Et si les aides à domicile finissaient vraiment par craquer ?… Vidéo.

832 euros par mois, c’est le salaire moyen des aides à domicile, dont les contrats sont rarement à temps plein.

Les très faibles rémunérations ne correspondent pas aux contraintes horaires, à l’engagement et au rôle crucial de la profession auprès des personnes en perte d’autonomie.
La crise des vocations fait que le secteur est sur le point de craquer.
Seul espoir : que la France renonce à vouloir financer ces services et soins vitaux… au rabais.
Et si les aides à domicile finissaient vraiment par craquer ?...

«Je vais chez des personnes qui sont presque centenaires, nos petits vieux ce sont des trésors vivants !  », s’enflamme Muriel Auvinet. Aide à domicile depuis dix ans dans le Var, après avoir vécu en Auvergne, Muriel est passionnée par son métier.

Elle a travaillé huit ans dans une « grosse structure associative », avant de rejoindre « une petite boîte, où l’on garde le lien, l’humain. On sympathise, on discute avec les bénéficiaires et les familles. Il y a beaucoup de psychologie, d’empathie ».

Si Muriel a conservé la foi, elle a vécu il y a six ans la réduction drastique des temps de présence, imposée par les services des départements : « Quand on venait une heure, ça a été réduit à 30 minutes ». C’est insuffisant mais Muriel et sa dizaine de collègues de « l’As de Cœur » à Barjols (Var) font de la résistance : « souvent dix minutes de plus chez chaque personne. Ce n’est pas facturé. À la fin de la journée, j’ai souvent cumulé une heure de bénévolat ».
Ces minutes gagnées sur la « robotisation du métier », dixit cette professionnelle varoise, sont possibles car sa patronne est l’une des rares qui « refuse de faire pointer par téléphone ».

Muriel a pris sa décision :  « Si on est rachetés par une grosse boîte, j’arrête ».

Un recrutement rendu encore plus difficile par la crise  sanitaire.

Le recrutement dans le secteur de l’aide à domicile était déjà plus que tendu avant la crise du Covid.

Placées par le gouvernement en « deuxième ligne », ces professionnelles (le métier est féminin à plus de 95 %) se sont bien senties en première ligne : « On a remplacé les infirmières. Nos bénéficiaires étaient en grande souffrance car totalement isolés. Certains sont morts, pas du Covid mais des conséquences des mesures contre la pandémie, parce qu’ils ne pouvaient plus sortir de chez eux », témoigne Muriel.

Anne Lauseig, l’une des animatrices du collectif La force invisible des aides à domicile, annonce « un été très tendu pour les structures employeuses […] les vagues de Covid successives ont épuisé beaucoup de collègues ».

 « Les arrêts maladie découlant du surmenage provoqué par la crise sanitaire s’accompagnent souvent d’une recherche de reconversion ».

Anne Lauseig (Aide à domicile en Gironde et co-fondatrice du collectif la Force invisible des aides à domicile).

Démissions et plongeon des vocations plombent le moral des employeurs alors que la demande de prise en charge explose : « On va être confronté à un doublement des personnes âgées en perte d’autonomie d’ici à 2050. Les Ehpad ont des lits de libre mais 90 % des Français préfèrent vieillir chez eux », situe Julien Jourdan, directeur de la fédération des employeurs privés de services à la personne (Fédésap).

« Dans les dix ans à venir, la moitié des salariés de l’aide à domicile vont partir à la retraite », complète Stéphane Fustec, délégué national de la CGT pour les services à la personne.
Le syndicaliste résume les modalités de rémunération qui rendent le secteur peu attractif : « Le temps d’attente et le temps de déplacement ne sont pas pris en compte. Sur une amplitude de 12 ou 13 heures sur une journée, l’aide à domicile sera payée cinq ou six heures au Smic, pas plus ».

Aides à domicile ou auxiliaires de vie ?

Dans le secteur associatif, on les appelle aides à domicile. Les salariés du privé sont auxiliaires de vie, tandis que la dénomination chez les particuliers employeurs est assistant(e) de vie. Si l’on peut rentrer dans ce métier sans qualification, la validation des acquis et la formation continue sont encouragées. Le secteur emploie aussi des aides-soignantes diplômées.  Selon le rapport parlementaire Bonnell-Ruffin, un tiers des aides à domicile sont employés par des particuliers. Le secteur public est également employeur, à travers les CCAS notamment. Les entreprises et les associations de l’aide à domicile emploient 370.000 personnes. 60 % sont dans l’associatif mais le privé gagne des « parts de marché » L’aide au maintien à domicile bénéficie est dirigée aussi vers les personnes handicapées via la PCH (Prestation compensatoire au handicap) qui relève des mêmes financements que l’APA : la prise en charge est plus élevée.

Le rapport parlementaire rendu en 2020 par François Ruffin (LFI) et Bruno Bonnell (LREM) sur les métiers du lien a chiffré ce « sous-smic » qui génère une grande précarité. Une fabrique de « femmes pauvres » n’hésitent pas à dénoncer Ruffin et Bonnell : « 26 heures de travail hebdomadaire, en moyenne et 832 euros de salaire net, 1.190 euros pour un (rare) temps plein ».

Et si les aides à domicile finissaient vraiment par craquer ?...Un employeur du Puy-de-Dôme : « C’est un métier où l’on voit des situations compliquées, qui est usant psychologiquement et physiquement. photo Agence Issoire

Les employeurs ne sont pas les derniers à convenir de cette indécence, à l’image de Patrick Quinty, patron d’Auravie services, une PME de deux cents salariés qui opère entre le Puy-de-Dôme, l’Allier, le Loiret et le Rhône : « Il faut payer les gens à leur juste valeur. C’est un métier où l’on voit des situations compliquées, qui est usant psychologiquement et physiquement ».
La prise en charge à domicile de la perte d’autonomie est complexe et technique .

«  Ce n’est plus le petit ménage de confort, ce sont des soins, des toilettes, des repas. Je fais un boulot d’aide soignante sans le salaire »,

Muriel Auvinet (Aide à domicile dans le Var)

C’est ce que les professionnels appellent le « glissement de tâches ».

Un secteur très morcelé et des professionnels sans statut clair

De multiples qualifications et statuts coexistent selon qu’on soit salarié d’une association, de la fonction publique, d’une entreprise ou d’un particulier : « Ils ont morcelé le secteur, c’est exprès », suggère Anne Lauseig.
Une ambiguïté a été également instaurée en mêlant les métiers du soin et de l’aide sociale au secteur des « services à la personne », qui comprennent par exemple des heures de ménage ou de jardinage. Un secteur développé par des crédits d’impôts.

Du côté des bénéficiaires de la hausse, on ne se réjouit pas trop à l’avance : « Les petites mains, qui n’ont pas de diplôme, ne vont toucher que 10-20 euros par mois en plus, les cadres ce sera plutôt 300 euros », évalue Anne Lauseig. En Gironde, où elle travaille, la porte-parole des aides à domicile a déjà constaté la forte évaporation des augmentations consenties : « Une convention du Conseil départemental signée avec les entreprises permet de relever le tarif APA de 19 à 21 euros à condition qu’elles augmentent leurs salariés : sur les bulletins de salaires ça s’est traduit par 0,05 euro en plus à l’heure ! ». À la CGT, Stéphane Fustec réclame des « contrôles », afin que les augmentations impulsées par les pouvoirs publics ne « disparaissent pas dans la marge des entreprises ». Tous les acteurs du secteurs du domicile réclament un statut unifié grâce à la 5e branche de la Sécu Le patron d’Auravie services à Clermont-Ferrand, Patrick Quenty, donne sa marge de manœuvre et sa marge tout court : « Sur 23 euros facturés de l’heure, le reste à charge pour le bénéficiaire est de 2,36 euros. Le coût réel de fonctionnement est de 21 à 22 euros ». « On ne peut pas augmenter le reste à charge car nos clients ne pourraient pas suivre » Julien Jourdan (Directeur de la fédération des entreprises des services à la personne (Fédésap)) Départements, employeurs, salariés partagent la même vision : la seule issue à cette situation critique, indécente au niveau des rémunérations et territorialement inégalitaire, c’est la mise en place de la cinquième branche grand âge -autonomie de la Sécurité sociale. C’est voté à l’Assemblée, le gouvernement a posé des jalons mais la crise sanitaire et les échéances électorales ne permettent de dégager aucune perspective à court terme. Dans leur rapport, les députés Bonnell et Ruffin ont évoqué, pour mieux la dénoncer, une « tentation » : recourir à l’immigration. Une façon cynique de maintenir le métier dans la précarité et donc, pour la France, de prendre soin de ses « vieux » sans jamais en payer le coût réel. Des départements plus ou moins généreux La prime Covid, décidée en janvier par le gouvernement, avait déjà révélé un « enthousiasme » inégal des départements à l’heure de récompenser les aides à domicile. Avec des montants très disparates et même deux conseils départementaux qui ont refusé de verser ladite prime. L’augmentation décidée en avril par le gouvernement ne concernera que les aides à domicile du secteur associatif mais Marie-Reine Tillon, présidente de la fédération UNA, redoute que des « départements ne jouent pas le jeu de l’augmentation. Les associations, elles, sont contraintes d’augmenter par la convention collective ». L’État via la Caisse nationale de Solidarité pour l’Autonomie prendrait en charge 150 millions d’euros de cette augmentation, somme inscrite dans la loi de finance de la Sécurité Sociale 2021. L’Association des départements de France a évalué le « reste à charge » : le surcoût pour l’ensemble des conseils départementaux est estimé à 301 millions d’euros. En dehors des primes et des augmentations, la « générosité » des départements envers le secteur de l’aide à domicile connaît de grandes variations : quelques centimes de différences de l’heure sur le montant de l’Aide personnalisée à l’autonomie (APA) peuvent avoir une très forte incidence sur la rentabilité des structures. Céciile, aide soignante à domicile dans un SSIAD en Corrèze Du côté de l’Association des départements de France, on explique ces variations par des différences de structures sociodémographiques des territoires : « Le taux de bénéficiaires de l’APA parmi les 60 ans varie de 2,6 à 9,4 % ». « Quand vous êtes dépendant, il faut choisir votre lieu d’habitation » Au cours de ce mandat, l’autonomie financière des Conseils départementaux s’est considérablement restreinte puisqu’ils n’ont pratiquement plus de leviers fiscaux. Les élections de juin n’en sont pas moins l’occasion d’affirmer des choix politiques, même dans un contexte contraint. « Gros morceau » des compétences sociales, le financement de l’autonomie révèle des écarts qui vont du simple au double et qui ne sont pas forcément corrélés à la « richesse » du département. Le financement moyen de l’APA est de 21 euros. La « fourchette » va de 17 euros à près de… 30 euros. Des départements comme l’Isère ou le Maine-et-Loire sont parmi les plus généreux. « Les tarifs les plus hauts sont liés à des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens », relève le chef d’entreprise Patrick Quinte. La France, pays des 365 fromages et des 95 tarifs APA. Avec des restes à charge qui peuvent plomber des petites retraites. Marie Reine Tillon fait ce constat : « Quand vous êtes dépendant, il faut choisir votre lieu d’habitation ». Innovation : la Corrèze a créé une académie des métiers de l'autonomie La Corrèze a fait partie des départements dont le tarif APA était le plus faible. Il est aujourd’hui dans la moyenne avec un tarif de 21 euros de l’heure. Un effort qui s’est accompagné d’un dispositif de financement différencié, comme l’explique le président du Conseil départemental Pascal Coste : « La prise en charge de ceux qui sont en dessous de 1.200 euros de retraite par mois est intégrale. Au-dessus, il y a une participation de 5 euros sur le reste à charge ». L'académie des métiers de 'autonomie a démarré il y a trois mois en Corrèze Lancée en début d’année, une innovation devrait participer à la reconnaissance et à l’attractivité du métier : l’académie des métiers de l’autonomie. Dans tous les services d’aide à domicile du département, des professionnelles sont valorisées en tant qu’ambassadrices ou tutrices, dans l’objectif de faire découvrir le métier. Une formation en alternance sur un an a été mise en place avec le lycée agricole de Naves. « Des tutoriels ont été créés par les professionnelles confirmées et intégrés aux téléphones de service : ils permettent aux nouveaux salariés de savoir comment s’y prendre face à une situation donnée », complète Pascal Coste. D'autres départements cherchent à s'inspirer de ce modèle La Corrèze actionne également le levier de la mobilité : « En partenariat avec le Crédit agricole, nous avançons 8.000 euros sur le financement du permis de conduire et de l’acquisition du véhicule ». La question du recrutement est devenue localement moins problématique : « Nous avons 37 personnes qui sont entrées dans le métier en trois mois. À ce rythme-là, nous devrions pouvoir remplacer les départs en retraite », se félicite le président du Conseil départemental. D’autres départements veulent s’inspirer du « modèle corrézien ». Sur leur lancée, les Limousins veulent élargir les compétences de son académie à tout le secteur du domicile : des soins infirmiers aux assistantes maternelles. Julien RapegnoLes aides à domicile effectuent des tâches de plus en plus techniques – le 06/05/2021 photo Franck Boileau

Marie-Reine Tillon, présidente de l’UNA, qui fédère les structures associatives d’aide à domicile, réclame une clarification : « Il faut faire le tri entre ce qui relève ou non du médico-social. L’argent public ne doit pas financer du ménage ou un coach à domicile chez des actifs ».

C’est bien le sous-financement de la prise en charge de la perte d’autonomie qui maintient les salaires sous la ligne de flottaison.

Tarif moyen de l’APA payé par les départements : 21 euros /heure. Coût d’un service de qualité : 30 euros

Aujourd’hui, le tarif moyen horaire de l’APA (aide personnalisée à l’autonomie) payé par les départements est de 21 euros : « Si on payait 100 % des déplacements, les temps de coordination, la formation. Si on veut faire un secteur vertueux, qui traite bien ses salariés et ses bénéficiaires, et qui fait faire des économies à la sécurité sociale : ça coûte 30 euros de l’heure », chiffre Julien Jourdan.
Certains départements se gargarisent de chouchouter leurs personnes âgées. .

« Les départements  exigent de nos services à domicile de ne pas employer plus de 20 % de diplômés, pour que ça ne coûte pas trop cher »

Marie-Reine Tillon (Présidente de l’Union des associations d’aide à domicile).

La présidente de la fédération des associations d’aide à domicile dénonce un « système schizophrène » où l’État et les départements se renvoient la responsabilité du sous financement.
Les départements ont subi de plein fouet la baisse des dotations de l’État et sont confrontés à une hausse continue des prestations sociales. C’est dire s’ils n’ont pas accueilli comme une bonne nouvelle l’annonce de la ministre en charge de l’autonomie le 1er avril.

15% de hausse de salaire mais seulement dans les structures associatives

Brigitte Bourguignon a promis des hausses de 15 % des salaires des aides à domicile du secteur associatif, à partir d’octobre. L’État et les départements doivent se partager le coût de cette hausse (lire ci-dessous).

Les acteurs privés de la branche protestent. Ils voient dans cette augmentation réservée aux seuls salariés du secteur associatif « une distorsion de concurrence », qui va encore leur compliquer le recrutement : « Avec la revalorisation de 160 euros du Ségur de la santé, on assiste déjà à une fuite de nos aides soignantes diplômées vers les Ehpad », s’inquiète Julien Jourdan.

Du côté des bénéficiaires de la hausse, on ne se réjouit pas trop à l’avance : « Les petites mains, qui n’ont pas de diplôme, ne vont toucher que 10-20 euros par mois en plus, les cadres ce sera plutôt 300 euros », évalue Anne Lauseig.
En Gironde, où elle travaille, la porte-parole des aides à domicile a déjà constaté la forte évaporation des augmentations consenties : « Une convention du Conseil départemental signée avec les entreprises permet de relever le tarif APA de 19 à 21 euros à condition qu’elles augmentent leurs salariés : sur les bulletins de salaires ça s’est traduit par 0,05 euro en plus à l’heure !  ».
À la CGT, Stéphane Fustec réclame des « contrôles », afin que les augmentations impulsées par les pouvoirs publics ne « disparaissent pas dans la marge des entreprises ».

Tous les acteurs du secteurs du domicile réclament un statut unifié grâce à la 5e branche de la Sécu

Le patron d’Auravie services à Clermont-Ferrand, Patrick Quenty, donne sa marge de manœuvre et sa marge tout court : « Sur 23 euros facturés de l’heure, le reste à charge pour le bénéficiaire est de 2,36 euros. Le coût réel de fonctionnement est de 21 à 22 euros ».

« On ne peut pas augmenter le reste à charge car nos clients ne pourraient pas suivre »

Julien Jourdan (Directeur de la fédération des entreprises des services à la personne (Fédésap))

Départements, employeurs, salariés partagent la même vision : la seule issue à cette situation critique, indécente au niveau des rémunérations et territorialement inégalitaire, c’est la mise en place de la cinquième branche grand âge -autonomie de la Sécurité sociale. C’est voté à l’Assemblée, le gouvernement a posé des jalons mais la crise sanitaire et les échéances électorales ne permettent de dégager aucune perspective à court terme.
Dans leur rapport, les députés Bonnell et Ruffin ont évoqué, pour mieux la dénoncer, une « tentation »  : recourir à l’immigration.
Une façon cynique de maintenir le métier dans la précarité et donc, pour la France, de prendre soin de ses « vieux » sans jamais en payer le coût réel.

Des départements plus ou moins généreux

La prime Covid, décidée en janvier par le gouvernement, avait déjà révélé un « enthousiasme » inégal des départements à l’heure de récompenser les aides à domicile. Avec des montants très disparates et même deux conseils départementaux qui ont refusé de verser ladite prime.
L’augmentation décidée en avril par le gouvernement ne concernera que les aides à domicile du secteur associatif mais Marie-Reine Tillon, présidente de la fédération UNA, redoute que des « départements ne jouent pas le jeu de l’augmentation. Les associations, elles, sont contraintes d’augmenter par la convention collective ».

L’État via la Caisse nationale de Solidarité pour l’Autonomie prendrait en charge 150 millions d’euros de cette augmentation, somme inscrite dans la loi de finance de la Sécurité Sociale 2021.

L’Association des départements de France a évalué le « reste à charge » : le surcoût pour l’ensemble des conseils départementaux est estimé à 301 millions d’euros.
En dehors des primes et des augmentations, la « générosité » des départements envers le secteur de l’aide à domicile connaît de grandes variations : quelques centimes de différences de l’heure sur le montant de l’Aide personnalisée à l’autonomie (APA) peuvent avoir une très forte incidence sur la rentabilité des structures.

Du côté des bénéficiaires de la hausse, on ne se réjouit pas trop à l’avance : « Les petites mains, qui n’ont pas de diplôme, ne vont toucher que 10-20 euros par mois en plus, les cadres ce sera plutôt 300 euros », évalue Anne Lauseig. En Gironde, où elle travaille, la porte-parole des aides à domicile a déjà constaté la forte évaporation des augmentations consenties : « Une convention du Conseil départemental signée avec les entreprises permet de relever le tarif APA de 19 à 21 euros à condition qu’elles augmentent leurs salariés : sur les bulletins de salaires ça s’est traduit par 0,05 euro en plus à l’heure ! ». À la CGT, Stéphane Fustec réclame des « contrôles », afin que les augmentations impulsées par les pouvoirs publics ne « disparaissent pas dans la marge des entreprises ». Tous les acteurs du secteurs du domicile réclament un statut unifié grâce à la 5e branche de la Sécu Le patron d’Auravie services à Clermont-Ferrand, Patrick Quenty, donne sa marge de manœuvre et sa marge tout court : « Sur 23 euros facturés de l’heure, le reste à charge pour le bénéficiaire est de 2,36 euros. Le coût réel de fonctionnement est de 21 à 22 euros ». « On ne peut pas augmenter le reste à charge car nos clients ne pourraient pas suivre » Julien Jourdan (Directeur de la fédération des entreprises des services à la personne (Fédésap)) Départements, employeurs, salariés partagent la même vision : la seule issue à cette situation critique, indécente au niveau des rémunérations et territorialement inégalitaire, c’est la mise en place de la cinquième branche grand âge -autonomie de la Sécurité sociale. C’est voté à l’Assemblée, le gouvernement a posé des jalons mais la crise sanitaire et les échéances électorales ne permettent de dégager aucune perspective à court terme. Dans leur rapport, les députés Bonnell et Ruffin ont évoqué, pour mieux la dénoncer, une « tentation » : recourir à l’immigration. Une façon cynique de maintenir le métier dans la précarité et donc, pour la France, de prendre soin de ses « vieux » sans jamais en payer le coût réel. Des départements plus ou moins généreux La prime Covid, décidée en janvier par le gouvernement, avait déjà révélé un « enthousiasme » inégal des départements à l’heure de récompenser les aides à domicile. Avec des montants très disparates et même deux conseils départementaux qui ont refusé de verser ladite prime. L’augmentation décidée en avril par le gouvernement ne concernera que les aides à domicile du secteur associatif mais Marie-Reine Tillon, présidente de la fédération UNA, redoute que des « départements ne jouent pas le jeu de l’augmentation. Les associations, elles, sont contraintes d’augmenter par la convention collective ». L’État via la Caisse nationale de Solidarité pour l’Autonomie prendrait en charge 150 millions d’euros de cette augmentation, somme inscrite dans la loi de finance de la Sécurité Sociale 2021. L’Association des départements de France a évalué le « reste à charge » : le surcoût pour l’ensemble des conseils départementaux est estimé à 301 millions d’euros. En dehors des primes et des augmentations, la « générosité » des départements envers le secteur de l’aide à domicile connaît de grandes variations : quelques centimes de différences de l’heure sur le montant de l’Aide personnalisée à l’autonomie (APA) peuvent avoir une très forte incidence sur la rentabilité des structures. Céciile, aide soignante à domicile dans un SSIAD en Corrèze Du côté de l’Association des départements de France, on explique ces variations par des différences de structures sociodémographiques des territoires : « Le taux de bénéficiaires de l’APA parmi les 60 ans varie de 2,6 à 9,4 % ». « Quand vous êtes dépendant, il faut choisir votre lieu d’habitation » Au cours de ce mandat, l’autonomie financière des Conseils départementaux s’est considérablement restreinte puisqu’ils n’ont pratiquement plus de leviers fiscaux. Les élections de juin n’en sont pas moins l’occasion d’affirmer des choix politiques, même dans un contexte contraint. « Gros morceau » des compétences sociales, le financement de l’autonomie révèle des écarts qui vont du simple au double et qui ne sont pas forcément corrélés à la « richesse » du département. Le financement moyen de l’APA est de 21 euros. La « fourchette » va de 17 euros à près de… 30 euros. Des départements comme l’Isère ou le Maine-et-Loire sont parmi les plus généreux. « Les tarifs les plus hauts sont liés à des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens », relève le chef d’entreprise Patrick Quinte. La France, pays des 365 fromages et des 95 tarifs APA. Avec des restes à charge qui peuvent plomber des petites retraites. Marie Reine Tillon fait ce constat : « Quand vous êtes dépendant, il faut choisir votre lieu d’habitation ». Innovation : la Corrèze a créé une académie des métiers de l'autonomie La Corrèze a fait partie des départements dont le tarif APA était le plus faible. Il est aujourd’hui dans la moyenne avec un tarif de 21 euros de l’heure. Un effort qui s’est accompagné d’un dispositif de financement différencié, comme l’explique le président du Conseil départemental Pascal Coste : « La prise en charge de ceux qui sont en dessous de 1.200 euros de retraite par mois est intégrale. Au-dessus, il y a une participation de 5 euros sur le reste à charge ». L'académie des métiers de 'autonomie a démarré il y a trois mois en Corrèze Lancée en début d’année, une innovation devrait participer à la reconnaissance et à l’attractivité du métier : l’académie des métiers de l’autonomie. Dans tous les services d’aide à domicile du département, des professionnelles sont valorisées en tant qu’ambassadrices ou tutrices, dans l’objectif de faire découvrir le métier. Une formation en alternance sur un an a été mise en place avec le lycée agricole de Naves. « Des tutoriels ont été créés par les professionnelles confirmées et intégrés aux téléphones de service : ils permettent aux nouveaux salariés de savoir comment s’y prendre face à une situation donnée », complète Pascal Coste. D'autres départements cherchent à s'inspirer de ce modèle La Corrèze actionne également le levier de la mobilité : « En partenariat avec le Crédit agricole, nous avançons 8.000 euros sur le financement du permis de conduire et de l’acquisition du véhicule ». La question du recrutement est devenue localement moins problématique : « Nous avons 37 personnes qui sont entrées dans le métier en trois mois. À ce rythme-là, nous devrions pouvoir remplacer les départs en retraite », se félicite le président du Conseil départemental. D’autres départements veulent s’inspirer du « modèle corrézien ». Sur leur lancée, les Limousins veulent élargir les compétences de son académie à tout le secteur du domicile : des soins infirmiers aux assistantes maternelles. Julien RapegnoCécile, aide soignante à domicile dans un SSIAD en Corrèze
 

Du côté de l’Association des départements de France, on explique ces variations par des différences de structures sociodémographiques des territoires : « Le taux de bénéficiaires de l’APA parmi les 60 ans varie de 2,6 à 9,4 % ».

 « Quand vous êtes dépendant, il faut choisir votre lieu d’habitation »

Au cours de ce mandat, l’autonomie financière des Conseils départementaux s’est considérablement restreinte puisqu’ils n’ont pratiquement plus de leviers fiscaux. Les élections de juin n’en sont pas moins l’occasion d’affirmer des choix politiques, même dans un contexte contraint.
« Gros morceau » des compétences sociales, le financement de l’autonomie révèle des écarts qui vont du simple au double et qui ne sont pas forcément corrélés à la « richesse » du département.

Le financement moyen de l’APA est de 21 euros. La « fourchette » va de 17 euros à près de… 30 euros.
Des départements comme l’Isère ou le Maine-et-Loire sont parmi les plus généreux.  « Les tarifs les plus hauts sont liés à des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens », relève le chef d’entreprise Patrick Quinte.
La France, pays des 365 fromages et des 95 tarifs APA. Avec des restes à charge qui peuvent plomber des petites retraites. Marie Reine Tillon fait ce constat :  « Quand vous êtes dépendant, il faut choisir votre lieu d’habitation ».

Innovation : la Corrèze a créé une académie des métiers de l’autonomie

La Corrèze a fait partie des départements dont le tarif APA était le plus faible. Il est aujourd’hui dans la moyenne avec un tarif de 21 euros de l’heure.
Un effort qui s’est accompagné d’un dispositif de financement différencié, comme l’explique le président du Conseil départemental Pascal Coste : « La prise en charge de ceux qui sont en dessous de 1.200 euros de retraite par mois est intégrale. Au-dessus, il y a une participation de 5 euros sur le reste à charge ».

Du côté des bénéficiaires de la hausse, on ne se réjouit pas trop à l’avance : « Les petites mains, qui n’ont pas de diplôme, ne vont toucher que 10-20 euros par mois en plus, les cadres ce sera plutôt 300 euros », évalue Anne Lauseig. En Gironde, où elle travaille, la porte-parole des aides à domicile a déjà constaté la forte évaporation des augmentations consenties : « Une convention du Conseil départemental signée avec les entreprises permet de relever le tarif APA de 19 à 21 euros à condition qu’elles augmentent leurs salariés : sur les bulletins de salaires ça s’est traduit par 0,05 euro en plus à l’heure ! ». À la CGT, Stéphane Fustec réclame des « contrôles », afin que les augmentations impulsées par les pouvoirs publics ne « disparaissent pas dans la marge des entreprises ». Tous les acteurs du secteurs du domicile réclament un statut unifié grâce à la 5e branche de la Sécu Le patron d’Auravie services à Clermont-Ferrand, Patrick Quenty, donne sa marge de manœuvre et sa marge tout court : « Sur 23 euros facturés de l’heure, le reste à charge pour le bénéficiaire est de 2,36 euros. Le coût réel de fonctionnement est de 21 à 22 euros ». « On ne peut pas augmenter le reste à charge car nos clients ne pourraient pas suivre » Julien Jourdan (Directeur de la fédération des entreprises des services à la personne (Fédésap)) Départements, employeurs, salariés partagent la même vision : la seule issue à cette situation critique, indécente au niveau des rémunérations et territorialement inégalitaire, c’est la mise en place de la cinquième branche grand âge -autonomie de la Sécurité sociale. C’est voté à l’Assemblée, le gouvernement a posé des jalons mais la crise sanitaire et les échéances électorales ne permettent de dégager aucune perspective à court terme. Dans leur rapport, les députés Bonnell et Ruffin ont évoqué, pour mieux la dénoncer, une « tentation » : recourir à l’immigration. Une façon cynique de maintenir le métier dans la précarité et donc, pour la France, de prendre soin de ses « vieux » sans jamais en payer le coût réel. Des départements plus ou moins généreux La prime Covid, décidée en janvier par le gouvernement, avait déjà révélé un « enthousiasme » inégal des départements à l’heure de récompenser les aides à domicile. Avec des montants très disparates et même deux conseils départementaux qui ont refusé de verser ladite prime. L’augmentation décidée en avril par le gouvernement ne concernera que les aides à domicile du secteur associatif mais Marie-Reine Tillon, présidente de la fédération UNA, redoute que des « départements ne jouent pas le jeu de l’augmentation. Les associations, elles, sont contraintes d’augmenter par la convention collective ». L’État via la Caisse nationale de Solidarité pour l’Autonomie prendrait en charge 150 millions d’euros de cette augmentation, somme inscrite dans la loi de finance de la Sécurité Sociale 2021. L’Association des départements de France a évalué le « reste à charge » : le surcoût pour l’ensemble des conseils départementaux est estimé à 301 millions d’euros. En dehors des primes et des augmentations, la « générosité » des départements envers le secteur de l’aide à domicile connaît de grandes variations : quelques centimes de différences de l’heure sur le montant de l’Aide personnalisée à l’autonomie (APA) peuvent avoir une très forte incidence sur la rentabilité des structures. Céciile, aide soignante à domicile dans un SSIAD en Corrèze Du côté de l’Association des départements de France, on explique ces variations par des différences de structures sociodémographiques des territoires : « Le taux de bénéficiaires de l’APA parmi les 60 ans varie de 2,6 à 9,4 % ». « Quand vous êtes dépendant, il faut choisir votre lieu d’habitation » Au cours de ce mandat, l’autonomie financière des Conseils départementaux s’est considérablement restreinte puisqu’ils n’ont pratiquement plus de leviers fiscaux. Les élections de juin n’en sont pas moins l’occasion d’affirmer des choix politiques, même dans un contexte contraint. « Gros morceau » des compétences sociales, le financement de l’autonomie révèle des écarts qui vont du simple au double et qui ne sont pas forcément corrélés à la « richesse » du département. Le financement moyen de l’APA est de 21 euros. La « fourchette » va de 17 euros à près de… 30 euros. Des départements comme l’Isère ou le Maine-et-Loire sont parmi les plus généreux. « Les tarifs les plus hauts sont liés à des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens », relève le chef d’entreprise Patrick Quinte. La France, pays des 365 fromages et des 95 tarifs APA. Avec des restes à charge qui peuvent plomber des petites retraites. Marie Reine Tillon fait ce constat : « Quand vous êtes dépendant, il faut choisir votre lieu d’habitation ». Innovation : la Corrèze a créé une académie des métiers de l'autonomie La Corrèze a fait partie des départements dont le tarif APA était le plus faible. Il est aujourd’hui dans la moyenne avec un tarif de 21 euros de l’heure. Un effort qui s’est accompagné d’un dispositif de financement différencié, comme l’explique le président du Conseil départemental Pascal Coste : « La prise en charge de ceux qui sont en dessous de 1.200 euros de retraite par mois est intégrale. Au-dessus, il y a une participation de 5 euros sur le reste à charge ». L'académie des métiers de 'autonomie a démarré il y a trois mois en Corrèze Lancée en début d’année, une innovation devrait participer à la reconnaissance et à l’attractivité du métier : l’académie des métiers de l’autonomie. Dans tous les services d’aide à domicile du département, des professionnelles sont valorisées en tant qu’ambassadrices ou tutrices, dans l’objectif de faire découvrir le métier. Une formation en alternance sur un an a été mise en place avec le lycée agricole de Naves. « Des tutoriels ont été créés par les professionnelles confirmées et intégrés aux téléphones de service : ils permettent aux nouveaux salariés de savoir comment s’y prendre face à une situation donnée », complète Pascal Coste. D'autres départements cherchent à s'inspirer de ce modèle La Corrèze actionne également le levier de la mobilité : « En partenariat avec le Crédit agricole, nous avançons 8.000 euros sur le financement du permis de conduire et de l’acquisition du véhicule ». La question du recrutement est devenue localement moins problématique : « Nous avons 37 personnes qui sont entrées dans le métier en trois mois. À ce rythme-là, nous devrions pouvoir remplacer les départs en retraite », se félicite le président du Conseil départemental. D’autres départements veulent s’inspirer du « modèle corrézien ». Sur leur lancée, les Limousins veulent élargir les compétences de son académie à tout le secteur du domicile : des soins infirmiers aux assistantes maternelles. Julien RapegnoL’académie des métiers de ‘autonomie a démarré il y a trois mois en Corrèze.

Lancée en début d’année, une innovation devrait participer à la reconnaissance et à l’attractivité du métier : l’académie des métiers de l’autonomie. Dans tous les services d’aide à domicile du département, des professionnelles sont valorisées en tant qu’ambassadrices ou tutrices, dans l’objectif de faire découvrir le métier. Une formation en alternance sur un an a été mise en place avec le lycée agricole de Naves. « Des tutoriels ont été créés par les professionnelles confirmées et intégrés aux téléphones de service : ils permettent aux nouveaux salariés de savoir comment s’y prendre face à une situation donnée », complète Pascal Coste.

D’autres départements cherchent à s’inspirer de ce modèle.

La Corrèze actionne également le levier de la mobilité : « En partenariat avec le Crédit agricole, nous avançons 8.000 euros sur le financement du permis de conduire et de l’acquisition du véhicule ». La question du recrutement est devenue localement moins problématique : « Nous avons 37 personnes qui sont entrées dans le métier en trois mois. À ce rythme-là, nous devrions pouvoir remplacer les départs en retraite », se félicite le président du Conseil départemental.
D’autres départements veulent s’inspirer du « modèle corrézien ». Sur leur lancée, les Limousins veulent élargir les compétences de son académie à tout le secteur du domicile : des soins infirmiers aux assistantes maternelles.

Julien Rapegno

Source LA MONTAGNE.

 

«Sans les 8 millions d’aidants, il faudrait financer autant de professionnels de santé !»…

Comment gérer sans eux la dépendance ou le handicap au quotidien ?

Il y aurait en France 8 millions d’aidants, indispensables compléments des services de santé.

«Sans les 8 millions d'aidants, il faudrait financer autant de professionnels de santé !»

 

Au coeur d’une crise sanitaire qui a souvent compliqué leurs missions de tous les jours, ils sont aujourd’hui en attente de soutien et de reconnaissance. C’est ce qu’explique pour Pourquoi Docteur le Dr Imad Sfeir, président du réseaux RESEDA (réseau des maladies neuro-évolutives) de Bourgogne-Franche Comté, très impliqué dans l’accompagnement de la dépendance.

– Quelle est la situation des aidants alors que la deuxième vague a entraîné une nouvelle période de confinement ?

Dr Imad Sfeir : Les aidants ont encore plus besoin aujourd’hui d’être soutenus ! Cette deuxième vague de l’épidémie et le confinement qui l’accompagne impacte leurs déplacements, leur vie quotidienne, au moment même où ils doivent être encore plus aux côtés des personnes aidées. Pour cette raison ils ont besoin d’être à leur tour soutenus psychologiquement et de se voir proposer des solutions de répit. C’est pour cette raison que le réseau RESEDA propose aux aidant le soutien de notre équipe de psychologues, même s’ils ne peuvent intervenir qu’à distance en raison du confinement. Et nous avons d’autres activités, également en distanciel, qui leur permettent de bien s’occuper d’eux-mêmes, et surtout de passer du temps à penser à autre chose que la maladie ou aux difficultés des personnes qu’ils accompagnent.

– Mais des aidant, notamment ceux qui accompagnent des personnes à domicile, sont parfois très isolés. Comment vous parvenez, dans les circonstances actuelles, à rester en relation avec chacun d’entre-eux ?

Dr I.S. : Depuis bien avant la crise, par le biais de notre réseau, nous avions organisé des contacts et des temps de rencontre avec les aidants, comme des visites de musée pour les couples ‘aidant-aidé’, mais aussi des cours de cuisine, des ateliers de couture, que l’on a pu poursuivre en distanciel et de garder le contact avec les aidants pendant cette deuxième vague et cette nouvelle période de confinement.

– Cela, c’est l’action de votre réseau. Mais d’une façon plus générale, alors que le rôle des aidants est essentiel, est-ce qu’on leur apporte suffisamment de soutien, de reconnaissance ?

Dr I.S. :Même si l’on a fait des efforts depuis quelques mois puisque l’on a mis en place des dispositifs pour aider financièrement les aidants en leur versant des forfaits annuels pour les aider à prendre du répit, une sorte de congés payés, on n’est pas allés jusqu’au bout pour répondre à leurs besoins et les remercier. Or, sans les aidants – ils représentent environ 8 millions de personnes en France si l’on considère comme tels les proches aidants de personnes handicapées ou dépendantes- il faudrait financer autant de nouveaux professionnels de santé ! Il faut reconnaître le rôle très important qu’ils jouent dans la prise en charge des personnes malades en France, reconnaître aussi leur statut et les aider dans des moments difficiles comme ceux que nous traversons pour qu’ils puissent continuer à s’occuper de ces malades.

– Qu’est-ce qui permettrait, selon vous, de mieux les accompagner ?

Dr I.S. : J’insiste, il faudrait d’abord une reconnaissance de leur statut d’aidant et cette reconnaissance elle passe beaucoup par quelque chose de très important pour eux, la possibilité de prendre des congés payés. Ils ont droit aujourd’hui à trois mois sur l’ensemble du temps passé auprès des personnes aidées mais il faudra aller bien au-delà pour que les aidants puissent avoir de vrais temps de répit.

– Ce qui implique qu’il faut aussi pouvoir les remplacer auprès de la personne aidée …

Dr I.S. : Exactement. Mais il faudra également apporter un soutien financier aux couples aidant-aidé pour qu’ils puissent partir en vacances ensemble : il y a plusieurs centres en France qui peuvent les accueillir mais tout cela coûte de l’argent … Il faut absolument aider l’aidant à tenir le coup !

– Cette aide matérielle, vous l’évaluez à quel niveau ?

Dr I.S. :On a déjà fait bouger les choses puisque l’on propose aux aidants des forfaits de 500 euros par an pour prendre du répit. Mais ce n’est pas suffisant. Si l’on a amélioré le système, il faut pourtant aller plus loin et dans ce que l’on propose financièrement, et dans la reconnaissance en termes de statut.

– Concrètement, quelles seraient les décisions, les mesures à prendre ?

Dr I.S. : On pourrait par exemple financer l’hébergement pour des séjours temporaires en établissements mais aussi prendre en charge les transports pour les accueils de jour. Actuellement, une grande partie de des frais reste à la charge de l’aidant. Mais pour cela il faut des lois qui améliorent les financements et la prise en charge.

– Cette crise sanitaire avec ses conséquences sur les aidants peut-elle aboutir à ce que les choses avancent plus vite ?

Dr I.S. : C’est effectivement le possible côté positif de la crise, il y a toujours des côtés positifs dans une crise ! Cela peut être un accélérateur pour faire avancer certaines lois, aller plus loin dans certains dispositifs si tout le monde a compris les enjeu d’une aidance en difficultés … Les pouvoirs publics semblent avoir pris conscience du rôle de l’aidant mais il faut maintenant faire avancer cette nouvelle loi « grand âge et autonomie » que l’on attend toujours avec impatience, qu’il y ait des dispositifs supplémentaires pour soutenir les aidants et leur apporter la reconnaissance qui leur est due !

Source POURQUOI DOCTEUR.

Saint-Omer : la vaccination à domicile a commencé pour les personnes très dépendantes, une première en France…

A Saint-Omer, un service de vaccination à domicile pour les personnes très dépendantes a été mis en place.

Cette initiative est l’une des premières en France.

Saint-Omer : la vaccination à domicile a commencé pour les personnes très dépendantes, une première en France. Illustration

 

Christiane Martel, la présidente de l’UNA de Saint-Omer (Union nationale de l’aide, des soins et des services aux domiciles), a imaginé un dispositif pour vacciner ceux qui ne vont plus que « du lit à la fenêtre, puis du lit au fauteuil et puis du lit au lit », raconte-t-elle, reprenant le texte de Jacques Brel.

Si le chanteur belge réservait sa formule pour décrire la condition des personnes très âgées, celle de l’Audomaroise s’étend plus largement à toutes les personnes très dépendantes qui ne peuvent plus se déplacer pour aller dans un centre de vaccination ou chez leur médecin traitant. « Dès le début de la campagne de vaccination, j’ai pris conscience qu’il y allait avoir une difficulté pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer », explique-t-elle. Les ainés représentent une part importante des personnes éligibles au dispositif. Christiane Martel fait le parallèle avec les Ehpad, dans lesquels ce sont les médecins qui se déplacaient pour vacciner. « Il y a des personnes âgées à domicile qui sont aussi accablées que celles dans les Ehpad. C’est d’ailleurs cette solitude qui les a éloignées du virus ».

Certes, fait-elle remarquer, « le transport par ambulance serait possible » jusqu’à un centre de vaccination mais celui-ci peut-être « traumatisant ». Devant ce constat, elle a travaillé avec le directeur de la clinique de Saint-Omer, Thomas Ballenghien, pour trouver un protocole adéquat.

Six seringues chargées de Pfizer dans une valise

Les autorisations ont tardé à arriver. Mais depuis le 9 avril, Amélie Deboudt, l’infirmière coordinatrice du SSIAD de Saint-Omer (Services de soins infirmiers à domicile), porte l’espoir et les vaccins jusqu’aux domiciles de ces personnes. Au 14 avril, elle avait réalisé deux tournées (c’est la seule à les faire), le 9 et le 13 avril. Lors de celles-ci, six vaccinations ont été réalisées à chaque fois. « Le matin, je me rends d’abord au centre de vaccination de la clinique de Saint-Omer pour me faire remettre une petite valise contenant six seringues chargées de vaccin Pfizer (c’est-à-dire le nombre de doses contenues dans un flacon, ndlr). J’ai ensuite six heures pour les injecter », narre Amélie Deboudt.

L’infirmière profite de la présence de l’aide-soignante, venue pour faire la toilette quotidienne du futur vacciné, pour injecter le vaccin. « J’arrive souvent au début de la toilette, qui peut durer jusqu’à trois quarts d’heure. Moi je n’en ai que pour quelques minutes. Cette organisation permet de laisser la personne vaccinée sous la surveillance de l’aide-soignante. Il y a également un médecin référent et que je peux appeler en cas de problème », détaille l’infirmière qui assure ne pas avoir rencontré, pour l’instant, des personnes avec de l’appréhension. « Au contraire, elles sont souvent contentes et soulagées », précise-t-elle. Elle fait ces tournées en plus de son travail quotidien. Pour l’instant, il est donc compliqué de les multiplier, pourtant la demande est là.

Le protocole, imaginé dans le Pas-de-Calais, pourrait être utilisé ailleurs en France. C’est déjà le cas dans les Vosges. A Saint-Omer, le nombre de personnes identifiées pour bénéficier du service serait actuellement de 50.

Source FR3.

Covid-19 : comment les résidents des Ehpad vont pouvoir « retrouver une vie sociale »…

Le gouvernement a annoncé un assouplissement des restrictions dans les Ehpad. Ce nouveau protocole sanitaire entre en vigueur dès le samedi 13 mars.

Covid-19 : comment les résidents des Ehpad vont pouvoir "retrouver une vie sociale" (FRANCOIS NASCIMBENI / AFP)

 

C’est une « première phase d’assouplissement ». La ministre chargée de l’Autonomie a annoncé, vendredi 12 mars, un allègement du protocole sanitaire mis en place dans les Ehpad pour lutter contre le Covid-19. « Les résidents vaccinés vont pouvoir retrouver une vie sociale », s’est félicitée Brigitte Bourguignon dans un entretien au Parisien.

Sorties avec ou sans période d’isolement, reprise des activités collectives, suppression des parois en plastique lors des visites… Franceinfo fait le point sur les nouvelles préconisations dans ces établissements.

Les sorties à nouveau possibles

Le nouveau protocole applicable dans les Ehpad permet aux résidents de sortir pour voir leurs proches, dès le samedi 13 mars. « Quel que soit leur statut vaccinal et immunitaire, [ils] doivent retrouver les mêmes droits que le reste de la population, comme la possibilité de voir leurs proches, à l’extérieur ou à l’intérieur de l’établissement », a expliqué Brigitte Bourguignon dans un communiqué.

Les résidents vaccinés (c’est-à-dire ceux qui ont reçu deux injections il y a plus de 15 jours) « pourront se rendre chez leurs proches, sans se faire tester avant et après et s’isoler sept jours dans leurs chambres », précise la ministre dans Le Parisien. Et de rappeler que « 87% [des résidents en Ehpad] ont reçu une première dose, 62% les deux et 50% bénéficient d’une couverture maximale ». 

Les personnes âgées non vaccinées seront elles aussi autorisées à sortir. Ces résidents devront toutefois respecter le précédent protocole : ils devront ainsi se faire tester et s’isoler durant sept jours à leur retour.

« Certains n’ont pas pu recevoir de doses parce qu’ils étaient souffrants au moment de la campagne ou parce qu’il y avait un cluster dans leur établissement. Ce n’est souvent pas volontaire, on ne peut donc pas introduire une discrimination, ce serait une double peine. »

Brigitte Bourguignon, ministre déléguée en charge de l’Autonomie

dans « Le Parisien »

Selon la ministre, c’est « la seule distinction » entre résidents vaccinés et non vaccinés. « Il est hors de question d’exclure [ces derniers] des activités dans les Ehpad. Il serait inhumain de dire : ‘Tu n’es pas vacciné, tu restes dans ta chambre' », ajoute Brigitte Bourguignon dans les colonnes du Parisien.

Les activités collectives « réautorisées »

Les conditions de vie et de visite à l’intérieur des Ehpad sont, elles aussi, assouplies. « Maintenant qu’elles sont protégées [par le vaccin], les personnes âgées veulent pouvoir toucher leurs enfants, les prendre dans les bras, leur parler sans barrière… Elles ont besoin de retrouver une vie plus normale et je vais les y aider ! » promet Brigitte Bourguignon. Les activités collectives seront à nouveau autorisées, tout comme les visites des familles dans les chambres.

« Beaucoup m’ont dit : ‘Ma mère, mon père est sourd, je suis obligé de hurler dans un salon’. Ils en souffrent beaucoup. Leur redonner ces moments d’intimité est primordial. »

Brigitte Bourguignon

dans « Le Parisien »

La ministre demande également la suppression des parois en Plexiglas, qui « posent problème, surtout aux personnes avec des troubles cognitifs qui ont besoin de toucher, d’avoir un contact humain pour se repérer ». Les seniors « ont perdu les repères de leur domicile, de leurs habitudes, de leurs voisins, alors si en plus elles doivent voir leur propre famille derrière un plastique, ce n’est pas possible », souligne Brigitte Bourguignon.

La situation réévaluée tous les 15 jours

Cet assouplissement n’est qu’une « première phase », prévient toutefois la ministre, alors que le Haut Conseil de la santé publique s’est opposé à un allègement des mesures dans les Ehpad. « On reste très prudent », assure-t-elle, ajoutant que « ces recommandations pourront être adaptées ». « Tous les quinze jours, nous ferons un bilan, avec les fédérations et les acteurs, pour savoir si [cet assouplissement] est perçu comme trop souple ou trop rigide, poursuit-elle. Certains établissements n’ont pas attendu pour alléger les règles mais il est important de leur donner un cadre. Certains le demandent, ils ont besoin d’être sécurisés. »

Chaque direction d’établissement doit élaborer ces mesures d’assouplissement, selon la situation épidémique locale et l’avancement de la campagne vaccinale, en lien avec l’Agence régionale de santé. Le ministère des Solidarités et de la Santé précise en outre à France Bleu que « les sorties dans la famille ne sont pas autorisées dans les zones où un confinement local est en vigueur sauf dérogations exceptionnelles ».

Les mesures sanitaires plus générales continueront évidemment de s’appliquer. Et le ministère de citer : « gestes barrières, isolement des cas contacts pendant 7 jours, isolement des cas confirmés pendant 10 jours, dépistage régulier des résidents et des professionnels ». Les visiteurs doivent présenter un test négatif de moins de 72 heures et les résidents devront se faire tester après une visite, ajoute France Bleu. Enfin, l’assouplissement des restrictions « doit être remis en cause dès la présence d’un cas confirmé au sein de l’établissement ».

Les soignants appelés à se faire vacciner

Dans Le Parisien, la ministre en charge de l’Autonomie relève « qu’il reste de gros efforts à faire » sur la vaccination des soignants. « Dans certains établissements, 50% des soignants sont vaccinés, dans d’autres, seulement 19%, ce n’est pas tolérable », regrette-t-elle, appelant ces professionnels à leur « responsabilité ».

« Si j’aime mieux inciter qu’obliger, la vaccination relève de l’acte citoyen que l’on doit presque aux personnes avec qui l’on vit. »

Brigitte Bourguignon, ministre déléguée en charge de l’Autonomie

dans « Le Parisien »

« C’est paradoxal, le personnel a parfois choisi de s’enfermer avec les résidents lors de la première vague par peur que le virus n’entre dans l’Ehpad et aujourd’hui, ils refusent le vaccin. Il y a de la peur, engendrée par les réseaux sociaux, et on préfère relever le moindre petit incident alors que 4 millions ont déjà reçu au moins une première dose, c’est incroyable », déplore-t-elle. Pour tenter de convaincre ces soignants, la ministre Brigitte Bourguignon compte sur les directions d’établissement chargées par l’exécutif de « persuader » et d’« expliquer ».

Source FRANCE INFO.

Des scientifiques mettent au point une nouvelle thérapie génique contre une maladie oculaire. Ce traitement pourrait aussi avoir des effets sur les maladies d’Alzheimer et Parkinson…

Des chercheurs du Trinity College de Dublin ont découvert une thérapie génique qui pourrait traiter les maladies oculaires.

Ce traitement pourrait aussi avoir des effets sur les maladies d’Alzheimer et Parkinson.

Des chercheurs pensent avoir trouvé un traitement pour soigner l’atrophie optique.

 

Cela pourrait être une découverte très importante pour la médecine. Des scientifiques du Trinity College de Dublin viennent de développer une nouvelle thérapie génique qui promet de traiter un jour l’atrophie optique (aussi appelée A.O.D. ou maladie de Kjer) une maladie oculaire. Cette dernière entraîne une perte progressive de la vision, et touche des milliers de personnes dans le monde.

Dans l’étude, publiée le 26 novembre dans la revue scientifique Frontiers in Neuroscience , les chercheurs du Trinity College, en collaboration avec le Royal Victoria Eye and Ear Hospital, et le Mater Hospital, expliquent que cette découverte pourrait également impliquer d’autres troubles neurologiques dus au vieillissement.

Une maladie qui peut s’aggraver

Les symptômes de l’A.O.D. comprennent une perte de vision modérée, et certains défauts de vision des couleurs. Cependant, la gravité de la maladie dépend du patient. Elle peut, dans certains cas, peut mener jusqu’à la cécité.

Pour le moment, il n’existe aucun traitement capable de prévenir ou de guérir cette maladie.

Mais selon les chercheurs, leur découverte pourrait changer la donne. Ils se sont intéressés au gène OPA1. Ce dernier est essentiel au bon fonctionnement des mitochondries, de petites structures présentes dans les cellules et qui produisent leur énergie.

L’insuffisance de la fonction mitochondriale est responsable de l’apparition et de la progression du trouble de la vision chez les personnes atteintes d’A.O.D.

Un espoir pour traiter les maladies d’Alzheimer et Parkinson

L’un des chercheurs, le docteur Maloney, explique : « Nous avons utilisé une technique de laboratoire qui permet aux scientifiques de fournir un gène spécifique aux cellules qui en ont besoin, en utilisant des virus non dangereux spécialement élaborés. Cela nous a permis de modifier directement le fonctionnement des mitochondries dans les cellules que nous avons traitées, en augmentant leur capacité à produire de l’énergie qui, à son tour, les protège des dommages cellulaires. »

Si le chemin est encore long pour parvenir à un traitement fiable, les scientifiques se félicitent des avancées positives de leurs travaux.

Car en plus de ces maladies, le dysfonctionnement des mitochondries est l’une des raisons des troubles neurologiques, tels que les maladies d’Alzheimer ou de Parkinson, qui se détériorent au fil du temps, et qui sont associées aux troubles du vieillissement. Le traitement pourrait donc aussi être efficace sur ces maladies.

Source OUEST FRANCE.

« Six centimes d’augmentation en dix ans » : les travailleurs sociaux du Calvados crient leur colère…

Ils se surnomment les « invisibles ». Les salariés du secteur de l’action sociale se sont rassemblés ce lundi midi devant les locaux de l’institut régional du travail social à Hérouville-saint-Clair près de Caen.

Ils dénoncent une baisse de leur pouvoir d’achat et des conditions de travail dégradées.

Une centaine de salarié.es du secteur social du Calvados se sont rassemblé.es devant le siège de l'Institut régional du travail social à Hérouville-saint-Clair.

 

Éducateurs spécialisés, aides soignants… ils travaillent auprès de personnes handicapées ou de jeunes en rupture familiale. Dans le département du Calvados, cela représente plus de 5000 salarié.es. Un métier dur, éprouvant et qui ne cesse de se dégrader, selon les syndicats qui appelaient à la mobilisation. Une centaine de personnes se sont rassemblées à la mi journée devant le siège de l’IRTS, l’institut régional du travail social, à Hérouville-saint-Clair. La CGT, FO et Sud dénoncent une baisse de 30% du pouvoir d’achat en 20 ans.

Beaucoup de travailleurs pauvres parmi les salariés du secteur social

Aurélien Syren est délégué CGT à l’Oeuvre Notre Dame, foyer de protection de l’enfance à Troarn. « C’est un secteur où les temps partiels sont légions, et quand on est à 70% du SMIC, on se retrouve dans la catégorie des travailleurs pauvres » dénonce-t-il.Selon les syndicats, ces dégradations ne sont pas uniquement liées aux politiques nationales. « Elles sont aussi le fait du Syndicat Employeur du secteur« . Une délégation a été reçue par la direction.

« Les travailleurs sociaux ont du mal à se mobiliser pour dénoncer leur propre situation »

Dehors devant un brasero, la colère gronde. Frédéric Motel est éducateur spécialisé à l’institut de Démouville. Il s’occupe de jeunes en difficulté. « Ce n’est pas évident pour nous de débrayer, car on ne veut pas laisser ces jeunes » s’excuse-t-il. Mais face à des salaires bloqués depuis des années, il tenait à venir manifester. « Six centimes d’augmentation en 10 ans c’est scandaleux ! » s’emporte-t-il. Il dénonce aussi un secteur de plus en plus soumis aux contraintes administratives, « alors que notre cœur de métier c’est l’humain« .

Sylvie Ledunois est elle venue avec ses collègues du foyer de vie de l’ACSEA à Saint-Loup-Hors, près de Bayeux. « Je travaille dans ce secteur depuis 37 ans et j’ai vu les conditions de travail se dégrader » raconte cette aide-soignante. Et elle ne comprend pas qu’elle et ses collègues aient été exclus du Ségur de la santé. « Nous avons fait face à la pandémie, il y a eu un cluster dans notre foyer avec neuf cas positifs, et nous avons dû nous battre pour avoir la prime ! Alors que les personnes dont nous nous occupons sont dépendantes et que nous leur prodiguons des soins, c’est anormal. »

Source FRANCE BLEU.

Le calcul de l’allocation aux adultes handicapés organise une dépendance intenable dans le couple… Vidéo…

Une pétition déposée au Sénat relance la mobilisation pour que le versement de l’AAH soit désolidarisé des revenus du ou de la partenaire.

 

Aujourd’hui, en France, quasiment 1,2 million de personnes touchent l’AAH, l’allocation aux adultes handicapés. Cette allocation de solidarité est destinée à assurer aux personnes en situation de handicap un revenu minimum. Elle est attribuée sous réserve de respecter des critères d’incapacité, d’âge, de résidence et de ressources. Son objectif majeur est de palier l’absence ou la faiblesse de revenus d’activité d’une personne en situation de handicap. En effet, non seulement certaines de ces personnes ne sont tout simplement pas en mesure de travailler, mais nombreuses sont celles qui sont victimes de discrimination à l’embauche. Ainsi, 18% des personnes en situation de handicap sont au chômage, soit environ deux fois plus que la moyenne nationale.

Mais, l’AAH est ce que l’on appelle une allocation différentielle: c’est-à-dire que son montant peut varier selon les ressources du foyer. Et, c’est là que le bât blesse.

En effet, comme l’explique Kevin Polisano dans une courte vidéo mise en ligne en 2017, si une personne handicapée touchant l’AAH (dont le montant est aujourd’hui de 900 euros mensuels) se met en couple avec une personne valide dont le salaire dépasse 1.625,40 euros par mois (soit 19.505 euros par an), l’AAH lui est supprimée. C’est-à-dire que la personne handicapée se retrouve sans aucun revenu personnel.

Une accentuation de la dépendance

Pour les associations qui dénoncent cette disposition, ce conditionnement du versement de l’AAH crée des situations intenables autant financièrement que socialement et psychologiquement. Pour Odile Maurin, présidente de l’association Handi-Social, les conséquences sont triples: «La conséquence pour la personne handicapée, c’est qu’elle se retrouve en situation de dépendance financière vis-à-vis du conjoint ce qui peut entraîner des relations conflictuelles et de la violence et un sentiment d’infériorité. Il y aussi une conséquence sur la personne valide: elle accepte volontairement de se mettre en situation de pauvreté parce qu’elle a choisi de vivre avec quelqu’un en situation de handicap. Il y a enfin une conséquence sur le couple: on met les deux conjoints dans une situation de pauvreté.»

Le premier point est essentiel et témoigne d’une vision validiste du handicap, comme l’explique Cécile Morin porte-parole du Collectif lutte et handicaps pour l’égalité et l’émancipation: «Les politiques mises en œuvre par ce gouvernement organisent une dépendance des personnes handicapées. Cette mesure conduit à reproduire dans l’ordre des relations familiales la dépendance, la domination et le risque d’infantilisation dont les personnes handicapées font déjà l’objet de manière systémique. Ça accrédite l’idée que les personnes handicapées ne seraient pas des sujets de droit, adultes, autonomes, capables de choisir avec qui elles ont envie de vivre. Cela renforce l’idée que les personnes handicapées seraient des objets de charité et de protection soumises à une domination au sein de foyer.»

Même son de cloche du côté de Clémentine du collectif Les Dévalideuses: «On intériorise l’idée que les personnes handicapées sont des fardeaux au sein d’une société validiste, qu’elles sont dépendantes, qu’elles n’ont pas le droit d’avoir leur revenu propre, que leur autonomie ne vaut pas le coup.»

«Certaines personnes handicapées ne s’installent pas avec leur partenaire parce que l’autre ne pourra pas faire vivre le foyer seul.»

Clémentine du collectif Les Dévalideuses

Stéphane, qui souffre d’un syndrome d’Ehlers-Danlos et touche l’AAH depuis dix ans témoigne: «Avec ce fonctionnement l’État nous fait comprendre que nous sommes un poids dont quelqu’un doit se charger, et que si quelqu’un vit avec nous, c’est à lui d’assumer. Quand on est handicapé, on subit une pression à la performance. On n’arrête pas d’être remis en question, tout le temps. Qui veut de ça dans un couple?»

Le jeune homme dénonce le prix de l’amour subi par les personnes handis: «Vous imaginez si une loi vous dictait qui vous avez un peu le droit d’aimer, mais pas trop, et qui vous n’avez pas du tout le droit d’aimer? C’est ce qu’il se passe avec l’AAH. Le mariage ne nous est pas rendu illégal, mais il est quand même passible de sanctions.» Clémentine ajoute: «Les personnes handicapées peuvent se se dire: “Je ne vais pas m’installer avec la personne dont je suis amoureuse parce que la CAF va me retirer mon AAH”. Certaines ne s’installent pas avec leur compagnon ou leur compagne parce que l’autre ne pourra pas faire vivre le foyer tout seul.» Cécile Morin complète: «Cela nous renvoie au fait qu’au regard de la société, la vie affective et psychologique des personnes handicapées ne compte pas.»

Les femmes exposées à la violence

Cette vision validiste est aussi une vision patriarcale du couple, comme l’exprime Stéphane: «Notre société considère le couple comme un genre d’individu unique composé de sous-individus pas vraiment distincts. Et si on prétend être sortis de cette vision rétrograde depuis les années 1960, ça reste l’approche fondamentale de l’État.»

En effet, la personne en situation de handicap devient totalement dépendante financièrement. «Cela crée un rapport de domination, explique Clémentine. Si le conjoint valide gagne plus que le salaire moyen des Français, la personne handicapée dépend totalement de lui et devra demander pour la moindre dépense. Dans un couple valide/handicapé, il peut déjà y avoir des biais de pouvoir par rapport à la dépendance physique. On ajoute une dépendance financière qui peut être source de tensions au sein du couple, et de violences.»

« 34% des femmes handicapées ont subi des violences physiques ou sexuelles de la part de leur partenaire, contre 19% des valides. »

Étude de la Dress

La dépendance financière accroît le risque de violences physiques et psychologiques chez les femmes en situation de handicap, qui constituent déjà la population la plus concernée par les violences au sein du couple. En 2014, l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne estimait en 2014 que 34% des femmes handicapées avaient subi des violences physiques ou sexuelles de la part de leur partenaire, contre 19% des valides. Une étude rendue publique le 22 juillet 2020 par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Dress) confirme ces chiffres dramatiques. «Soumission et violences peuvent s’installer du fait de cette dépendance», explique Clémentine.

Et, en cas de violences subies, il est extrêmement compliqué de quitter son compagnon. «C’est évidemment très difficile de quitter son conjoint dans ces conditions, d’autant plus s’il est aidant familial», note Cécile Morin. Quitter l’autre signifie vivre plusieurs mois sans aucun revenu: «La CAF va mettre plusieurs mois à recalculer puis payer l’AAH» déplore Odile Maurin.

Obstination de l’administration

Aujourd’hui, le cabinet de Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées –qui n’a pas répondu à nos sollicitations par mail, campe sur son leitmotiv: «La solidarité nationale complète la solidarité familiale, elle ne doit pas s’y substituer. Que la personne soit en situation de handicap ne constitue pas un motif qui permettrait de déroger à ce principe au cœur de notre organisation sociale.» Selon Odile Maurin, «sa conception de la solidarité nationale est une conception du XIXe siècle, une conception où la femme est toujours dépendante de l’homme». Clémentine ajoute: «Cette vision arriérée est accompagnée d’une volonté de dénaturaliser l’AAH en en faisant quelque chose conditionné à la recherche d’emploi sous prétexte de promouvoir l’indépendance des personnes handicapées.» Sauf que rien n’est fait pour aménager le travail pour ces personnes.

Depuis le 10 septembre 2020 et jusqu’au10 mars 2021 circule une pétition déposée au Sénat pour la désolidarisation des revenus du conjoint pour le paiement de l’allocation aux asultes handicapés.

Source SLATE.

Faut-il prendre une assurance dépendance ?…

Notre espérance de vie s’allonge, mais les risques de perdre notre autonomie augmentent eux aussi.

Les contrats « assurance dépendance » qui répondent à cette préoccupation fleurissent chez de nombreux assureurs aujourd’hui.
Sont-ils intéressants ?
Peut-on miser dessus ?
Découverte. 
Faut-il prendre une assurance dépendance ?

1 – Comment ça marche ?

Que couvre-t-elle : l’assurance dépendance offre une protection financière sous forme de rentes mensuelles aux personnes qui perdent avec l’âge leur autonomie et doivent faire face à des dépenses supplémentaires (aide à domicile, maison de retraite…).

Combien ça coûte : tout dépend des garanties souscrites. Plus l’assureur couvre de risques, plus le contrat sera à un prix élevé. L’âge au moment de la souscription et la rente que vous souhaitez recevoir influencent également le montant des cotisations (entre 30 et 80 euros/mois bien souvent).

Ce n’est pas un produit d’épargne : ne vous y trompez pas. Ce sont en principe des contrats dits « à fonds perdus ». Autrement dit, si vous vivez très bien jusqu’à la fin de votre vie, sans souci de dépendance, vous aurez cotisé pour rien pendant des années. Les cotisations seront perdues pour les héritiers, sauf si vous avez un contrat avec une épargne attenante.

Sachez-le : votre complémentaire santé peut avoir inclus une garantie dépendance dans le contrat que vous avez signé. Renseignez-vous. De nombreuses complémentaires santé comprennent aujourd’hui une garantie dépendance. Mais il ne s’agit que d’une clause secondaire et le montant de la rente est souvent faible.

2 – A quel âge souscrire ?

De nombreux assureurs proposent ces contrats aux personnes qui ont entre 50 et 75 ans.

N’attendez pas trop : il est préférable d’adhérer suffisamment tôt pour faire baisser les prix et quand vous êtes encore en pleine forme ! Pourquoi ? Tout simplement parce que vous aurez à remplir un questionnaire et à passer des examens de santé qui peuvent faire monter fortement la note s’ils dénoncent la moindre défaillance physique ou mentale.

En cas de profil « à risque » : une surprime peut vous être demandée. Vous pouvez faire face également à un refus ou à des exclusions (Certaines situations qui engendrent une dépendance peuvent ne pas être couvertes par le contrat. Lisez bien les clauses d’exclusion.). Si une pathologie par exemple est déjà avérée à la souscription du contrat et qu’elle peut entraîner une dépendance à plus ou moins long terme, celle-ci risque de ne pas être couverte.

Un conseil : vérifiez tous les termes du contrat avant de signer et faites jouer la concurrence.

3 – Ce qui déclenche la garantie

En cas de perte d’autonomie, les assureurs vont prendre en compte les actes de la vie quotidienne, à savoir s’habiller, s’alimenter, se laver, se déplacer… pour faire le point sur le degré de dépendance. En fonction de critères préétablis, il peut y avoir une prise en charge partielle (aide pour les repas…) ou totale (assistance en continue).

Le montant de la rente : il dépend des cotisations déjà versées, du contrat et des garanties souscrites, et s’élève en moyenne entre 300 et 600 euros/mois, voire beaucoup plus en fonction du contrat. La rente est alors versée 3 mois après l’avis du médecin-conseil de l’assureur.

Méfiez-vous car de nombreux contrats spécifient que pour que le paiement soit effectif, il faut qu’il n’y ait aucune possibilité d’amélioration de l’état de santé. Cela peut alors prendre des mois, voire des années avant que la garantie s’active, avec des formalités très compliquées.

Sachez aussi que la couverture est effective seulement si la dépendance survient au moins un an* après la souscription du contrat, voire 3 ans pour les maladies neuro-dégénératives comme Alzheimer. Si la dépendance survient pendant ce délai, aucune indemnité ne sera perçue, le contrat sera clôturé et l’assureur remboursera ou non les cotisations versées. Les assureurs n’appliquent pas en revanche de délai de carence en ce qui concerne la dépendance due à un accident.

4 – Est-ce vraiment intéressant de souscrire à une assurance-dépendance ?

Faites-vos calculs en commençant par vérifier si le montant de votre future retraite et l’ensemble de votre patrimoine vous permettront dans un certain nombre d’années de couvrir le coût d’un établissement spécialisé ou d’un maintien à domicile, à savoir environ 2 000 euros/mois.

Vous pouvez également bénéficier de l’APA (Allocation Personnalisé d’Autonomie) attribuée par les conseils généraux dont le montant varie entre 550 et 1 300 euros, en fonction du degré de dépendance et de vos ressources. Il vous faudra faire la demande de cette aide et remplir certaines conditions. Renseignez-vous auprès des centres d’action communale. Plus les ressources de la personne sont élevées, plus l’APA sera faible.

Après calculs, si cela ne suffit pas, une rente peut alors dans ce cas être intéressante et se cumuler. Attention : un grand nombre de contrats dépendance n’assurent que la dépendance totale. Pensez à choisir une assurance qui couvre également la dépendance partielle. Une alternative : l’assurance-vie peut être aussi un bon moyen d’épargner et d’assurer une rente en cas de perte d’autonomie.

Source PLANET.

La délicate question du consentement des personnes âgées en Ehpad…

En matière d’aide et de soin, les frontières entre contrainte et consentement sont plus floues qu’il n’y paraît.

Monsieur Duclos vient de donner son accord pour entrer dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, autrement dit un Ehpad. Il a enfin signé son contrat de séjour. Obtenir son adhésion n’a pas été une mince affaire. À la fin de son hospitalisation dans un service de psychiatrie, il voulait en effet rentrer chez lui, mais entre-temps son appartement a été vendu avec l’aide de ses enfants. Il a fini par accepter la solution qui lui était proposée, les personnels soignants ayant usé de quelques artifices.

Ils l’ont accompagné chez lui, comme il le souhaitait, mais en évitant de préciser que son chez-lui était désormais l’Ehpad. Pour faciliter les choses, ils ont soutenu ce pieux mensonge par une petite mise en scène. Avec l’aide des proches et du personnel de l’Ehpad, ils ont pris soin de placer dans sa future chambre quelques-uns de ses meubles et de tapisser les murs de photos de sa femme et de ses enfants. Monsieur Duclos s’est tout de suite senti chez lui.

Rassuré, il a signé sans protester le précieux contrat de séjour. Il semble même retrouver ses habitudes. À table, il aime accompagner son repas de quelques verres de vin. Certes, il aurait préféré avoir sa propre bouteille. Mais non, cela ne se passe pas ainsi dans l’Ehpad. Le directeur explique:

«Monsieur Duclos est un peu porté sur l’alcool. Il faut faire attention. Dans ce genre de cas, on utilise de petits verres. Comme cela, on lui sert du vin quand il demande… mais en faibles quantités. On répond à ses attentes, mais pas trop, et tout le monde est content.»

Cet exemple fictif illustre bien les difficultés de mise en application des principes de la démocratie sanitaire, en particulier en ce qui concerne la notion de consentement, dont les frontières sont parfois pour le moins incertaines.

L’adhésion doit rester libre

Depuis maintenant deux décennies, les politiques sanitaires et sociales cherchent à rendre plus démocratiques les prises en charge des patient·es ou des résident·es. Au centre de cette procédure: le consentement éclairé.

Sauf exception –en psychiatrie notamment–, aller à l’encontre de l’avis des personnes, les contraindre à se soigner ou à entrer dans tel ou tel établissement n’est pas autorisé, du moins en principe. L’individu doit consentir. Plus encore, il doit être informé, être tenu au courant des risques liés à l’intervention qui le concerne, et plus largement des conséquences de ses choix. Bref, il doit être éclairé et son consentement ne saurait être forcé. Son adhésion doit rester libre.

De ce point de vue, la procédure qui permet de faire entrer Monsieur Duclos dans un établissement ou de l’empêcher de boire trop de vin ne semble pas rentrer dans les cases de la démocratie sanitaire. Certes, il a bien signé un contrat de séjour. Mais il est clair que son consentement n’a pas été entièrement libre ni entièrement éclairé. Privé de son domicile, il n’avait plus d’autre choix que l’Ehpad. Les subterfuges imaginés par les aides-soignant·es avec l’aide des enfants, pour conjurer un éventuel refus et pour éviter le recours à la force, peuvent difficilement être considérés comme des informations visant à aider Monsieur Duclos à faire ses propres choix. La signature atteste de l’existence d’un consentement formel; mais celui-ci paraît plus embrumé qu’éclairé.

Peut-être n’y avait-il pas d’autres moyens pour obtenir l’acceptation de Monsieur Duclos. Et puis, pour les proches comme pour les professionnel·les qui avaient à cœur de trouver le meilleur cadre de vie possible pour Monsieur Duclos, cette solution constitue un compromis acceptable. Il n’en demeure pas moins que cette méthode qui s’appuie sur la ruse ne saurait servir de modèle.

La patientèle partenaire du personnel

Le modèle, il faut le chercher ailleurs. Notamment dans les formulaires d’information et de consentement qui sont proposés au patient ou à la patiente dès lors que celle-ci fait l’objet d’une intervention. Ces documents clarifient les choses. Ils constituent la preuve que la personne a bien été informée par le médecin, puisqu’ils expliquent les tenants et les aboutissants de l’intervention et listent tous les risques encourus, que ceux-ci soient mineurs ou majeurs, qu’ils soient rares ou fréquents. Ils indiquent ce qu’il convient de faire pour les réduire.

Ainsi éclairé·es, les patient·es, devenu·es partenaires des professionnel·les qui les soignent ou les prennent en charge, peuvent décider en toute connaissance de cause. Une telle démarche tend à être largement diffusée. Il suffit pour s’en convaincre de se reporter aux notices que l’on retrouve dans le moindre médicament ou bien encore aux contrats de séjour qui indiquent les droits et les devoirs de la résidente ou du malade quand celui-ci est hospitalisé ou, comme Monsieur Duclos, hébergé.

Un tel modèle produit certainement des effets positifs. Il fixe un idéal grâce auquel peut être mesuré l’écart entre la théorie et la pratique. Il est clair en effet –chacun·e peut en faire l’expérience– qu’on n’est jamais sûr qu’un consentement soit librement consenti.

Un modèle intéressant, mais à la portée limitée

L’information communiquée à la personne sur tous les risques auxquels celle-ci s’expose en prenant un traitement ou en acceptant une intervention suffit-elle à en faire un·e patient·e éclairé·e? La personne a beau être avertie, elle se lancera rarement dans une étude bénéfices/risques approfondie avant de prendre sa décision. Il y a fort à parier que, devant la masse des informations transmises, elle s’en remettra plutôt à l’avis ou à la prescription des praticien·nes, à la confiance qu’elle leur accorde ou non, à l’avis de proches, etc.

Le modèle n’est pourtant pas inutile. Il est même performatif au sens où il indique au patient ou à la patiente que celle-ci a désormais son mot à dire, et où il invite le ou la professionnel·le à faire preuve de vigilance concernant les droits et libertés des usager·es. Dans le cas de Monsieur Duclos, l’existence de ce modèle aide à s’interroger sur la qualité de sa prise en charge; il force le questionnement éthique.

Mais ce modèle a son revers. Il focalise en effet l’attention sur un moment particulier de la prise en charge et du soin, celui de l’acte proposé par un·e professionnel·le et que le patient ou la patiente accepte ou refuse. L’intervention chirurgicale en est la figure paradigmatique, mais on peut également évoquer la prise d’un traitement ou l’entrée dans un établissement par exemple.

De tels actes, ainsi détachés de leurs contextes, s’accommodent bien d’une approche en matière de choix rationnel selon laquelle l’individu, libre et dûment informé par un tiers, choisit entre deux options. Mais le soin ne se réduit pas à une succession de moments, détachables les uns des autres ni à une relation de face à face.

Un insaisissable consentement?

Le soin est un processus dans lequel sont enrôlées de multiples parties prenantes –soignant·es, soigné·es, proches, administrations, institutions, objets techniques, médicaments…– et où s’enchevêtrent des myriades de gestes et d’actes, les uns très techniques, les autres très banals, tous plus ou moins interdépendants.

Ces différentes activités ne peuvent être toutes anticipées, ni attribuées à chacun des acteurs et encore moins figurer dans des formulaires de consentement. Dans ces conditions, la décision est difficilement localisable dans l’espace et dans le temps. Elle se déploie dans toute la chaîne des intervenant·es sans pouvoir être véritablement attribuée avec certitude à l’un·e d’entre elles ou eux.

Or, dès lors que le soin est envisagé non plus comme un acte isolé et situé dans le temps, mais comme une activité faite de processus et de relations, le consentement change de nature. Il n’est plus donné –par le ou la patient·e– ni reçu –par le ou la professionnel·le– pour un acte déterminé, mais produit par de multiples interactions entre parties prenantes. Le consentement comme la décision résultent en quelque sorte d’un travail d’influence fortement distribué et dont la visibilité est particulièrement faible.

Ainsi, pour que Monsieur Duclos puisse se sentir chez lui, il aura fallu qu’une grande diversité d’acteurs s’emploient au travers de diverses micro-actions, plus ou moins coordonnées, à rendre in fine l’acceptation pratiquement inévitable. Il aura fallu que des proches se chargent de sélectionner des photos puis de les afficher, que le directeur de l’Ehpad accepte la personnalisation de la chambre, que le déménageur arrive en temps utile, que les aides-soignant·es aient déjà préparé le terrain quotidiennement, etc.

Cette approche du soin comme processus ouvre des questions éthiques qui sont loin d’être résolues. Comment en effet penser la démocratie sanitaire, comment s’assurer de la validité et de la légitimité du consentement individuel quand celui-ci devient insaisissable parce qu’enchâssé dans un processus de décision collective ?

Monsieur Duclos a finalement accepté sa nouvelle demeure. Sait-il que ce faisant il accepte de se soumettre aussi aux horaires des repas, à l’heure du coucher et à diverses autres règles? Probablement pas. Il les découvrira au fil du temps et finira peut-être par les accepter, faisant contre mauvaise fortune bon cœur. Quoi qu’il en soit, il ne peut revenir en arrière, c’est-à-dire retourner chez lui. En ce sens, son consentement actuel peut être considéré comme un peu forcé. Non point seulement par les règles de l’institution, mais aussi paradoxalement par lui-même, en raison des divers consentements qu’il a pu donner consciemment ou non, sans en mesurer toujours les conséquences, tout au long de la trajectoire de sa prise en charge.

Ce texte prolonge l’intervention menée par Livia Velpry dans le cadre du cycle national de formation 2018-2019 de l’Institut des hautes études pour la science et la technologie (IHEST).

Pour en savoir plus: Livia Velpry, Pierre A. Vidal-Naquet et Benoît Eyraud (dir.) (2018), Contrainte et consentement en santé mentale – Forcer, influencer, coopérer, Presses universitaires de Rennes.

Source SLATE.

 

 

Alzheimer : gros espoirs sur le masitinib d’AB Science…

AB Science indique qu’il y a moins de patients atteignant le stade de démence sévère avec son traitement masitinib par rapport au placebo, après 24 semaines de traitement.

Alzheimer : gros espoirs sur le masitinib d’AB Science

 

Le candidat traitement d’AB Science contre Alzheimer donne des résultats très encourageants. La société a indiqué que l’étude de phase 2B/3 (AB09004 – NCT01872598) évaluant le masitinib chez des patients atteints de la maladie sous sa forme légère ou modérée avait atteint son critère d’évaluation principal prédéfini. L’étude a démontré que le masitinib a généré un effet statistiquement significatif par rapport au contrôle sur le critère principal, à savoir la variation du score ADAS-Cog, un score qui mesure l’effet sur la cognition et la mémoire.

L’étude a également démontré que le masitinib a généré un effet statistiquement significatif sur le score ADCS-ADL, un score qui évalue l’autonomie et les activités de la vie quotidienne. Il y avait significativement moins de patients atteignant le stade de démence sévère avec le masitinib par rapport au placebo après 24 semaines de traitement. Les principaux résultats seront présentés avec plus de détails lors d’une conférence virtuelle qui se tiendra demain avec différents leaders d’opinion.

Un nouveau brevet a été déposé sur la base des résultats de l’étude AB09004. Ce brevet, s’il est accordé, permettrait à AB Science de conserver des droits exclusifs sur l’utilisation du masitinib dans la maladie d’Alzheimer jusqu’en 2041.

Source CAPITAL.