de la journée. Elle, qui a choisi cette voie parce qu’elle « aimait s’occuper des autres », a parfois honte de ce qu’elle fait. « Ce qu’on vit tous les jours, la manière dont nous sommes traités par la hiérarchie, par les familles des patients… Ce n’est pas tous les jours, mais c’est assez souvent pour qu’on en souffre. »

Pire, les difficultés auxquelles font face les personnels soignants en Ehpad ne sont même pas bien récompensées financièrement. Denis Fischer aimerait que ce point soit maintenant abordé pour soutenir les personnels, mais aussi pour rendre le métier plus attractif. Une revalorisation de 183 euros net par mois a bien été mise en place en 2020 dans le cadre du Ségur de la santé, mais les salaires proposés restent modestes au regard de la mission qui est confiée.

Une mission très mal connue du grand public selon Denis Fischer : « Quand on parle d’une infirmière, les gens identifient rapidement son rôle. Pour les aides-soignants, le travail n’est pas toujours compris. On limite souvent cela à du “nursing” (Les soins d’hygiène-NDLR). » Aussi, la FNAAS rappelle le rôle prépondérant des aides-soignants dans les soins thérapeutiques, dans toutes les activités qui permettent de maintenir le niveau d’autonomie des personnes âgées. Pour cela, Denis Fischer préconise des campagnes d’information sur le métier, pour faire comprendre la formation, le rôle social et l’importance des aides-soignants.

*Le prénom a été changé

Source 20 MINUTES.