Maladie de Parkinson : « le regard des autres est blessant, sur moi, ma lenteur, mes petits pas » témoigne Danièle, 69 ans….

Le 11 avril, c’est la journée mondiale de la maladie de Parkinson. En France, 120 000 personnes en sont atteintes.

La maladie provoque le vieillissement accéléré de certaines zones du cerveau.

A Dole, dans le Jura, témoignage de Danièle, 69 ans, malade depuis une dizaine d’années.

Avec la maladie de Parkinson, "le mot-clé est la lenteur dans l'initiation et l'exécution des mouvements"

 

Il est 10h00 du matin. Dans sa petite maison, à Dole, dans le Jura, Danièle (*), 69 ans, me propose un café. Elle va dans sa cuisine et le prépare. Presque normalement. Mais elle sait que ça ne va pas durer. Dans quelques heures, la maladie de Parkinson s’imposera, brutalement :

« L’après-midi je ne fais rien, je suis une larve,  je n’ai plus du tout de force, Je dors, dans une espèce de sieste noire, un puits sans fond, le corps tombe, ça s’impose à moi. »

« Il faudrait que le temps dure deux fois plus longtemps ! Tout est ralenti, on ne peut pas oublier la maladie »

Danièle, 69 ans, atteinte de la maladie de Parkinson

Petit à petit, la vie s’est organisée au rez-de-chaussée de la maison. Impossible de monter à l’étage. Le risque de chute est trop grand. Les journées sont ponctuées par quelques courses et les promenades avec son chien, dans un parc en ville. Et bien sûr par la prise régulière de médicaments. 7 cachets,  répartis du matin au soir.

« Les médicaments nous aident à affronter le quotidien, sans aide chimique ce serait insupportable » précise-t-elle, « à l’hôpital de Besançon, il y a vraiment de la compétence et des personnes très bien, j’en suis très contente. »

Des cachets répartis tout au long de la journée : le traitem7nt médicamenteux permet d'améliorer le confort de vie des malades.

La maladie de Parkinson touche aussi l’amour propre des malades :

« C’est dévalorisant, je ne peux plus guère sourire, les muscles se figent, je donne l’impression de faire la tête alors que ce n’est pas vrai du tout ! »

Le regard des autres est tout aussi difficile, dit-elle, « sur moi, sur ma lenteur, sur mes petits pas. Les gens ne se rendent pas compte qu’ils peuvent blesser sans le vouloir. »

Tout commence en 2012. D’abord la main droite, avec la difficulté de plier les doigts. Quelques mois plus tard, son médecin soupçonne un problème neurologique. Le diagnostic est  confirmé par un neurologue. La réaction de Danièle oscille entre colère et abattement :

« On en veut au monde entier, je venais de prendre ma retraite, je ne pouvais profiter de rien  ! Je me suis dit, ce n’est pas possible, ça ne concerne que les personnes très âgées, pas moi ! »

Une maladie de plus en plus fréquente

Le docteur Matthieu Bereau est neurologue. Il travaille au centre expert Parkinson du CHU de Besançon, qui fait partie du réseau national NS-park. Il accompagne les patients aux différents stades de la maladie : diagnostic, complications et traitements, phase avancée. Le centre expert de Besançon est également associé à des protocoles de recherche.

Le neurologue résume la maladie de Parkinson en ces termes :

« C’est une maladie qui touche à l’essence de l’être humain, à ses émotions, à sa motricité »

Matthieu Bereau, neurologue au CHU de Besançon

La France compte 120 000 personnes touchées par la maladie de Parkinson. Elles sont 8000 de plus chaque année.

Avec le vieillissement de la population, la maladie de Parkinson va concerner de plus en plus de personnes, explique le docteur Bereau, « pour autant, ce n’est pas une maladie du sujet âgé, près de 20 % des malades ont moins de 65 ans. C’est typiquement la maladie de la pré-retraite, entre 55 et 65 ans, majoritairement des hommes ».

« Le mot clé est la lenteur »

La maladie de Parkinson et la maladie d’Alzheimer sont les plus fréquentes des maladies neuro-dégénératives. Elles provoquent le vieillissement accéléré de certaines zones du cerveau :

  • La zone de la mémoire, pour la maladie d’Alzheimer
  • La zone qui fabrique la dopamine, dans le cas de la maladie de Parkinson.

Le docteur Bereau précise le rôle de la dopamine : « Elle permet la fluidité des mouvements du corps. Elle joue aussi un rôle dans la motivation. Le mot clé est la lenteur, c’est une maladie qui s’associe à la lenteur dans l’initiation et l’exécution des mouvements ».

Pourtant, la lenteur n’est que la partie émergée de l’iceberg : « il y a des signes non moteurs, notamment des troubles de la motivation, de l’apathie, des troubles du sommeil, des difficultés à ressentir les émotions. »

Améliorer le confort de vie, mais pas guérir

Contrairement à la maladie d’Alzheimer, il y a des traitements. Non pas pour guérir. Ni pour ralentir l’évolution de la maladie. Mais pour améliorer le confort de vie des malades. Médicaments et pompes à dopamine sont les traitements les plus fréquents. La neuro-chirurgie concerne, elle, une minorité de cas. Il s’agit d’implanter des électrodes dans les zones profondes du cerveau, afin de réguler l’activité cérébrale.

« C’est une maladie multifactorielle », précise le docteur Bereau, « il y a des facteurs d’environnement, notamment l’exposition aux pesticides, et des prédispositions génétiques. C’est l’interaction entre ces deux types de facteurs qui fait qu’un patient peut développer la maladie ».

Quels sont les signes qui doivent nous alerter ? « Les symptômes sont la  lenteur dans la pensée et dans les gestes, les tremblements, une gêne à l’écriture, une perte de la motivation, qui passe parfois pour de la déprime ».

« Je pense aux aidants »

Depuis le décès de son mari, Danièle vit seule. C’est presque une chance, dit-elle avec humour :

« Je pense aux aidants, à ce qu’ils doivent endurer, parce les malades sont tellement lents… Moi au moins, je n’enquiquine que moi ! »

Un éclat de rire. Et puis le ton se fait plus grave : « Je  pense à la fin de vie, on sait comment on va terminer, complétement paralysée, c’est épouvantable ». Danièle a fait les démarches nécessaires pour partir un jour en Suisse. Le pays voisin qui a légalisé le suicide assisté.

En attendant, son chien s’impatiente. C’est l’heure de sa promenade.

Demain, Danièle pourra s’accorder un moment plaisant. Faire un petit tour en ville. Enfin, peut-être. Si la maladie de Parkinson veut bien l’oublier pendant quelques heures…

(*) le nom et le lieu de résidence ont été modifiés pour préserver l’anonymat

Source FR3.

 

 

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