À Assas, la maman d’un autiste reçoit une lettre anonyme parce qu’il parle avec des enfants…!

C’est une affaire qui a pas mal secoué le village d’Assas (Hérault) : Michelle et son fils autiste de 40 ans, Victor, ont reçu début décembre une lettre anonyme reprochant à ce dernier de parler à des enfants du village.

Sauf que Victor et sa mère, eux, ne voient pas où est le mal.

Michelle et son fils Victor, 40 ans, devant la lettre anonyme reçue le 8 décembre dernier

 

Quand vous entrez dans la jolie maison de Michelle et de son fils Victor, nichée au fond d’une impasse d’Assas, c’est leur chien qui vous accueille. Impressionnant, mais pas agressif pour un sou. Quand il n’occupe pas son emploi au sein de l’ESAT Kennedy à Montpellier, Victor a pris l’habitude de promener ce gros chien un peu pataud régulièrement dans les rues de la commune. Et quand il croise des enfants sur le chemin ou à la sortie de l’école, il engage la conversation. Il leur parle de sa passion, les trains. Il leur demande si ils ont des frères et des sœurs. Puis Victor passe son chemin. Il ne se passe strictement rien d’autre.

Victor, 40 ans, est handicapé. Il souffre du syndrome d’Asperger, une forme d’autisme. Il est forcément différent. Dans sa façon de communiquer. Mais c’est un jeune homme envahi de passions. Les trains, bien sûr, mais aussi la gastronomie ou encore le Pilates, une méthode d’entraînement physique qui s’inspire à la fois du yoga et de la gymnastique et pour laquelle il a été récemment diplômé.

Le coup de massue

Le 8 décembre dernier, comme tous les matins, Michelle ouvre sa boîte aux lettres. Elle y découvre une lettre anonyme, écrite sur un ordinateur et simplement signée « De nombreuses familles d’Assas ». Sur une seule et même page, les mystérieux expéditeurs préviennent qu’il s’agit « d’une lettre d’avertissement ».

« Nous n’acceptons pas qu’un homme de 40 ans parle avec des enfants. Et heureusement que ce n’est que parler pour le moment, jusqu’où ça pourrait aller si nous laissons faire les choses ? »

Michelle est sous le choc. Elle n’en parle pas tout de suite à Victor, pour ne pas le contrarier. Mais quand celui-ci finit par apprendre l’existence de ce courrier, il accuse le coup. Le jeune homme est incapable de retourner travailler. La psychologue de son ESAT lui conseille de prendre quelques jours de repos. Ce qu’il fait.

Sauf qu’il n’ose plus sortir de chez lui non plus. Il ne promène plus le chien, par peur de représailles à son encontre. Sa maman est révoltée. Elle se rend à la gendarmerie de Clapiers ou elle est d’abord accueillie en ces termes: « Mettez-vous à la place des parents… » Le lendemain, des enquêteurs se déplacent tout de même à leur domicile, et le parquet de Montpellier est avisé de cette affaire.

Une vague de soutien

Michelle veut absolument comprendre pourquoi on peut ainsi en vouloir à son fils, alors qu’en 20 ans de présence à Assas, il ne s’est jamais rien passé. Elle se rend à l’école du village et discute avec plusieurs parents. La plupart découvrent l’existence de cette lettre anonyme. Ils sont aussitôt scandalisés par le procédé et décident spontanément de lui apporter leur soutien. Dans une autre lettre signée par 12 familles du village, ils dénoncent les « propos déplacés et révoltants » du courrier anonyme.

« Nous souhaitons préserver et renforcer ce qui peut faire la richesse d’Assas, le lien entre les habitants, et Victor en est un bel exemple »

Dans une deuxième lettre de soutien, signée par neuf habitants (dont la comédienne Vanessa Demouy), ses auteurs, tout aussi ulcérés, affirment apprécier « la gentillesse de Victor » et ne pas comprendre « cette adversité incompréhensible ». Pendant quelques jours, une banderole a même été installée à l’entrée du village  sur laquelle était écrite « Assas soutient Victor et sa maman ».

Des soutiens qui ont fait chaud au cœur de Michelle et de son fils qui ont repris une vie à peu près normale. Aujourd’hui, Victor dit qu’il va bien. Mais quand on évoque avec lui cette triste histoire, il fond en larmes en rappelant que les handicapés ont toujours été des cibles faciles que « durant la deuxième guerre mondiale, c’est nous qu’on a envoyés en premier dans les camps de concentration ». 

Puis il se lève, monte dans sa chambre, et en redescend avec une maquette d’un wagon ayant transporté des déportés, « durant la première guerre, mais aussi la deuxième » précise-t-il. Encore des trains… Puis Victor conclut notre entretien en ces termes: « Maintenant, s’il y a un cheminot qui m’écoute, j’aimerais tellement refaire un tour en cabine ! » À bon entendeur…

Source FRANCE BLEU.

 

Pour marque-pages : Permaliens.