Alternance: porteurs d’un handicap, ils font le bonheur de leurs patrons…

Pour les chefs d’entreprise, les préjugés face au handicap restent tenaces.

Mais pour ceux qui ont osé donner leur chance à leurs apprentis, de belles surprises sont au rendez-vous.

Théo et Lenny pourraient vous en dire long sur la question.

Rencontres.

Théo veut encore apprendre et passer un brevet technique des métiers.

 

Dehors, la brume enveloppe encore Landrethun-le-Nord. Dans le fournil de la boulangerie-pâtisserie Wamen, l’équipe s’active depuis longtemps. On y trouve Théo, 21 ans. Il a le geste sûr. Il est arrivé chez Ludovic et Lydia Wamen en 2017.

L’affaire, née après le « SOS Villages » lancé sur TF1 par l’ancien maire, se développait. Le couple a vu entrer un gamin timide qu’ils ont dû pousser à faire un essai. Et… des trois candidats, il s’est imposé. Théo, pourtant, est différent : il est autiste mais ça, les patrons ne l’ont su qu’après, par sa maman. Ludovic, lui, a plutôt « vu un surdoué, qui aime quand tout est carré ».

Elève appliqué

Le jeune homme a failli rater sa vocation. « Après la 3e, j’ai fait un an de CAP agent polyvalent de restauration mais ça ne me plaisait pas. » Ici, avec 15/20 de moyenne au centre de formation de la chambre des métiers de Saint-Martin-Boulogne, il a enchaîné un CAP pâtisserie et une mention complémentaire pâtisserie, chocolaterie, confiserie, glacerie. Il rêve désormais de concours et « d’un BTM (brevet technique des métiers) pâtisserie-chocolaterie ».

Sans le Covid qui a tout chamboulé, le couple l’aurait embauché. Mais au fond, ils savent qu’il a intérêt à quitter leur giron rassurant, quasi familial.

Pour tester autre chose, dépasser ses craintes. Lydia le verrait bien formateur aussi, tant « il adore transmettre ce qu’il sait. » Mais d’abord son BTM. Il cherche une entreprise. Avis aux patrons !

Lenny, sur la route

Lenny et Denis, son papa.

Pour Lenny, 17 ans, conduire un camion, c’est un rêve de gosse. « J’allais avec mon père », Denis, 18 ans de boîte aux déménagements Leclercq, à Saint-Amand (rachetés par D-MAX).

L’école, par contre, ce n’était pas son truc. Kelly, sa maman, raconte sa dyslexie et sa dyspraxie. « Il ne savait pas lacer ses chaussures, tirer dans le ballon… » Mais ça, c’était avant.

« Mon mari a demandé si son entreprise prenait des apprentis. O n l’a poussé au début. » Lenny avoue : « J’ai hésité parce que pour moi, le CAP, c’était beaucoup d’écriture. » Pas ce qu’il préfère. « Je voulais travailler. Mais en fait c’est juste un peu d’école et j’ai l’aide qu’il faut » au centre de formation, l’AFTRAL de Prouvy. S’il ne comprend pas une question, une aide la lui reformule autant que nécessaire.

Gommer les idées fausses

Le CFA Relais Avenir Pro, à Avion, le suit et y veille. « Le pire pour lui, c’est de gérer le stress. Quand il a eu son scooter, on l’a accompagné plusieurs fois de Lourches à Saint-Amand pour qu’il mémorise la route. » Désormais, rien n’arrête Lenny. « Je n’ai plus peur de me perdre. J’ai mûri… et j’ai un salaire ! » Il se voit bien embauché sur place.

C’est tout le mal que lui souhaite David Patey, son patron. « On va essayer de le garder. Sinon, on l’accompagnera jusqu’à ce qu’il trouve un travail. Lenny se bat, on est fier de lui avoir donné sa chance. » Un conseil aux patrons ? « « Foncer, arrêter de croire que parce que quelqu’un est handicapé, il ne peut pas travailler. »

Âge, type de métiers, accompagnement… les questions qu’on se pose

Pas d’âge limite. « Il n’y a pas de limite pour le handicap. Au-delà de 30 ans, c’est souvent un processus de reconversion. ». 9 % des alternants seraient en situation de handicap.

Quels métiers ? « Tout dépend du handicap. » La dyspraxie n’est pas un obstacle à un CAP de paysager mais peut être incompatible avec la maintenance automobile, exigeant des gestes fins.

Des réticences. « Le handicap peut faire peur, par méconnaissance. Les chefs d’entreprises craignent d’être démunis. On est confrontés à des représentations désuètes : une déficience intellectuelle renvoie à la trisomie, l’autisme à Rain Man. Mais les employeurs ne sont pas dans l’opposition systématique, il faut les convaincre. C’est le travail du CFA Relais d’accompagner entreprises, familles et CFA. »

On lui renvoie souvent que les « quotas » légaux lui facilitent la tache. Or, « plus de 60 % sont dans des entreprises de moins de 5 salariés, non soumises à l’obligation. » L’AGEFIPH accorde différentes aides.

Son conseil. Demander un stage d’immersion. « 90 à 95 % des apprentis signent un contrat après. » Les préjugés tombent d’eux-mêmes.

L’insertion ? 60 % des apprentis trouvent un emploi après le diplôme. 80 % ont un niveau CAP. « Ce qui nous plombe, c’est l’insertion dans le secteur public » : 20 % !

www.avenirpro.fr

Source LA VOIX DU NORD.

 

 

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